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prendre en passant quelques provisions fraîches pour son
équipage , surtout p o u r ses malades. Les mauvais temps
éprouvés dans le voisinage du cap avaient fait mourir en
effet toutes les volailles embarquées au départ. Il était
indispensable de se p ro cu rer quelques nouvelles ressources,
dans l ’intérêt de la santé des hommes déjà ép ro u vés
par un long séjour à la mer et co n d am n é s, pour
longtemps encore, au régime h abituel des viandes salées.
Il craignait de voir le scorbut se manifester parmi eux.
La suite prouvera que ses appréhensions n ’étaient que
tro p fondées.
Le 5 septembre, la Bonite ari'iva devant James-Town,
cbef-lieu de l’île Sainte-Hélène. Le navire français ie
Mars sortait en ce moment de la baie. 11 venait de
France et se dirigeait sur Bourbon, après avoir passé
b u it jo u rs a Sainte-Hélene où il avait vendu aventageu-
sement une partie de sa cargaison. Le capitaine du Mars,
dès q u ’il aperçut le pavillon de la c o rv e tte , se ren d it à
bord de ia Bonite, sûr du plaisir q u ’il devait faire à
M. Vaillant en lui d o n n an t des nouvelles de France.
Celles q u ’il apporta it n ’étaient p oint sans in té rêt; elles
furent reçues p ar nos voyageurs avec la satisfaction que
procure à 1 exile to u t ce q u i lui rappelle le souvenir de
la patrie absente.
Il n y avait pas longtemps que les bâtiments arrivant
sur la rade de James-Town ne pouvaient y je ter l’ancre
sans en avoir d ’ab o rd reçu l’autorisation du gouverneur
de l’ile. Le commandant ignorait que cette formalité eût
été supprimée depuis peu. Aussi avait-il d ’avance résolu
de ne point je te r l’ancre et de laisser la corvette sous
voiles pendant les courts moments q u ’il passerait à terre.
Il ne prévoyait pas alors que cette détermination, prise surtout
en vue de prévenir des re ta rd s , aurait précisément
un effet to u t opposé.
Laissant donc son bâtiment à la conduite du lieutenan
t , il p rit un canot et se ren d it à te rre accompagné
d ’une partie de son état-major.
Tout le monde sait p ar coeur ce que je pourrais dire
ici de Sainte-Hélène. L’ile p a r elle-même n ’offre d ’intérê
t ni p a r son importance comme colonie, ni p ar son
aspect dépourvu de toute beauté. Vue de la mer, c ’est
un roche r aride et à peu près inaccessible de tous côtés.
Pas une mousse ne tapisse les falaises à pic qui la
b o rn en t ; c’est à peine si quelques arbres rares et rab o u gris
se montrent à son sommet, comme sur une téte
chauve apparaissent encore quelques cbeveux oubliés
par le temps. Vue de plus près, elle ne présente pas une
image plus riante.
James-Town, hérissée de fortifications et resserrée au
fond d ’un étroit ra v in , entre les masses rocheuses des
montagnes qui la d om in en t, cherche vainement à se
p are r de quelques arbres que la main de l’homme contra
in t de végéter dans son aride enceinte. Le Jardin du roi,
entretenu à grands frais et soigneusement g a rd é , semble
n ’être là que p o u r prouver l’inanité des efforts de
l’homme lorscju’il veut forcer une nature rebelle.