circonstances extérieures les influencent. Aucun ouvrage n’est plus propre â faire
briller ces vérités de tout leur éclat qu un traité d’anatomie comparée. C’est là que,
sans remonter aux causes premières, ces vierges chastes auxquelles il ne faut point
toucher, suivant l’ingénieuse métaphore d’un fameux philosophe, en sien tenant
seulement aux faits, on voit que plus un animal est locomotile, plus aussi il est
sensible, et réciproquement ; que la rèspiration est modifiée singulièrement par
la circulation, au point que là où il n’y a point de circulation, comme chez les
polypes, la peau devient un véritable poumon, et que,.dans les insectes, où la
circulation manque également, l’air va au-devant de l ’humeur qui remplace le
sang. C’est encore là que nous pouvons juger des effets supposés de certaines
circonstances spéciales, et deviner pourquoi les animaux herbivores présentent
un ventre très-volumineux, tandis que les carnivores ont l’abdomen très-resserré;
pourquoi les oiseaux et l'es poissons offrent dans l ’organisation de leurs
yeux des différences accommodées à la naturé du milieu dans lequel ils vivent
habituellement, etc. etc. etc.
C est aussi en outre cette espèced anatomie qu’on peut faire concourir avec le plus
d’avantage à la solution des problèmes physiologiques ; car les différences qu’elle
nous fait connoître entre lès animaux, sont aussi utiles à cet égard que le sont,
sous un autre point de vue, lès ébauchés des cristaux pour révéler le mécanisme
de leur formation au sein de la terre, et la marche que suit la nature dans son
travail.
Voilà surtout ce que nous avons voulu que le lecteur pût trouver ici sans peine
et, pour ainsi dire, du premier coup ; aussi nous espérons qu’il nous pardonnera
facilement les légères modifications que nous avons fait subir au plan
tracé par notre prédécesseur, puisqu’elles n’ont pour but que la facilité dés
recherches et le rapprochement des faits analogues et de leurs résultats.
Or, c’étoit là effectivement aussi le but où tendoit le célèbre anatomiste auquel
nous succédons; depuis long-temps, à l’époque où il écrivit, on parloit
d anatomie comparée, sans qu’il existât un seul ouvrage où cette partie importante
des sciences naturelles fut traitée. Toutes les descriptions du corps de
1 homme et des animaux étoient éparses. Aucun auteur n’avoit embrassé l ’ensemble
de ce travail : il voulut faire, s’il est permis de s'exprimer ainsi, l ’inventaire
des connoissances humaines dans cette branche de la philosophie, et mettre,
comme il 1 a dit lui-meme, chacun à portée de voir ce qui est fait et ce qui
reste à faire encore. C’est pour y parvenir qu’il a divisé en neuf fonctions tout
ce qui a rapport à l’anatomie, qu’il a partagé chaque fonction en sections, et
celles-ci eh articles, dont toutes les parties sont'.désignées pâr des numéros, et
qu’i l avoit formé le projet d’appliquer cette division â toutes les classes d’animaux
et à tous les individus dont les anatomistes avoient publié des descriptions.
Ainsi, par exemple, le numéro qui de voit indiquer la cornée de l ’oeil de
l ’homme, auroit désigné également celle de l ’oeil des mammifères, des oiseaux,
’ des reptiles, des poissons, et auroit manqué dans la description des animaux
qui sont privés de cornée; et c’étoit afin d’empêcher Ce grand système anatomique
de perdre toute sa valeur, en détruisant son ensemble, qu’il imagina de
substituer l ’ordre analytique à celui de l ’alphabet.
Nous avons déjà indiqué'quelques-uns des changemens opérés par nous dans la
. marche suivie par Vicq-d’ Azyr : mais il étoit d’autres modifications encore plus indispensables;
elles concernent la méthode employée dans laclassification des animaux;
il devenoit impossible d’adopter celle à laquelle il avoit commencé de
s’astreindre ; elle auroit entraîné à des redites et à des longueurs sans fin ; j’ai
: préféré m’accommoder à la distribution actuelle des animaux en famillesnaturelles,
î en mettant en tête le genre le plus connu, et dans celui-ci, l’espèce la mieux
p étudié^, comme des types primitifs auxquels on peut comparer les genres et les
[ espèces suivantes. De cette manière, point de répétitions inutiles ; toutes les comparaisons
sont faciles à exécuter; et d’ailleurs des résumés placés à la fin de
| chaque grande classe, présentent, pour chaque famille, les faits les plus intéressant,
groupés par ordre d’affinité et mis én opposition les uns avec les autres.
Or, cette méthode ici adoptée est celle qu’admettent les plus célèbres zoologistes
de notre temps; elle est purement anatomique, ou à peu près; elle prend
pour point de départ les fonctions les plus influentes dans les animaux, les
[ sensations et la locomotion, lesquelles non-seulement font de l’être organisé un
animal, mais encore établissent en quelque façon le degré de son animalité,
parce qu’elles entraînent un plus grand nombre de changemens dans les formes
et dans les moeurs.
Nous distinguerons donc d’abord les animaux en deux grandes séries, les
animaux vertébrés et les animaux invertébrés.
Dans les premiers, les organes passifs de la locomotion sont logés sous les
parties molles, ils sont enveloppés par elles; le cerveau et le tronc principal du
, système nerveux sont renfermés dans une enveloppe osseuse, qui se compose du
crâne et des vertèbres, sur les côtés desquelles s’attachent les côtes et les os des
membres qui forment la charpente du corps.
Tous ces animaux ont le sang rouge et un coeur musculeux, une bouche à
deux mâchoires horizontales; des organes distincts de la vue, de l’ouïe, de
l ’odorat et du goût, placés dans des cavités de la face ; des sexes séparés, et quatre
membres au plus. :
Mais ces animaux qui se ressemblent beaucoup entr-’eu x , offrent cependant
quatre grandes subdivisions, caractérisées par la nature de leurs mouvemens ,
et surtout par la manière dont s’effectuent et leur respiration et leur circulation.
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