
4 3 s H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
s’y confervoit fans brûler, les deux partis re^
connoîtroient que Dieu fe feroit déclaré pour
les auteurs de cet écrit : que fi tous les deux
brûloient, les deux partis fe réüniroient encore,
jugeant que le feu auroit confumé le fujet de
leur divifion. Nous avons vû que l’épreuve par
le feu , au moins par le fer chaud , étoit encore
en ufage çheç les Grecs vingt-cinq ans aupara-
vant.
L’empereur, qui n’épargnoit rien pour procurer
l’union , fit fabriquer exprès un brafier
d’argent ; & comme on étoit à la femaine fainte
il marqua pour le jour de l’épreuve le famedi
fain t, qui cette année étoit le huitième d’Avril.
Les deux partis fe prrparerent à cette aétion
par plufieurs prières, & le jour étant venu, ils
mirent leurs livres entre les mains de perfonnes
pieufes publiquement & en prefence de l’empereur.
Ces perfonnes non fufpeéàes jetterent les
Jivres dans le feu : les parties intereifées faifoient
des prières ardentes, afin que Dieu fe déclarât
en leur faveur : mais le feu fit fon effet naturel ;
les deux volumes brûlèrent comme de la paille,
& en moins de deux heures, il n’en refta que
la cendre. Alors les Arfenites témoignèrent à
l’empereur qu’ils fe foumettoient au patriarche
Grégoire , Sc le prinçe tranfporté de joïe , les lui
mena fur le champ marchant avec eux a pied ,
nonobftant la neige qui tomboit. Ils reçurent
de lui des eulogies , & même la fainte communion
enforte qu’ils paroiffoient entièrement re*-
L i v r e L X X X V I I I . " 437
Venus de leur fchifme : mais dès le lendemain
qui étoit le jour de Pâques, leur ardeur pour AN< 11 4>
l’union commença à fe refroidir ; ils crurent avoir
été furpris , & s’étant â peine contenus pendant
ce jour-là, le lundi prefque tous réclamèrent.
L’empereur voïant qu’il avoit travaillé en vain,
affembla les principaux d’entre les Arfenites pour
leur parler, &i leur demanda ce qu’ils penfoient
du patriarche Grégoire. Ils furent embaraffez :
car il étoit étrange de ne le pas reconnoître pour
triarche, après avoir reçû la communion de fa
main ; & le reconnoiifant il n’étoit pas honnête
de chercher des prétextes de fcandale pour refufer
de fe réunir à lui. Enfin ils avouèrent qu’il étoit
patriarche. Alors l’empereur le fit paroître, car
il lé tenoit caché tout proche revêtu pontificale-
ment ; & Grégoire fe voïant reconnu par les Arfenites
, commença à leur reprocher d’avoir manqué
à leurs promefles, emploïant ces paroles de
faint Pierre : Ce n’eft pas aux hommes que vous au t . *3
avez menti, c’eft à Dieu ; & auffi-tôt il prononça
contr’eux excommunication , croïant ramener
par-là ceux dont la confidence étoit la plus tendre.
Mais ce procédé les aigrit davantage, & ils
fie retirèrent fans fe foucier de l’excommunication.
Il en demeura toutefois quelques uns, dont l’empereur
& le patriarche fe réjoiiirent, comme s’ils
les avoient tous ramenez. Ceux-ci demandèrent
outre ce que l’on avoit déjà fait contre le parti
oppofé, que tous ceux qui avoient été ordonne?;
I i i iij