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rat. Au relie, d’ après des expériences tentées par le
célèbre Scarpa ( i ) , il ré luire que cette dernière
fenfation eft obtul'e chez les gallinacés 8c les paflè-
reaux> mais que.dans les rapaces elle jouit d'une
grande aétivké, ainfi que dans les familles des
échafTirrs & des palmipèdes furtour. En effet, les
Anciens donnoienc à l'oie un odorat auffi délicat
que celui du chien ; Ætien dit que. le philofo-
phe Lycade avoit une oie qui le fuivoit à la pifte
comme l’ auroit fait un chien ( i ) , & Ifidore, qui
partage cet avis, affure que les oies ne peuvent
fouffrir i'odeur des feuilles du laurier, 8c qu'elles
ne goûtent point une nourriture où Ton en a
mêlé. On fait enfin le fervice que ces oifeaux
ont rendu à l’antique Rome, 8c qui a fait dire à
un poète latin:
........Hu.ma.mim longe prafentit odorem
Romulidarum acris fetvator candidus anfer.
Un commèntateur d’Ariftpte, cité par Ange
Politien, nous apprend que les Grecs, ayant livré
une bataille, une troupe de vautours affamés arriva
de cent foixante-fix lieues le lendemain pour
faire la ciirée (3}. Æiien fe contente de dire qu’ils
fuivent les armées, parce que l’expérience leur a
appris que des armées ne fe rencontrent guère
fans fe battre (4). Sonnerat (y) rapporte la même
chofe d’ une efpèce de grands vautours très-voraces
qui habitent aux Iodes (6) ; 3c Will. Bar-
tram ( 7 ) affirme que les rois des vautours ( farco-
ramphui papa) viennent de fort loin en troupes
nombreufes lorfque les plaines ont été brû'ées
ou par le feu du c ie l, ou par les Indic ns qui veulent
faire lever le g ’bier : on les voit alors fe raf-
fembler de tous côtés, 8c delcendre fur la terre
encore couverte de cendres chaudes, pour y ra-
maffer les ferpens & les lézards grillés. Il en eft
de même des condors ( farcoramphus cuntur ).
M. de Humboldt (8) rapporte qu’au Pérou, à
Q u ito , & dans la province de Popayan, quand
on en veut prendre, on tue une vache ou un
cheval, 8c qu’en peu de temps l’odeur de l'animal
mort attire ces oifeaux. On en voit paroître
tin grand nombre dar^des endroits ou 1 on crcyo t
à peine qu’ il en exiftât.
Le coroeau paroît également jouir d une grande
(1) Anat. d ifq u if de Audit. & Olfattu , in-fol. pag. 88.
(2) nep< £ 0 « , BÆ A, Kt<p. p . (3) D’autres écrivains, & Pline furtout, ont été encore
plus hardis: ils affirment que les vautours ont l’odorat fi fin,
qu’ils devinent trois jours d’avance vant, & que, pour ne pas manqulae rm loeurtr dp uroni eh,o milsm ea rvriivent
la veille. Ce préjugé date, comme 1 on voit, de bien
loin.
(4) L . C. , B<o. B , f*
(5 ) Voyage aux Indes & à la Chine , tome I I , page 183.
((67)) Vultur indicus, Daudin, Ornithol., tome II, pag. 12. Voyage a u fu d d e U Amérique feptentrionale, tome I ,
^ (8) Recueil d’obfervations de Zoologie b d'Anatoryie comparée
, in-4°.> Paris, 1807 , fafe. 2 , pag. 73.
fagacité d’odorat pour éventer de loin les cadavres
(1) , ce que Linnæus a exprimé avec fa con-
cifion ordinaire (2). Thucydide lui accorde même
l’inftintt d’éviter ceux des animaux morts de la
pefie (3).
Le fait fuivant eft encore propre a donner une
idée de la fuieffe de l’odorat chez les oifeaux.
Lorfque les Indiens, les Nègres & les Américains
font à la recherche de l’ambre gris que la mer a
vomi fur fes bords, les oifeaux , avertis par 1 0-
deur, arrivent en foule pour s’ en repaître, &
fouvent indiquent aux hommes les lieux ou ils
doivent le chercher (4).
Les oifeaux font bien plus fûrement que
l’homme éclairés, par l’odorat dans le choix de
leurs alimens (y) ; leur inftinét, que perfonne ne
dirige, eft admirable fur ce point 5 il ne les trompe
prelque jamais. Il n’y a là rien de bien étonnant ;
car, comme l’obfeive Buffon (6) , l’ odorat étant
le fens de l’appétit, les animaux doivent 1 avoir
plus parfait que l’homme, qui doit plus connoîcre
qu’appéter. * ,
L'organe de l’odorat eft placé à rentrée des
voies aériennes, pour juger, dans beaucoup de
circonftances, des qualités de l’air qui y pénètre,
comme celui du goût l'eft à l’origine des voies
digeftives, parce que les faveurs font une quadte
de l’aliment. Auffi eft-ce par l’odorat qu’on re-
connoït le voifinage de beaucoup de corps nuifi-
bies, qui répandant autour d’eux des émanations
propres à trahir leur préfence. Ce fait trouve
particulièrement fa confirmation chez les oifeaux,
qui poffèdent dans ce fens un puiffant moyen de
confervation. Comme ils font fouvent expofésa devenir
la proie des crotales, furtout du boïpaira,
ils favent reconnoître de loin 1 odeur de ces fer-
pensr, à la terreur dont elle les frappe. ^
En outré, les oifeaux font très-lenfiblés a l’ irn-
preffion des odeurs agréables. Olina (7) confeills
de placer dans une atmofphère chargée^dfes émanations
de la civette ou du mufe les roflignols en
cage que l ’on veut faire chanter j car, dit-il, les
odeurs fuaves ftimulent les oifeaux a chanter, fans
doute en augmentant leur flamme amoureufe.
868. Lene\. Chez les oifeaux, les narines ne
font jamais munies de cartilages mobiles, ni de
mufclesj l’ ouverture en eft Amplement rétrécie
par des productions plus ou moins coafidérables
de la peau qui revêt le bec.
' ((1) Plin., lib. X , cap. i2. * î ; Mirâ fagacitate cadavera fubolfacu licet remotijjma.
(Fauna fuec., n°. 69.)
((34)) HLiijblo. irIeI .d es Aventuriers, &c. ^Pa ris , 1686 , tome I. ,
pag(e5s) 3Vto>7y e&\ m3£oj 8D. ijfe’tation fur les odeurs, fur le fens &. l.es
org(a6n)e s de Volfaltion, in-4°.» Paris * *Si5. Difcours fur les Animaux. (7) Vccelleria, 0 vero difeorfodélia natura di divcrji uccfilli,
&c, Roma, 1622, fig* > )?*&• 5»
Oifeaux. 6 0 9
La figure 8c la pofition de cette ouverture ont
fervi de caractères aux naturaliftes pour la diftinc-
tion des efpèces.
Elle eft latérale dans le plus grand nombre des
oifeaux. . . .
Chez quelques-uns, elle eft placée fur la bafe
du bec : tels font les toucans. *
Dans les hérons, elle confifte en une fente affez
étroite pour admettre à peine une épingle.
Les gallinacés ont les narines çn partie recouvertes
par une plaque chirnue.
Les corbeaux les ont bouchées par un faifeeau
de plumes roides 3c dirigées en avant.
Dans les hirondelles de mer, elles correfpon-
dent à une ouverture du feptum, en forte que l’ on
voit, par elles, au travers du bec.
870. Les mufcles du ne[. Us n’exiftent point chez
les oifeaux.
872. Les finus des foffes nafales. Les fin us des os
du crâne des oifeaux font en communication avec
leurs oreilles & non avec leur nez. Les vides im-
menfes du bec des calaos 8c des toucans , communiquent
à la vérité avec les narines, qui font très-
petites dans ces oifeaux ; mais il paroît que la
membrane pituitaire ferme'cette communication,
fans pénétrer dans ces cavités, qui font traverfées
de toutes parts par des filets offeux.
873. La membrane pituitaire & les cornets des
foffes nafales. La membrane pituitaire des oifeaux
eft très-mince furie cornet fupérieur, plusépaiffe
& veloutée fur le moyen (1 ). Les vaiffeaux forment
à fa furface un très beau réfeau, 8c une
multitude de pores y verfent une abondante mu-
cofité, furtout fur le cornet moyen.
Le côté externe de chaqué foffe nafale eft occupé
par trois ordres de lames faillantes, qui re-
préfentent les cornets des mammifères.
Le cornet inférieur tî'eft qu’ un repli, tenant
d’une part à l’aile du n e z , de l’autre, à lacloifon.
Le cornet moyen eft le plus grand i on en a comparé
la fuure a celle d’ une cucurbite (2) i il adhère
par fon fond à la partie offeufe de la cloifon ,
& il eft formé d’une lame qui fe replie deux fois
& demie fur elle-même.
Le fupérieur eft campaniforme} il adhère à l’os
du front & à l’os unguis, & contient deux loges
qui fe prolongent chacune en un tube creux, dont
1 interne va jufqu’ auprès de l’orbite, & dont l’externe
finie en eul-de-fae derrière le cornet moyen.
( Cuvier. )
Ces trois cornets divifent la foffe nafale en trois
méats.
Iis varient en grandeur & en inflexions fuivant
Jes't-fpèces. r
Dans les gallinacés &: les paffereaux, le moyen
(1) Scarpa, /. c* -,
(2) Idem, ibidem.
Syjit Anat. Tom• I I I .
, ne tourne qu’une fois & demie fur lui-même, 3c
le fupérieur eft extrêmement petit. ( Scarpa.)
Ce dernier croît un peu chez les pies i il eft
beaucoup plus grand dans les oileaux de proie, 8c
bien davantage encore dans les palmipèdes.
Dans les échaflîers, il remplit à lui feul plus
des deux tiers de la cavité nafale, pendant que le
moyen eft très-grêle, contourné une fois & demie
fur lui-même, & que l ’inférieur n’ eft qu’ un pli
prefqu’ infenfible.
Les cornets du nez des oifeaux font généralement
cartilagineux. \
Dans le cafoar 8c l’albatrofe, cependant, ils ne
font que membraneux.
Dans le calao 8c le toucan, ils font offeux (1).
874. Le nerf olfaStif Nous avons déjà fait con-
noître à nos le&eurs la manière dont ce nerf fe
détache du cerveau. ( Voye% n°. 643.) Arrivé à
la racine du n e z , il fe divife d’une manière péni-
celliforme en une multitude de fibrilles, qui fe
répandent dans la membrane pituitaire de la cloifon
8c des cornets fupérieurs. Suivant Scarpa , ils
ne fe prolongent point au-delà, & les cornets
■ moyens 8c inférieurs ne reçoivent leurs nerfs que
de la cinquième paire.
Ces dernières lames ne paroiffent, en confé-
quence, avoir d’autre ufage que celui de rompre
l’air, que ces animaux refpirent en plus grande
quantité que les autres, 8c d’empêcher fa maffe de
nuire, par fon choc , aux cornets fupérieurs.
S e c t i o n d i x i è m e .
875. Le goût en général. Il ne paroît point que
les oifiaax aient une grande fineffe de goût : leur
langue eft en effet prefqu’entièrement cartilagi-
neufè, & la peau qui tapiffe l’ intérieur de leur
bouche eft calleufe & peu" fenfible.
U faut excepter cependant.de cette règle générale
les oifeaux ferriroftres, chez lefquels les nerfs
maxillaires fupérieur 8c inférieur préfentent une
difpofition particulière 8c propre à favorifer l'exercice
de la fenfation du goût (2).
Les perroquets auffi paroiffent favourer leur
h nourriture (3).
S e c t i o n o n z i è m e .
876. Le toucher en général. Le toucher eft foi-
b le , chez les oifeaux , dans toutes les parties qui
font couvertes de plumes ; 8c comme le bec eft
prefque toujours corné 8c peu fenfible, 8c que
les doigts font revêtus d’écailles en deffus, &
d’une peau calleufe en deffous, ce fens doit être
peu efficace dans cette claffe d’animaux.
( 1 ) Cuvier, Z. c. , tom. I I , pag. 647.
((2) Voye\ ci-dejfus, pages 5y2 & 5<)3 , n°*. 6^4 & 679. 3) Duinéril, Traité élément. d’Hifi. nat. Paris, 1807,
in-8°., tome II » page 212.
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