normes profits. Et c ’est là p roprement ce qui arrive au
commerce français. Il lutte avec de troj) faibles moyens
conti-e des rivaux (pii procèdent par millions de piastres.
Il doit succomber [larloul ; c’est la loi commune.
On parle de naviguer avec économie ! Que se passe-
t-il en ellèt? ,1 ai navigué moi-méme sur des navires du
commerce français et je me d em a n d e , après avoir vu,
(|iielles sont les économies possibles (|u ’ou ne fasse pas à
b o rd de ces navires. Ils o n t un é(|uipage strictement nécessaire
pour la manoeuvre : pas une boucbe inutile ; car
to u t le monde travaille, dejuiis le capitaine ju sq u ’au d e rnie
r ])iloliii. Les bommes sont nourris convenalilement,
mais n ’ont cerlaiiieuient rien de trop. L’armement plus
ou moins soigné est ])lutôt au-dessous (ju’au-dessus de
ce (|u’oxigent les fatigues et les chances d ’une longue
navigation. Le luxe n ’y paraît nulle p a rt. Pas un bo u t de
corde, j>as nn mor(;eau de toile, pas un fragment de bois,
pas un clou qui soient gaspillés ou perdus. Tout est employé,
tout sert. Les voiles, incessamment rapiécées, sont
usées juscju’au dernie r b rin avant d ’étre remplacées par
des voiles neuves, e t tous les travaux, toutes les rép a ra tions
(|u ’oii peut faire sans frais à bord o c c u p en t, du
matin au soir, les instants de l’équipage. Il n ’y a pas une
lieuie de perdue, et je me suis souvent extasié à la vue
de tout le parti (|u’on peut et q u ’on sait tire r de ces
braves marins , que bien des gens supjioseut ignorants
et gros.siers, mais qui sont eu réalité intelligents, adroits,
bons à tou!.
L’économie ! il n ’y en a p eu t-ê tre (pie trop à bord de
nos navires ; mais c ’est l ’économie ruineuse du pauvre;
l’économie forcée de lésiner su r des déjieuses nécessaires
qui en préviendraient peut-ê tre de plus grandes.
Cette économie, qui pousse l’arma teur à réduire les frais
d ’armement et d ’installation de son navire au strict né--
cessaire, toujours insuffisant, d ’où résulte souvent la n é cessité
de réparations onéreuses en cours de campagne ;
ce tte é c o n om ie , qui fait craindre au capitaine les moindres
avaries, le ren d timide à l’approcbe du moindre
grain et le condamne à de longues traversées , de peur
de casser (juelque vergue ou de défoncer quelques voiles,
en vou lan t /(M/e de la toile, selon la j)ittores(jue expression
des marins !
Aussi, voyez nos n av ire s, à côté des navires de commerce
étrangers ! Ils n ’ont ni la grandeur e t l ’asjject impo
san t des bâtiments de la compagnie des Indes , ni le
luxe et la recherche des navires paquebots des États-
Unis, ni la mâture h a rd ie des navires anglais couverts de
voiles. Us sont simples et modestes dans leur a llu r e ,
jirojires, autant que le perm e tten t leurs moyens e t le
service (ju’ils font ; mais généralement jilus timides que
leurs rivaux et contraints de ma rcher moins v ite , parce
que le cavalier a besoin de ménager sa monture.
Tout cela changerait sans n ul doute, si n o tre commerce
jiouvait disposer de plus grands capitaux; si nos armateurs
étaient en état d ’en trep ren d re des ojiérations sur
nne jtlus grande échelle; si l ’esprit et la richesse de