
tivent par-ci par-là des ceps de vigne qu’ils enfouissent
l’hiver en terre afin de les préserver de la
gelée., car la neige et la glace durent si longtemps
dans ce pays qu’à peine y voibon du gibier
ou des oiseaux. Le jour même y est si obscur
et la lumière si faible , qu’on y voit à peine
clair.
« Cette nature du pays fut cause que l’armée endura
des privations inimaginables, et qu’elle s’abandonna
ensuite à un grand découragement; la fatigue, le
froid, l’absence de secours humain, la pénurie de
vivres, rendirent sa position des plus tristes. Les
soldats mouraient de froid en très-grand nombre,
tandis que d’autres avaient les pieds et les mains
gelés. L’éclatante blancheur de la neige surtout
fatiguait infiniment leurs yeux , et ils devenaient
aveugles. Ceux qui avaient l’imprudence de se jeter
par terre pour se reposer devenaient bientôt si
roides par le froid qu’il ne fallait plus songer à
les relever : ils n’avaient pour tout remède contre
ses terribles atteintes que l’exercice et le mouvement
de la marche. C’était à qui trouverait
quelque logis pour se refaire, mais, par suite de l’épaisseur
des brouillards qui régnent éternellement
dans ce climat, on ne découvrait les maisons que
par la fumée qui s’échappait des toits: dès que
les soldats pouvaient en rencontrer une ils s’y trouvaient
très-bien, car ces hôtes dont la solitude n’avait
jamais été troublée par personne, en voyant des
gens armés, apportaient promptement tout ce qu’ils
possédaidht à leurs pieds, tant ils étaient effrayés, et
« suppliaient leurs visiteurs de vouloir bien leur
« laisser la vie. »
Ce récit semble indiquer que les Macédoniens traversèrent
la Paropamisade en hiver, et je n’ai pas de
peine à croire les souffrances qu’ils endurèrent; mais
s’ils eussent passé par là pendant l’été, ils auraient
sans doute éprouvé autant d’agrément qu’ils éprouvèrent
de découragement, parce que le sol des vallées,
arrosé par la fonte des neiges, devient au printemps
d’une grande fertilité : les eaux vives y coulent dans
toutes les directions, et la chaleur, d’ordinaire si intense
dans les plaines afghanes, y est tempérée par
des courants d’air, qui se rafraîchissent encore au
contact des cimes glacées des plus hautes montagnes.
Ces particularités expliqueront donc à l’avance
la différence que l’on trouvera entre mon récit et
celui de Quinte-Curce.
Parmi les tribus Hézarèhs, il s’en trouve une appelée
Berbère comme les habitants de l’Algérie 1 : les
premières rejettent la seconde, et n’admettent pas que
leur origine soit commune ; mais il est incontestable
que celle de cette dernière est eïmake : le persan corrompu,
ou plutôt le persan primitif est le seul langage
dont elle se serve. Les Berbères sont musulmans,
de la secte des Chiàs, ainsi qu’un petit nombre de Hé-
zarèhs-Poucht-Kouhs, la majorité de ceux-ci appartenant
à la secte des Ali—Iliahis, qui croient à la
divinité d’Ali.
Dehas.—8 juillet.— Distance de 8 farsangs, entre
1 On rencontre partout dans l'Orient des tribus de Berb
è re s . — Ed.