avait fait préjiarer à n o tre intention une collation dont
elle voulut nous faire les honneurs quand nous entrâmes
an salon. Nous ne pûmes nous défendre d ’accepter
sa politesse et nous nous assîmes autour d ’une table
couverte de gâteaux, de fruits, de confitures et de liqueurs.
Pendant ce temps M"“ P é r e ir a , jeune personne
de quinze ans, exécutait sur le p ia n o , avec un rem a rquable
talent, l’ouverture du Barbier de Séville et divers
morceaux de musique française. Ces dames avaient pensé
avec raison que rien ne devait être aussi agréable à des
voyageurs comme nous que d ’e n te n d r e , à l ’au tre b o u t
du monde, les airs chéris de leur pays.
« Peu de journées pendant n o tre long voyage furent
si bien et si agréablement remplies ; il ne nous restait
plus q u ’à ren tre r à b o rd de ia Bonite. La mer e t le vent
étaient contre nous. Le c anot mit trois heures à atteindre
la corvette et nous y arrivâmes trempés juscju’aux os;
mais c’était une bien petite co n tra riété , en comparaison
des jouissances de toute la jo u rn é e ; nous ne regrettâmes
pas de les avoir achetées à ce prix.
U n tem p le c liin o is.
« Le lendemain (c’était le 4 janvier), nous partîmes du
b o rd à cinq heures du matin p o u r rép o n d re à l’invitation
de M. Cbinery.
i( 11 était déjà sorti quand nous nous présentâmes chez
lui ; mais un homme posté p o u r nous a ttendre nous co n
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duisit à l’en d ro it où il dessinait. Nous le trouvâmes au
milieu d ’une r u e , tranquillem ent établi dans son palanquin,
atelier p o rta tif d ’où il p rena it commodément la
vue d ’une église assez pittoresque. 11 nous proposa d ’aller
ensemble faire le croquis d ’une pagode située dans une
position romantique à la pointe du p o rt de Macao.
« Ce temple chinois a quelque cbose d ’imposant et de
mystérieusement religieux. Sur le p en ch an t d une montagne
presque à pic, au milieu de rocbers sauvages, plusieurs
grands arbres ombragent de leur feuillage noir les
autels consacrés aux dieux q u ’ad o ren t les Chinois. C’est
là que le peuple vient p o rte r ses voeux e t ses offrandes
« Les dévots y affluent continuellement; les uns b rû len t
de petits morceaux de p ap ier sacré ; d ’autres déposent
dans u n lieu désigné des fruits et des mets to u t préparés
d o n t les bonzes profitent.
« Plusieurs consultent l’oracle de la pagode : ils tien n en t
dans les mains les deux moitiés d ’une espèce de racine
de forme ovale exactement fendue p a r le milieu. A un
moment d o n n é , ils les laissent tomber par te rre. Si l ’un
e t l’au tre morceau tombent dans le même sens , l’oracle
est favorable; ce sont alors des élans de joie et d ’espéranc
e. Mais si les deux fragments p ren n en t, en tombant,
des positions in v e rse s, c ’est du malheur qu annonce
l’o rac le; alors le pauvre Chinois, d é co u rag é , pleure et
s’arrache les cbeveux.
« Les flots de la baie se b risen t en mugissant an pied
des rochers sur lesquels s’élève la pagode. On aperçoit
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