
portes sont en pierres de taille dont les surfaces ont
été tellement frottées et usées, qu’elles dénotent plus
de trente siècles d’existence. La garnison de la place
se compose de cent cinquante serbas hératiens, commandés
par le Serdar Dad-Khan, cousin de Yar-Méhé-
med-Khan, souverain du Hérat. Ce Serdar, gouverneur
du district, tient du gouvernement Kussan à ferme,
ce qui le porte à une foule d’exactions dont ses subordonnés
se plaignent beaucoup. Outre l’impôt sur
les cultures, il prélève encore le droit de badj sur les
caravanes, ce qu’il fait avec la plus grande rigueur,
afin d’augmenter ses émoluments, qui ne sont, m’a-t-
on dit, que de trente tomans, soit 360 francs par an. En
Perse, les Européens sont exempts de ce droit, mais
ici on n’a pas tant d’égards, et il me fallut l’acquitter.
Il se perçoit à raison de quatre sahebkrans (t fr. 20 c.
l’un) pour un chameau chargé, deux sahebkrans pour
un cheval ou un mulet, et un sahebkran pour un
âne, aussi chargés. C’est dans la citadelle de Kussan
qu’a été étouffé Châh-Kamràne, le dernier prince Su-
dozéhi du Hérat ‘.
1 On m’avail d it que Châh-Kamràne avait été tué dans la
citadelle de H é ra t, on le supposait du moins, car on avait
trouvé son cadavre au pied de la tour dans laquelle il couchait
habituellement; mais la version deM. F e rrie r est probablement
plus exacte. A l’époque où la Mission anglaise arriva, il n’était
pas sorti de la citadelle depuis dix-huit mois : ce lut le docteur
Login qui l'engagea à monter à cheval pour cause de santé, et,
pendant notre séjour à Hérat, Châh-Kamràne ne sortit jamais
sans le prier de l’accompagner. 11 donnait pour raison, lorsqu’on
lui demandait pourquoi il ne se produisait pas en public,
que le vézir ne lui avait pas donné un costume assez brillant
e t une suite suffisante pour représenter. — L.
Si la ville de Kussan a l’aspect triste et désolé, il
n’en est pas de même de ses alentours, qui sont des
plus pittoresques. Les rives du Héri-Roud sont bordées,
sur une longueur de plus de douze farsangs,
d’arbres de haute futaie et de taillis, qu’on nomme
la forêt de Chevech, du nom d’un petit village situé à
deux farsangs est de Kussan, où elle prend naissance.
Le tamarin domine là sur les autres espèces d’arbres,
et il est aussi le plus commun dans toute l’Asie
centrale, surtout au bord des rivières. Tout indique
que la partie de cette forêt qui s’étend dans
un rayon de deux farsangs, de chaque côté de
Kussan", a servi de réserve de chasse"aux princes de
Hérat, car le gibier se trouve rassemblé sur ce point
d’une manière si prodigieuse, que, de quelque côté
qu’on tourne les yeux, on l’aperçoit par douzaines de
têtes. Les lièvres, les perdrix grises et celles d’une
très-petite espèce appelée en persan tuyou, sont les
plus abondants ; on marche pour ainsi dire dessus.
Après eux viennent Jes faisans, les coqs de
bruyère, les siah-sinèhs, les sangliers, les daims, les
onagres et les renards. Cette réunion exceptionnelle
d’animaux sur ce lieu, y attire bon nombre de
bêtes féroces qui trouvent là une nourriture abondante.
Kussan fait un commerce d’échanges avec Khaff-
Rouye, ville persane située à 15 farsangs au sud-
ouest, qui est défendue par une bonne citadelle construite
parle SerdarTéhimouri-Kalech-Khan,tué sous
les murs de Hérat par Châh-Kamràne. Le neveu de ce
Serdar, Dost-Mohammed-Khan, est aujourd’hui gou-
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