
« sous ma tente, considérez la comme votre pro-
« pre maison et installez-vous-y tout à votre aise ;
« seulement je ne pense pas qu’un délai aussi pro-
« longé puisse etre favorable à vos affaires, puisque,
« d’après ce que vous dites, arriver à Kaboul le plus
« vite possible est le plus ardent de vos désirs. Il n’y
« a pour le moment qu’un moyen d’arriver à ce but,
« c’est de vous rendre soit à Ghaznèh, soit à Kanda-
« bar, pour vousdirigerensuite en toute sécurité vers
« Kaboul. La route de Ghaznèh est la plus courte et
« serait la plus facile à suivre en temps ordinaire;
« mais le chef des Hézarèhs Dèh-Zinguis, Méhémed-
« Sadeuk-Khan, a été assassiné il y a un mois par
« Bahadour-Beg, qui l’a remplacé et qui pille depuis
« ce moment tous les environs; il est en guerre avec
« Mir-Meuhi-Beg, chef des Hézarèhs de Yekeuho-
« ling, qui aspirait à remplacer Méhémed-Sadeuk-
« Khan dans le commandement de la tribu. Il vous
« serait donc aussi impossible de traverser en ce mo-
« ment le territoire de ces deux chefs que de retour-
« ner sur la route que vous venez d’abandonner : ce
« que vous avez de mieux à faire c’est de vous rendre
« à Kandahar par Gour ’. Le pays n’est pas très-sûr,
« pourtant il offre plus de sécurité que les autres ;
« le plus important, c’est d’arriver jusqu’à Hassan-
« Khan, Zohrab, chef des Hézarèhs Poucht-Kouhs :
« avec son aide, vous n’aurez plus rien à craindre. »
Ce nouvel incident me plongea dans la stupeur.
Avais-je donc vaincu tant de difficultés jusque-
1 Conolly a traversé le pays de ces Hézarèhs. — Ed.
là pour me voir arrêter à quelques jours de marche de
l’Indus? J’étais vraiment désespéré et je voulais à toute
force tenter de passer à Bamian, au travers de l’armée
afghane; mes compagnons ne se montrèrent pas alors
plus traitables qu’auparavant : tous me déclarèrent
qu’ils n’étaient point pressés de marcher à une mort
certaine, et que malgré leur désir égal au mien d’arriver
promptement à Kaboul, ils voulaient voyager
en toute sécurité. Seul de mon avis, je dus
me conformer à celui des autres : il fut donc convenu
entre nous qu’au lieu, d’aller droit à Kandahar,
nous irions auparavant à Ser-Peul, dont le gouverneur
Mahmoud-Khan, était l’allié et l’ami d’Hassan-Khan,
Zohrab, et que nous lui demanderions des lettres
de recommandation pour ce personnage. JRabi avait
été dans sa jeunesse au service du père de Mahmoud-
Khan et se faisait fort d’obtenir ces lettres. J’acceptai
ces conditions comme uu homme condamné à n’avoir
plus une volonté à lui, mais j’insistai pour que nous
nous rendissions promptement près de ce chef. J’eus
beau faire, mes Hézarèhs étaient en famille et il me
fallut passer la journée et la nuit dans le campement
de Kartehou, dont Alayar-Beg s’efforça, du reste, de
me rendre le séjour le moins triste possible.
Les Hézarèhs Tatars, avec lesquels nous étions campés,
forment une petite tribu établie entre les montagnes
que traversent la rivière de Khoulm et celle
de Balkh. Bien que Mir-Wali, de Khoulm, se targue
d’avoir sur eux un droit de suzeraineté, il lui est impossible
d’en user, tant cette population est intraitable.
Le pillage est l’occupation principale de ces gens-là