On lui avait dit le malin q u ’une embarcation de la
Bointe, ayant essayé d ’aborde r sur la rive d ro ite , en
avait été empêchée. Curieux de vérifier ce q u ’il pouvait
y avoir de fondé dans ce r a p p o r t, il feignit, en red e scendant
la riv ie re , de vouloir aussi to u ch er à la rive
droite. Ce mouvement mit en émoi toute la force armée.
Les soldats qui garnissaient la rive gaucbe se je tte n t aussitôt
dans des bateaux p o u r venir p rê te r main-forte à
leurs camarades du rivage o p p o s é , qui de leur c ô té , se
gro u p an t sur le p o in t vers lequel était diiigée l’embarcation,
lui faisaient signe de s’éloigner. x\I. Vaillant n ’avait
pas l ’intention de pousser plus loin l’expérience. Il se
rendit à leur invitation ; m a is , comme sans ab o rd e r au
rivage in te rd it, le canot le prolongeait à petite d is tan c e ,
les pauvres soldats cochincbinois qui craignaient sans
doute un e surprise, co n tin u èren t à l’accompagner toujo
u rs en co u ra n t sur la p la g e , ju sq u ’à ce q u ’il fût hors
de l’embouchure.
Ainsi, il restait bien démontré que le débarcadère en
face de la maison du roi était le seul point de la rivière
qu’il fût permis d ’accoster en canot.
Il filu t s o n g e r a u d é p a r t .
Il devenait évident de toutes manières que la présence
de /a Bonite contra riait singulièrement les autorités locales
qui cb e rch a ien t, p a r mille vexations indirectes, à
dégoûter les Français de prolonger leur séjour. Ce fut
encore plus clair le lendemain. Quand ou se présenta
au bazar p o u r acheter les provisions du jo u r, pas un
m a rchand ne voulut rien vendre : les mandarins l’avaient
défendu. N’osant employer la force p o u r faire p a rtir la
corvette, ils lui coupaient les vivres; cependant, l’élève
de corvée étan t allé se plaindre au mandarin de Toura
n e , celui-ci ne soutint pas ju sq u ’au bout sa résolution,
et les vivres furent livrés.
Cette situation ne pouvait se prolonger sans amen
er probablement quelque occasion de regrettables
conflits. M, Vaillant le sentait b ie n ; mais il tenait à
laisser aux officiers chargés des diverses opérations
scientifiques le temps qui leur était absolument nécessaire
p o u r ren d re leur relâche vraiment profitable. C’est
ce qui explique le soin q u ’il p ren a it d ’éviter to u t sujet
de mésintelligence avec les autorités du p ay s, et la p a tience
avec laquelle il supportait mille contrariétés afin
d ’a tteindre son unique b u t : temporiser.
Le terme q u ’il avait d ’avance assigné â sa relâche aji-
p ro ch a it cependant, car il comptait p a rtir le 4 février.
Dès la veille de ce jo u r, to u t fut disposé p o u r le d épa rt.
On leva l’observatoire, les instruments furent rapportés
â b o rd de la Bonite, les canots eux-mêmes furent em-
bai'f|ués dans la soirée; il ne restait plus q u ’a mettre a la
voile.
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