
arrive au haut du dernier chaînon des montagnes;
vue de là, son aspect est très-pittoresque et sa position
paraît très-heureusement choisie. On y arrive en traversant
de riches cultures, de nombreuses plantations
d'arbres et une infinité de vergers et de jardins potagers
arrosés par de beaux courants d’eau vive qui
descendent des glaciers de l’Elevend. J’avais hâte
d’atteindre cette ville, car je n’avais plus la force de
me maintenir sur ma monture.
J’étais résolu à quitter immédiatement Hamadàn
s’il se trouvait une caravane prête à partir, mais
l’état pitoyable de ma santé me força d’y prendre
quelques jours de repos. Je perdais connaissance à
chaque instant, alors même que j’étais couché sans
faire le moindre mouvement. Les efforts infructueux
que je faisais pour vomir me fatiguaient beaucoup,
et j’avais le feu dans les entrailles, bien que je ne
busse que du lait et de légers bouillons de poulet.
Ces symptômes commencèrent à me donner des soupçons
sur la scélératesse d’Ivan, et je fus convaincu
quelques jours plus tard par son indiscrétion. Mais,
dans l’impossibilité où j’étais de rien prouver, je dus
me taire. Faire du bruit ne m’aurait servi qu’à révéler
magnifique, un maître de poste disait à un voyageur qui s’était
a rrê té à Hamadàn, en se rendant à Kermanchâh : — «Ah ! monsieur,
l’air est bon ici, les a rb re s e t les chevaux y vont bien,
mais hélas! c’est notre pauvre Iran (la Perse) qui est malade ! »
—11 disait vrai. Le pays est fort malade, e t s’il est jamais rég é n
éré, ce sera par le s classes moyennes de cette nation si bien
douée, et qui sentent bien plus vivement la dégradation du pays
que ne le font les nobles,—H.
ma presence en Perse, et j’avais tout intérêt à la cacher
; je ne dis rien, me promettant de congédier mon
coquin le jour où je quitterais Hamadàn. Il y avait
alors dans cette ville un Français, docteur liomoeo-
pathe, M. Jacquet, qui eut l’obligeance de venir me
visiter, et si son traitement ne me rendit pas une
complète santé, au moins me permit-41 de me remettre
en route.
Le docteur Jacquet était attaché aux bataillons d’infanterie
fournis par la tribu des Kara-Guzlou, qui
peuple les campagnes de la province d’Hamadân.
Deux mois avant mon arrivée, il avait été victime
d’un vol de douze mille francs, accompagné des circonstances
les plus odieuses et qui sont faites pour
donner une idée de la dégradation du caractère persan.
Une dizaine d’individus s’étaient introduits la nuit
dans le domicile du docteur; après avoir forcé la porte,
ils s’étaient jetés sur lui, l’avaient lié et avaient entassé
ses meubles sur son dos, pour le mettre dans
l’impossibilité totale de remuer. L’un d’eux, le poignard
sur la gorge, le força alors d’indiquer le lieu où
étaient son argent et ses objets précieux qui furent
pillés en un clin d’oeil. Pendant qu’il était, ainsi traité
par ces bandits, sa femme, une Arménienne d’Hamadân,
avait été descendue dans un tennour (four
persan, espèce de jarre enfouie darts le sol), où elle se
brûla les pieds Sir des charbons mal éteints. Ce vol
avait eu lieu depuis deux mois, et pourtant les
démarches de M. Jacquet, pour faire arrêter les coupables,
étaient restées infructueuses, bien que tous
fussent connus et ouvertement signalés par les hubi