
l é Sixième Difcours
ir.t.y. dlfc*n.%» tc g lé le tems & les exercices de la penitcnce. Les faints qui les
avoient établis n’avoicnt pas feulement en vûë de punir les pécheurs
, ils cherchoient principalement à s’aflurer de leur conversion
, & vouloient encore les precautionner contre les rcchûtes.
O n commençoit donc par les feparer du refte des fideles, & on les
tenoit enfermez pendant tout le tems de leur penitcnce, excepte
lorfqu ils dévoient aififler dans l ’égUfe aux prières communes & au,x
inftru&ions. Ainfi on éloignoit les oçcafions de p é ch é , & le recueil-
lern^nt de cette retraite donnoit aux penitens le loifir & la commodité
de Lire de ferieufes reflexions fur l’énormité du p é ch é , la
rigueur de l i juftice de D ie u , les peines éternelles, & les autres v e -
ritez ter ribles , que les prêtres qui prenoient foin ne manquoiept
pas de leur reprefenter, pour exciter en eux l’efprit de componction.
Enfuite on les co n lo lo it, on les encoura geo it, & onJ es affer-
miifoit peu à peu dans la refolution de renonper pour toujours au
péché & mener une v ie nouvelle.
Marin, lib. y n . .Ce ne fut que dans le huitième fiecle que I o n introduififcies pe-
r' lerinages , pour tenir lieu de fatisfaCtion j & ils commencèrent a
ruiner la penitence, par les diftraCtions & les occafions de rechutes.
^Encore ces pèlerinages particuliers etoient-ils bien moins dangereux
que les Croifades. Un penitent m archant ieu l, ou avec un autre
penitent p o u v o itp b fe rv c r une certaine r é g lé ; jeû n e r , ou du
.moins vivre fob remen t, avoir des heures de recueillement & d e f i-
len c e , chanter des pfeaumes, s’occuper de bonnes penfees, avoir
des converfations édifiantes : mais toutes ces pratiques depiete ne
convenoient plus à des troupes affemblées en corps d^rmée. A u
contraire les C ro ifé s 9 du moins quelques-uns , cherchoient a fe
d iv e r tir , & menoient des chiens & des oifeaux pour.chafler en che-
bift. liv. tx ix . min faifant : com m e il parojt par la défenfe qui en fut faite à la fecoji-
n. i i . de Croifadé. .
Eug.iiup.i.to. C e t o i t pour ainfi d ire , des pécheurs to u t c ru s , qui fans conver-,
X.conc.p. 1047. fo n de coeur ,& fans préparation précédente , finon peut-être une
confelTion telle q u e lle , alloient pour 1 expiation de leurs pcchez
s’expofer aux occafions les plus dangerufes d en commettre de
nouveaux : des hommes choifis entre ceux de la vertu la plus éprouvée
auroient eu peine à fecon ferv er en de tels voiages.. Il eft vrai
que quelques-uu sy préparoient ferieufement a la m o r t , en païant
Joinv. p» x i . jeut^ J ^ t e s , reftituant le bien.mal acquis , & iàtisfaifant a tous ceux
a qui ils avoient fait quelque to r t : mais il faut avouer auiTi q p e la
Croifade fervoit de prétexte aux gens oberez pour ne point païer
leurs dettes , aux malfe&eurs pour éviter la punition de leurs c r imes
, aux moines indociles pour quitter leurs cloîtres , aux fem"
mes perdues pour continuer plus librement leurs defordres; car il
s’en trou vo it à la fuite de cès armées , & quelques-unes dégui-
m m p, m fées en hommes. Vous avez vû que dans l’armée même de faînt
Louis,
Jur PHifioire Ecclefiaftique. 17
L o t ir s , dans fon quartier & prés de fes tentes on trouvoit des lieux
de débauché; de qu il fut obligé d’en faire une punition exemplaire.
U n poëte du tems décrivit l ’h iftoire du châtelain de Couci qui partit
pour la Croifade pafllonnement amoureux de la femme d’un gentilhomme
fon voifin , c ’e ft-à-dirc emportant l ’adultere dans le coeur ;
de m ourant dans le voïage chargea un de fes amis de faire embaumer
fon coeur & le porter a fa d am e c om m e i lf it . N ’é to it-ce pas là de
dignes fruits de penitence ?
Les Croifés qui .s’é tablirent en O r ien t après la conquefte, loin de
fe convertir , fe corrompirent déplus enplus, L a chaleur du climat
& 1 exemple des naturels du pais les am o llit, de les excita à ne fe refu-
feraucunplaifir,principalement dans les quartiers-les plus fertile s ,
comme la vallee de Damas fi delicieufe: leurs énfans dégenererent
encore , de formèrent une nouvelle nation nommée les Poulains,
quin eftfameufe que par fes vices. E t voilà l’honneur qui revint à
J .-C . de ces entreprifes formées à fi grands frais.
Enfin Jerufalem de la terre fainte font retombées àu p ouvoir des
Infidèles, de les Croilades ont ceifé depuis quatre cens ans ; mais les
penitences canoniques ne (ont point revenues. T an t que les Cro ifades
durèrent,.elles tinrent lieu de penitence, non feulement à ceux
qui fe croifoient volontairement, mais à tous les grands pecheurs, à
qui les eveques ne donnoient l’abiolution qu’à la charge de faire en
perfonne le fervicede la terre fainte pendant un certain ?,tems, ou
d y entretenir un nombre d’hommes armez. I l fembloit donc
qu après la fin des Croilades on dût revenir aux anciennes penitences;
maisl ufage en etoit interrompu depuis deux cens ans au moins,
& les penitences etoient devenuës arbitraires. Les évêques n’ entroient
plus gueres dans le détail de l ’adminiftration des facremens :
les freres Mandiansen etoieftt les miniftres les plus ordinaires, de ces
millionnaires palfagers ne pouvoient fuivre pendant un long-tems
la conduite d un penitent, pour examiner le progrez & la folidité de
fa co n v e r fio n , comme faifoient autrefois les propres pafteurs : ces
religieux etoient obligez d’expedier promptement les pécheurs pour
palier à d’autres..
D ailleurs on traitoit la m orale dans les écoles comme le refte de
la théologie* parraifonnement plus que par auto rité, de problématiquement
mettant to u t en queftion , jufques aux veritez les plus
claires*d ou font venuës avec le tems tant de décifions des cafuites ,
eloignees non feulement de la pureté de l’é v an g ile , mais de la droite
raifon» Car o u ne v a-t-on point en ces matières quand on fe donne
to u te lib erté de rationner ■? O r les cafuites le font plus appliquez
a faire connoitrc les pechez qu’à en montrer les remedes.
Ils fe font principalement occupez à décider ce qui eft péché mortel
, & a diftioguer à quelle vertu eft contraire chaque péché ; fi
c e f t la juftice , la prudence, ou la tempérance •: iis fe font étudiez
Tome XkFI I I . c
jrattehet Poïtes
J7*. Hv. 1. c. 17.
*ÿac. Vitr. bift•
Qr.Hb. î.c» 71.
Cang.glofi. Pul-
lanü
Morin. X pceniu
c. x y 16.