
S e c t i o n s e p t i è m e .
784. La vue en général. Elle paroîc fort bonne.
Le cryltallin des baleines, en effet, prefque
fpherique, très-denfe, imprégné d'huile, préfente
un degré de courbure, de denfité & de combuf-
tibilité, ou, en un feulmot, un degré de force
réfringente très-propre à compenfer le défaut de .
réfraction que pioduit la denfité de l'eau.
La grande courbure de ce corps eft une caufe
aéîive de réfraction, car aucun phyficien n’ ignore
que plus les rayons lumineux tombent obliquement
fur la face d'un corps diaphane , & plus, en
le traversant, ils font détournés de leur direction
primitive.
Perfonne n’ignore non plus que cette réfraCtion
eft proportionnelle à la denfîté du corps diaphane.
Enfin, Newton nous a appris qu'elle eft d'autant
plus grande que la fubftance traverfée parles
rayons de lumière renferme plus de principes com-
buftibles.
Les baleines pofledent donc un inftrument d’optique
adapté au fluide dans lequel elles vivent,
puifque la denfité de l’eau eft bien fupérieure à
celle de i’air, & que la réfraCtion des rayons lumineux
eft d’autant plus foible, que la denfité du
fluide qu'ils tra.vérfent eft moins différente de
celle du corps diaphane qui doit les réfraCter. Les
faifeeaux de rayons lumineux ne feroient donc
point raffemblés au degré convenable, & il n’ y
. auroit point de vifion diftir.Cte, fi cette caufe
d’une grande foible (Te dans la réfraCtion n’étoit
contre-balancée par les trr-is eau es puilTantes &
contraires qui viennent d’étre indiquées.
. 785. Les yeux en général. Ils font. placés tout
près de la commiffure dés lèvres, un peu au-def-
fus de l'articulation des mâchoires. Ils occupent
les extrémités de l'axe tranfverfal du crâne , & font
portés en arrière, à côté du méat auditif.
Le prolongement tranfverfal des apophyfes de
l’os frontal, formant le plafond des orbites, détermine
ce grand écartement des yeux, qui donnent
aux cétacés h faculté d'apercevoir les objets
placés en avant & en arrière du corps.
Les yeux font très- petits relativement au volume
dé la rête. Quelques auteurs en comparent
la grandeur à ceux.d’ un boeuf ordinaire 5 d’autres
les affimilent à ceux d'un phoque de la plus
grande efpèce, mais perfonne n'a indiqué les di-
menfions pofitives de ces organes. M. de Lacé-
pède cependant dit que leur diamètre n’égale
fouvent que la cent quatre-vingt-douzième partie
de la longueur totale. Mais tout petits qu’ils font
relativement, leur volume égale encore celui
d'une orange de moyenne groflëur (1).
786. Les paupières en général. Elles font au nombre
de deux, comme dans l’homme, mais elles
font tellement gonflées par la graille huMeute qui
en occupe l’intérieur, qu’elles font prefqu’immo-
biles. ( Lacépede, Cuvier. )
, 794. Za paupière inférieure. Elle dépafie d’une
manière très-marquée le niveau de la fupérie«Jre,
ce qui doit donner à l’animal la faculté* * de diftin-
guer les objets qui fe trouvent au-deffus de lui.
( Camper.)
796, Les cils. Ils manquent. (Cuvier,Lacépede.) .
799. La membrane ny élit ante. Il n’y en a àucun
veltige comme dans les autres cétacés. ( Cuvier.')
800. La glande lacrymale. Elle manque. L’on
trouve feulement fous la paupière des fortes de
lacunes d’où s'écoule une humeur épaifle & mu-
cilagineufe. ( Cuvier, Lacépede.)
802. Les conduits lacrymaux. Ils manquent egalement.
803. Le fac lacrymal. Il n’exifte point non plus.
806. Les mufcies droits de l'oeil. Ils font au nombre
de quatre comme dans l'homme.
8:0. Le muscle fufpenftur de l'oeil, ou ckoanoide.
Il eft divifé en quatre portions, ce qui, au premier
abord, pourroit faire croire qu’il y a huit mufcies
droits de l’oe il, comme cela, au refte^ a lieu
pour plufieurs carnafliers.
811 & 8 i 2. Les mufcies obliques de l ’oeil. Ils font,
au nombre de deux, l’un fupérieur , l’autre inférieur.
813. Le globe de l’oeil, fa forme. Il y a plus d’un
fiècle que Leeuwenhoëck a donné les dimen*
fions d’un oeil de baleine, dont les axes étoient
dans la proportion de 2,5 à 2,7 de pouce (1),
On a reconnu depuis que cet oei l , confidéré dans
ion enfemble, eft aifez aplati par-devant pour que
fon axe longitudinal ne foit quelquefois à fon axe
tranfverfe que : : 6 : 1 1 , les mefures étant prifes
en dedans. ( Lacépede , Cuvier.)
Le globe de l’oeil ri’eft , du refte , féparé de la
foffe temporale que par des ligamens tendineux i
fa partie inférieure n’eft foutenue que par les mufcies
des lèvres & par la couche de graiffe qui les
enveloppe} la difpofition bizarre 'de-Tapophÿfe
zygomatique du temporal & de l’os de la pommette
empêche que ces os lui offrent un appui.
814. La cornée tranfparente. Cette membrane
paro'it compofée de feize à dix-huit lames fu-
perpofées. ( Leeuwenhoëck.)
Elle eft plus aplatie antérieurement que dans
les mammifères cerreftres. (Cuvier.)
815. La fclèrotique. Elle eft très-épaifle &
(i) Fred. Ruyfch, Thef. Anat. I I , pag. 3,'n°. 1.
(1) Voytj dans le Recueil des ouvrages de Leeuwenhoëck,
publiés en hollandais, corne IV, une lettre adreffee au
bourguemaître Mecrmaun, ij i3.
d’une dureté extrême. Leeuwenhoëck ( 1 ) &
Camper ont remarqué qu’elle fe laiflè difficilement
entamer par le fcalpel.
La dureté de la fclèrotique n’e-ft pas la même
dans toute l’étendue de cette membrane } les
parties latérales font beaucoup plus confiftanies
que les poftérieures, & cependant leur épaiffeur
eft loin d’être la même.
La fclèrotique en effet a environ dix-huit lignes
d'épaiffeur dans fon fond & feulement un
pouce fur fes côtés. (Cuvier.)
En coupant cette membrane, on reconnoît
qu’elle eft formée de fibres qui ont l’apparence
tendineufe, & qui interceptent des mailles remplies
d’une autre fubftance, comme fongueufe,
plus brune & plus flexible que ces fibres.
La partie poftérieure eft beaucoup plus molle ,
parce que les mailles y font plus grandes & en
partie remplies d'une fubftance huileufe. (Cuv.)
Les deux pçrtions, la molle & la dure, font fé-
parées d’ une manière tranchée, & l’ une ne pafle
point par degrés à la nature de l’autre. ( Idem. )
Peut-être que l'épaifieur & la folidité de la
membrane dont nous parlons compenfent le défaut
des tables ofl’eufes dans la compofirion des
parois des orbites. ( Camper.) Dans tous les c a s ,
on peut fe faire une idée de fa force, fi l’on fe
rappelle que, dans une baleine échouée fur les
côtes de Danemarck en 1672, cette membrane
pefoit, au rapport de Thomas Bartholin # quinze
onces & un gros (2).
On voit auffi très-bien dans la baleine franche
la manière dont la fclèrotique fe réunit à la cornée.
Au lieu d’être Amplement àttachés par du
tiflu cellulaire, les bords des deux membranes fe
pénètrent réciproquement. Les fibres delà feléro- :
tique s’engagent dans l’épaifleur de la cornée,;
fous la forme de lignes blanches très-déliées, mais
affez longues & bien vifibles. Nous avons indiqué
une difpofition analogue dans l’oeil du rhinocér0?
( i ) ‘ , . ,
La coupe de la feparation de ces deux membranes
eft droite. ( Cuvier. )
La bafe de la fclèrotique eft criblée d’une infinité
de pores pour le paifage des vaiffeaux qui
accompagnent le nerf optique. ( Camper. ) . :
816. La choroïde. Elle eft de couleur cendrée;
( Camper) , ou noirâtre. (Fréd. Ruyfch. )
On diitingue fort bien la membrane ruyfchienne
qui la.tapifle intérieurement, & qui préfente un
tiflu plus fin, plus ferré & plus homogène quelle.;
Sa teinte d’ ailleurs eft blanchâtre. (Fréd. Ruyfck.)'
820. Les procès ciliaires. Leurs bords libres font
(1) A. Van Leeuwenhoëck Sendbrieven aen de Koningl,
Sociëteit te London, &c. 3 IV, pag. 38.
(a)Thomoe Bartholini A 61 a me die a & philofophica Haf-
nienjia, 16^3 , vol. II, pag. 68.
• (3) fToycj page ssoj) de ce volume*
dentelés & garnis, pour ainfi dire, d'une véritable
frange. (Cuvier.)
821. L ’iris. Cet-te membrane eft blanche (Camper')
, ou noire. ( Leeu-wenhoëch.) On aperçoit très-
diftinétement dans fon tiffu des fibres circulaires
qui enrourent la pupille. (Fréd. Ruyfch.)
822. La pupille. Elle eft tranfverfalement oblon-
gue (Leeuwenhoëck 9 Çamper, Cuvier)\ fes axes
varient d’un demi-pouce à un pouce ( Leeuwen-
huëck)f ce qui donne le diamètre de l'ouverture
double dans le fens horizontal.
823. Le nerf optique. Il parcourt la portion poftérieure
de la fclèrotique dans un canal d’ un
pouce & demi de longueur, dont les parois font
formées par la dure-mère , & fourniflfent fucceffi-
vement de leur face externe les fibres blanches
qui font la bafe de la fclèrotique, & qui, par
conféquent, ne femblent être qü’ un épanouifiè'-
ment de la méninge.
Ce dernier fait n’ eft pas fans quelqu’impor-
tance ; il pourra fervir à décider la queftion non
encore réfolue de favoir fi la fclèrotique eft ou
non une continuation de la dure-mère.
827. Le cryftallin. Au lieu d’être lenticulaire,
il eft prefque fphéroïdal.
Son axe eft en effet à fon diamètre tranfverfal
: : 13 : iÿ ( Cuvier) , ou : : iy : 17. ( Leeuwen-
hoëck. )
Il paroît formé d’une infinité de lames qui s’emboîtent
les unes dans les autres, & font d’autant
plus difficiles à féparer qu’ on fe rapproche davantage
du centre. Ces lames femblent elles-mêmes
compofées de fibres rayonnantes, extrêmement
fines,-qui viennent de deux centres fitués aux
deux extrémités de l’axe, comme les méridiens
viennent des deux pôles fur les globes géographiques.
S e c t i o n h u i t i è m e .
832. L'ouïe en général. Elle eft très-fine, & les
baleines entendent à de grandes diftahees des fions
ou des bruits même aflez foibles. C ’eft, au refte,
par le moyen de l ’eau que les vibrations fionores
parviennent à leur organe acouftique, car, dans
îe temps même où ces animaux nagent à la furface
de l'Océan , leurs orei les font prefque toujouis
plongées à fix ou huit pieds au-deflous du niveau
de la mer.
$3'3. L'oreille externe en général. Cette portion
de l'organe de l'audition manque totalement dans
la baleine.
838. Le conduit auditif externe, fa direction.
L’ entrée de ce conduit fe trouve très-près de
l’oe il, & prefque dans une même ligne. Il eft d ifficile
de l’apercevoir dans les jeunes fuiets, à moins
r d'enlever la peau j mais, dans les grandes baleines.,