est praticable seiileiiienl poiii' les bâtiments d ’un faible
tira n t d ’eau ; il a cinquante m ètres de large au plus. Nous
admirons à l’aise les villages et les ja rd in s pittoresques
qui s’étalent sur ses deux rives. Peu après nous rentrons
dans le lit princijial du Tigre et là, an lieu des bâtiments
européens stationnant à W am p o a , nous trouvons une
multitude de navires de formes toutes nouvelles pour
nous. Ce so n t d ’énormes jonques rangées en ligne et
prêtes à armer.
« Le long des bords du fleu v e, des bateaux couverts
établis à demeure occupent un espace considérable; ils
so n t groupés de manière à former plusieurs q u a rtie rs ,
laissant entre eux des passages qui figurent les rues d ’une
ville. C’est ici en effet que commence la ville flottante
de Canton. Une population de soixante m ille âmes (d ’autres
disent cent mille et p lu s) est consignée sur ces b a teaux
et n ’en peut sortir sans autorisation. Des familles
entières n a is s e n t, vivent et meurent dans ces frêles d e meures
, sans avoir jamis mis le pied en te rre ferme.
Dans les rues de cette cité aquatique circulent incessamment
des milliers d ’embarcations employées au ravitaillement
de ses habitants.
« A mesure que nous avançons , le fleuve devient de
plus en plus encombré. Des navires et des bateaux de
tout genre le sillonnent dans tons les sens. Ici c ’est une
jonque frégate on une jo n q u e corvette qui rem o n ten t
vers Canton; là d ’énormes bateaux chargés de thé pour
Wampoa ; ils sont flanqués, d ’un bout à l ’antre, de cu rsives
comme nous en avons vu à Manille, sur lesquelles
se tien n en t des mariniers chinois armés de longues p e rches
de bambou. Plus loin des bateaux de plaisance aux
ricbes sculptures d o r é e s , aux panneaux reluisants de
laque. Les u n s , restaurants am b u lan ts, sont le rendez-
vous des amateurs de b onne ch è re ; les a u tre s , lien de
rendez-vous aussi et parés avec plus de recbercbe, favorisent
d ’autres plaisirs.
,, Il faut to u t le sang-froid et toute Tbabileté pratique
d ’un patron du pays p o u r conduire un bâtiment sans
accident à travers tous ces bateaux et p o u r ne pas coule
r, en passant, quelqu’une des mille jietiles barcpies qui
se croisent incessamment d ’une rive à 1 autre.
« Cependant nous approchions du p o rt de Canton ;
déjà nous distinguions les pavillons de F ra n c e , de FIol-
la n d e e t des États-Unis d ’Amérique flottant au-dessus des
banderoles sans nombre qui s’agitent dans l’air jusqu’à
p erte de vue. Bientôt nous arrivâmes en face des factoreries
eu ropé ennes, beaux édifices rangés sur une même
ligne. La plus remarquable est la factorerie an g laise,
d o n t la terrasse saillante est soutenue p ar des colonnes
de granit. Les couleurs d ’Angleterre ne décoraient plus
sa façade depuis la ru p tu re de cette puissance avec la
cour de Pékin. La factorerie hollandaise , construite à
peu p rès sur le même modèle, est située en face du d ébarcadère.
C’est là que nous mîmes pied à terre.
« Le consul de Hollande , M. Van-basen , en ce moment
à Macao, était renqilacé par M. Simdorff, qui nous