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j)liis difficile, on ne jioiivail jilus avancer q u ’en gravissant
l)énil)leinenl une succession de coteaux dont les flancs
abrupts étaient couverts de bois et embarrassés de b ro u ssailles
et de lianes. A trois beures, n ’en pouvant plus de
fatigue et de faim, nous fîmes halte p o u r manger un
peu de r i z , reste de n otre souper de la veille. Mais il
fallut b ientôt se rem e ttre en r o u te , car le guide nous
pressait d ’avancer, voulant, disait-il, arriver le plus tôt
possible dans une partie de la forêt où nous pourrions,
plus facilement q u ’ailleurs, nous établir p o u r la nuit.
« La partie de la forêt que nous traversions alors ne
présentait plus cette riche végétation que nous avions
ta n t admirée sur le premier plateau. 11 est vrai que nous
étions déjà dans une région beaucoup plus élevée. En
revanche, le cbemin devenait moins impraticable sur la
cime des montagnes et nous marchions aussi vite que nos
forces nous le p e rm e tta ie n t, sous une pluie fraîche qui
nous incommodait beaucoup et augmentait n o tre impatience
d ’arriver.
« Enfin parut devant nous le lieu q u ’avait choisi d ’avance
mon guide indien. C’était une espèce de clairière
dégarnie d ’arbres et de broussailles. La pluie avait un
peu cessé de tomber ; mais les nuages noirs qui s’am o n celaient
sur nos tètes annonç aient un violent orage.
J ’étais harassé de fatigue e t, de p lu s , dévoré p a r d ’innombrables
petites sangsues d o n t je ne pouvais p a rvenir
à me préserver. Un de mes Indiens essava d ’allumer
du feu. C’était difficile, car le bois était imprégné
d ’eau. Il y réussit (lourtant avec la ressource de la gomme
élémi très-abondante en cet en d ro it, e t j ’éprouvai uii
b o n h eu r véritable à pouvoir sécher mes vêtements. Pend
an t ce temps, mes autres Indiens n ’étaient pas restés
oisifs. Avec quelques pieux et des feuilles de palmier,
ils construisirent une espèce de cabane qui devait nous
abriter ; e t , comme le sol était h um id e , ils d isp o s è ren t,
pour nous servir de lit, plusieurs morceaux de bois ré u nis
en manière de plancher q u ’ils assujettirent à quelques
pouces de te rre. Ce n ’était pas une couche bien
moelleuse, mais j ’espérais du moins y reposer tran q u illement.
Je m’y étendis, en effet, après avoir pris iin peu
de n o u rritu re e t je commençais déjà à céder au sommeil
q uand de violents coups de to n n e rre , éclatant to u t à
c o u p , prélu d è ren t à l’orage p rê t à fondre sur n o u s .
Bientôt après, la pluie tombait p a r to rre n ts. Le b ru it de la
foudre répété par tous les échos des montagnes, celui du
vent qui gémissait dans toutes les feuilles de la forêt, l’eau
qui perçait le toit de mon fragile ab ri et venait m ’in o n der
sur ma couche, enfin les maudites sangsues d o n t je
ne pouvais plus me défendre , me tin ren t forcément
éveillé toute la nuit.
t( L’orage ne cessa q u ’aux premières lueurs de l ’aurore.
Je sortis alors de mon gîte ; je pouvais à peine me re muer.
Que n ’aurais-je pas donné dans ce moment pour
un b o n feu ! Nous n ’avions pu en conserver p en d an t la
p lu ie , et mes membres couverts d ’horribles piqûres
étaient engourdis p a r le froid. Mais il ne fallut pas même