
ÀjË H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e . ’
me fouviens qu’à l’autre centième année mon
® n . 1300. pere ¿toit un laboureur vint à Rome, Si y
demeura pour gagner l’indulgence autant que durèrent
les vivres qu’il avoit apportez ; il m’avertit
de ne pas manquer d’y venir à la prochaine centième
année , fi je vivois encore , ce qu’il nè
croïoit pas. Quelques-uns des aftiftans aïant demandé
à ce vieillard ce qui l’avoit fait venir à
p.ome , il dit que l’on pouvoit gagner cent ans
d’indulgence chaque jour de cette année. On
avoit en France la même opinion de l’indulgence
qu’on gagnoit à Rome , comme témoignoient
deux hommes du diocefe de Beauvais, âgez de
plus de cent ans, Se pluiieurs Italiens parlaient de
même.
Après ces informations le pape confulta les
cardinaux, Se fuivant leur avis il fit dreiTer une
bulle , où il dit : Selon le rapport fidele des anciens,
il y a de grandes indulgences accordées à
ceux qui vifitent leglife du prince des apôtres;.
Nous les.confirmons Se les renouvelions toutes :
mais afin que faint Pierre & faint Paul foient
plus honorez, Se leurs églifes plus fréquentées ,
nous accordons indulgence pleniere à tous ceux,
qui étans vraïement repentans Se s’étans confef-
fe z , vifiteront refpeéàueufement iefdites églifes
durant la prefente année 1300. commencée à
Noël dernier & toutes les centièmes années fui-
vantes. Ordonnant que ceux qui voudront participer
à cette indulgence , s’ils font Romains
vifiteront ces églifes pendant trente jours de fui-
Ram. ». 4.
TLxtrav. eomm.
de poenit. c. i. -
L i v r e LXXXIX.
te ou interrompus, Se au moins une fois le jour :
s’ils font de dehors ils les vifiteront de même pendant
quinze jours. Mais plus ils y viendront fou-,
vent Se devotement, plus l’indulgence fera efficace.
La datte eft du vingt-deuxième de Février
fête-de la chaire faint Pierre , Se la bulle fut
publiée le même jour. Remarquez qu’il n’y eft
point parlé de jubilé, ni de l’exemple de l’ancienne
loi.
Cette bulle fut reçue avec une extrême joie des
peuples. Les Romains les premiers fans diftinc-
tion dage Se de fexé vifitoient les églifes des apôtres
pendant le nombre de jours preferits. Enfuite
on y vint de toute l’Italie, de Sicile, de Sardaigne,
de. Corfe, de France, d’Efpagne, d’Angleterre,
d’Allemagne, de Hongrie. Non feulement les jeunes
gens Se les hommes vigoureux y venoient,
mais les vieillards de foixance 8c dix ans & des
infirmes portez dans des litieres. On remarqua
entr’autres un Savoyard âgé de plus de cent ans,
que fes enfans portoient, 8c qui fe fouvenoit d’avoir
affifté à la ceremonie de l’autre centième ail-
née. Ces circonftances font rapportées par le cardinal
Jacques Stefanefchi, qui étoit alors à Rome,
& avoit part aux confeilsdupape. L’hiftorien Florentin
Jean Villani rend le même témoignage ,
8c dit , que la plus grande merveille qu’on eut
jamais vûë, fut que pendant toute l’année il y eut
continuellement à Rome deux cens mille pèlerins
, outre le peuple Romain, fans compter ceux
qui ètoient par les chemins ; 6e tous furent pour-
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