« Les Aejelas soiil jiresque aussi noirs (jne les nègres
(lA iri(|ue ; ils sont mal laits, ont les jamiies grêles, le
ventre ballonné, la tète très-grosse, les cheveux laineux.
Ils sont extrêmement agiles el fort adroits à se servir de
1 arc. Us supportent facilement un jeûne de plusieurs
jo u rs. S ils ne tro u v en t point de quoi manger, ils boivent
abondamment de l’ean chaude ; mais après avoir été plus
ou moins longtemps privés d ’aliments plus substantiels,
ils se je tte n t avec voracité sur les premiers vivres q u ’ils
ren co n tren t. Dans ces c irco n stan c e s, un Aejeta mange
dans un seul repas ce qui suffirait cbez nous à rassasier
quatre bommes du meilleur appétit.
(( Us sont, à u ’en pouvoir d o u te r, aborigènes des Philippines.
Quand les Espagnols firent la conquête de cet
archipel, (ilusieurs bourgs des Tagals étaient tributaires
des Aejetas. Ceux-ci ne manquaient pas d ’exiger an n u e llement
le payement du trib u t stipulé. S’il se faisait
tro p a tte n d r e , ils fondaient sur le bourg à l ’improviste,
tua ient quel(|ues-ims de ses habitants, et emportaient les
têtes de ces malheureux en payement de ce qui leur
était dû.
« Après avoir passé quelque temps au milieu de la
trou])e d o n t je venais de partager le repas, je voulus
j)Ousser plus loin, afin d ’observer quelque autre bande de
ces sauvages, si je [>ouvais en ren co n tre r. Tout ce que
j avais v u , to u t ce ([ue m’avait d it la femme avec qui
je conversais était gravé dans ma mémoire. Il ne me
maiKpiail plus (|ue de contrôler ces premiers renseignements
par ceux que je recueillerais d ’une autre bouche.
« Je p a rtis, suivi de mes In d ien s, e t nous continuâmes
à nous avancer vers le no rd . Nous marchions
depuis peu de temps, quand une nouvelle troupe d ’Aejetas
se m o n tra devant nous. Mais à peine ceux-ci nous
eurent-ils aperçus q u ’ils p rire n t la fuite; il nous fut impossible
de les approcher. Quelques beures a p r è s , eu
en tra n t dans un bois tr è s - fo u rr é , nous surprîmes une
autre bande de sauvages qui n ’eurent pas le temps de nous
éviter, ,1e leur distribuai des cigares ; mais je ne parvins
pas to u t de suite à calmer l ’agitation que n o tre ajiparition
subite avait causée parmi eux. Ils étaient une soixantaine
environ. Munis de leurs armes, ils conservaient une a ttitude
de défiance hostile e t semblaient se concerter jiour
nous assaillir. Un d ’eux, fort heureusement, comprenait
et parlait la langue des Tagals. 11 fut mon truchement
auprès de ses camarades et il réussit à les apaiser. Bientôt
toute la troupe persuadée de nos intentions pacifiques
déposa les armes et se m o n tra disposée à nous recevoir
amicalement.
« Cette trib u n ’avait pas même, comme la première,
un toit p o u r s'abrite r : elle campait à la belle étoile.
Hommes et femmes, enfants e t vieillards étaient co u chés
près des cendres d ’un foyer presque é te in t, reste
des grands feux q u ’ils avaient allumés p o u r sécber et
échauffer le sol. Je m ’assis avec eux et je ne manquai
pas de questionner celui qui m’avait déjà servi d ’in terprète.
Ses réponses confirmèrent ce (|iie la femme