nommé phyfait par M. Lacépède, 8c dont, nous
aurons occafion de parler bientôt d'une manière
Ipéciale.
Difons aufli qu'il ne paroît point qu’il exifte aucune
différence réelle entre cet animal & celui de
Robertfon ( i) , dont Bonnaterre a fait une efpèce
fous le nom de trumpo, qui, aux Bermudes, s’applique
à un cachalot, fans détermination plus précife.
Le cachalot macrocéphale eft encore un des
géans de la mer. C e coloffe, rival de la baleine
franche, a reçu des armes que la nature n’a point
départies à ceile-ci. Audi n’ eft-il point pacifique,
comme elle} il exerce lur les ondes un empire
redouté. Il lui faut des victimes, capables de lui
réfifter dans le combat auquel il les provoque.
Cette efpèce de cétacé eft répandue d ms beaucoup
de mers 5 elle n’cft même pas étrangère à la
Méditerranée. Il ne paroît point cependant que les
Anciens en aient eu une idée bien nette, ainfi que
l ’a fait remarquer le favant profeffeur Schneider
dans fon excellent ouvrage fur la lynonymie des
cétacés & des poiffons, décrits par Artédi. Au
refte, on rencontre habituellement les cachalots
macrocéphaîes dans les parages du Spitzberg} auprès
du cap Nord & des côtes de Finmarckj dans
les mers du Groenland, dans le détroit de Davis ;
dans la plus grande partie de l’Océan atlantique
feptentrional} dans le golfe britannique, auprès
de l’embouchure de .-££lbe, dans lequel un de
cés animaux, battu par une violente tempête,
vint échouer & périr au mois de décembre 17205
on en a vu également non loin de Bayonne, vers
le Cap de Bonne-Efpérance, dans le canal de Mozambique
, près de Madagafcar & de l’île de
France, fur les rivages occidentaux de la Nouvelle
Hollande, fur ceux delà Nouvelle-Zélande,
dans le golfe de la Californie , à peu de diftance
de Guatimala, autour des îles Gallapagos, dans
les eaux du Bréfil, & enfin dans celles qui baignent
notre Finiftère.
Beaucoup de naturaiiftes peuvent encore fe le
rappeler : en 1784, trente- leux cachalots macro-
céphales échouèrent fur la côte occidentale d’Au-
dierne, fur la grève de Très-Couaren. Une multitude
de poiffons & un grand nombre de mar- ■
fouins épouvantés les précédoient, 8c, dès la veille, \
fe jetèrent à la cô te , à la grande furprife des ha- ’
birans. Leur arrivée fu t, en outre, annoncée par
des mugiffemens extraordinaires, qui , partant du
cap Eftain, retentiffoient dans les terres à plus !
d’ une lieue de diftance. Ce fut en vain qu’ils luttèrent
long-temps^ contre les flots} après des efforts
inutiles, ils furent fucceffivement mis à fec
fur le fable. Ils étoient encore jeunes, & cepend
a n t les moins grands avoient déjà trente-fix pieds
d e longueur (2).
(î') Vhilofoph. Tranjail. , vol. LX.
\p) Lettre de M. Lecoz , inférée dans le Mercure de
JFrance , 1784.
La tête du cachalot macrocéphale eft, fans contredit,
la plus volumineufe de toutes celles que
l ’on connoît. Sa longueur furpaffe prefque toujours
le tiers de la longueur totale du cétacé.
Elle reffemble à une groffe maffe tronquée par-
devant, prefque cubique, & terminée, par con-
féquent, à l’extrémité du mufeau par une furface
très-étendue, prefque carrée & prefque verti-
! cale. C ’eft dans la furface inférieure de ce cube
immenfe, mais imparfait, que l’on voit l'ouverture
de la bouche.
La nuque eft indiquée par une légère dépreflion
qui s’étend de chaque côté jufqu’à la nageoire
peCtorale.
Vers les deux tiers de la longueur du dos, s’élève
infenfiblement une forte de cailolué longitudinale,
qui fembî.e tronquée par-derrière, & qui
a la figure d’ un triangle reétmgle très-alongé.
Le ventre eft gros & arrondi.
La queue , dont la longueur eft fouvent inférieure
à celle de la tête, eft conique, d’un très-
petit diamètre vers la nageoire caudale, & par
conféquent très-mobile.
La nageoire de la queue fe divife en deux lobes
falciformes. Le bout d’ un de ces lobes eft fou-
vent éloigné de l’extrémité de l’autre de quinze
pieds environ.
Ce cachalot parvient à la taille de foixante-
dix pieds 5 fa circonférence, à l’endroit le plus
gros de fon corps, eft alors au moins de cinquante
pieds} fa plus grande hauteur eft même quelquefois
fupérieure, ou du moins égale au tiers de fa
longueur totale.
Quant au cachalot trumpo, i! a une tête énorme
8c plus longue que le corps lui-même, quoique
ce cétacé parvienne au(ïi à la taille .de ioixante
pieds, comme le macrocéphale. Mais, nous le
répétons, on n’a pas encore de notions bien précises
fur les caractères de cet animal, qui n’eft
peut-être qu’ une variété de l’autre.
On le trouve, du refte, dans la mer qui baigne
la Nouvelle-Angleterre &auprès des Bermudes 5
mais on l’a vu aufli dans les mers du Groenland,
dans le golfe britannique & dans celui de Gaf-
cogne. .
En 17 4 1, un trumpo mâle échoua près de la
barre de Bayonne & de l’embouchure de l’Adour.
Il avoir quarante-huit pieds de longueur totale}
fa circonférence, à l’endroit le plus gros du
corps, étoit de vingt-fept pieds} le diamètre de
l’orifice des évents, d’un pied 5 la diftance de l’extrémité
de la nageoire de la queue à l’anus, de
quinze pieds, la longueur de l'anus d’ un pied, &
fa largeur de fix pouces} la longueur de la verge
de quatre pieds, 8c la hauteur de la boffe du dos
d’un pied.
L’anatomie des cachalots n’eft pas plus avancée
que celle des baleines. On ne trouve que fort peu
d’écîairciffemens fur leur compte dans les natura-
liftes, & les voyageurs ne nous ont tranfmis qu’un
fort petit nombre de détails ƒ même les capitaines
ColnettCO & Baudin (2 ), quoique l'expédition
du premier fût dirigée fpécialement pour la pêche
de ces animaux, 8c que celle du fécond poffédât
le favant & zélé Péron.
Cependant, nous avons pu profiter des travaux
qu’ont publiés fur les cachalots Anderfon (3) , Lé-
clufe (4), Johnfton (y), Robertfon (6), La Peyronie
(7), Lacépède (8), Cuvier (9) & Camper (10).
Nous avons aufli examiné avec beaucoup de foin
un immenfe fquelette de cachalot acheté en Angleterre
dernièrement, & confervé depuis peu de
temps feulement au Jardin des plantes de Paris.
Il nous a été d’un bien grand fecours pour la def-
çriptîon que nous allons donner.
F O N C T I O N P R E M I È R E .
L a l o c o m o t i orr.
S e c t i o n p r e m i è r e .
SqueLettologie.
t. Les os en général. Leur tiffu paroît plus compacte
dans le cachalot que dans la baleine. CCamper.)
Cependant on y remarque une multitude de
cellules alvéolaires qui en diminuent fïngulière-
ment le poids.
3. Les os de la tète en général. Cë que nous
avons dit de la groffeur énorme de la tête du
cachalot ne doit pas s’appliquer rigeureufement à
la defeription du fquelette de cet animal. Il fe-
roit en effet contraire aux lois de l’équilibre que
cette tête fît la moitié ou le tiers de la longueur
totale, car le centre de gravité tomberoit en
•avant, fk d’ailleurs les .mufcles locomoteurs au-
roient trop peu de moyens d’attache fur la colonne
rachidienne ainfi raccourcie.
Pour fe convaincre de cette vérité, il fuffit de
jeter les yeux fur le fquelette dont nous parlions
tout-àVl’heure.
Cette opinion paroît, au refte, avoir été fondée
fur des apparences trompeufes, c’eft-à-dire,
fur des mefures prifes avant que les' cachalots
euffent été dépouillés. Au fujet des . phy Ce tares,
nous dirons comment Camper a fait une obferva-
tion analogue à celle que nous préfentons i c i ,
(1) Voyage to the South Atlantic , &c. London, 1798.
(i) Voyage de découvertes aux Terres aufirales, 1807,
(0); Defeription de 1‘ Iflande & du Groenland.
(4) Exoùcorum, lib. X, pag. i3o , & lib. VI , cap. 16»
(5) Hift. nat. dé Pifcib. , lib. V, pag. i 5a, tab. 42.
(6) TranfaSl. philof. , vol. LX.
(7) Mémoires de l’Académie royale des feienees , pour l’année1741.•
(8) Uifi. nat. des Cétacés.
(9) ' Leçons d’anatomie comparée.
(1 o) Obfervations anatomiques fur le fquelette 6* la ftruHure
ùuédeure 4eplufuurs efpecvs de cétacés, 6*ç, Pariÿ, 1820.
fur un crâne confervé dans le coeur de l’églife de
Schevelinge, proche la Haye.
La tête des cachalots préfente des formes plus
bizarres encore que celles de la baleine. Les yeux
les plus exercés à découvrir les rapports oftéoio-
giques ne font plus ici que des guides mal allurés.
L’ordre des polirions eft totalement interverti,
& cette énorme maflfe, évafée dans fa partie pof-
térieure, reffemble bien plutôt au fiége d’ un cabriolet
ou à une forte de char antique, qu’ à la
tête d’un mammifère.
Rien en effet ne paroît retracer ici l’image
d’une boîte deftinée à ‘renfermer le cerveau} on
cherche en vain les analogues des orbites ou des
os de la face. Où dévoient être placés les y eu x>
où eft l’analogue du nez? C ’eft ce qu’au premier
abord il eft bien difficile de déterminer.
4. Les os du crâne en général. Loin de préfenter
quelques traits de conformité avec le crâne de
l'homme, au lieu de fe diftinguer par fon élévation,
par fa rondeur, par des futures ctoifées
fous différens angles , le crâne du cachalot femble
remplacé par une profonde excavation. Le frontal
, les pariétaux, l’occipital, s’élevant perpendiculairement
en forme de théâtre, établi fient, à
la partie fupérieure de la tête, une vafte concavité,
ouverte 8c prolongée en devant jufqu’ au
bout du mufeau.
Une conformation iufii étrange a induit en
erreur plufîeurs auteurs, entr’autres le célèbre
Bloch ( 1 ) , qui ont cru que l’ouverture de cette
concavité étoit caufée par la mutilation du crâne.
Mais il fuffit, comme le confeille Camper, de
confidérer la tête dans fa partie poftérieure, 8c
d’enfoncer la main dans le trou occipital, pour fe
convainci e qu’ il n’exiftè aucune communication
entre la cavité cérébrale 8c cette vafte foffe extérieure.
On verra de plus, en même temps, que ce font
les tables extérieures de l’os frontal 8c de L'occipital,
qui, en s'appliquant l ’une contre l’autre par
des futures fquameufes , s’ élèvent à des hauteurs
prodigieufes, tandis que les tables internes, Cous
la forme d’ une calotte, défendent l’encéphale.
Quant à la cavité encéphalique proprement
'dite, elle eft fort petite, & fon peu d'étendue,
comparé au développement de la face, fembleroit
indiquer que les fens de la guftation 8c de l’olfaction
font très-parfaits, fi l’on ne réfléchiffoir pas
au peu de volume des ganglions & des nerfs olfactifs
, chez ceux des cétacés au moins qui pré-
fenteqtdes rudimens de ces organes.
Elle ne préfente point d’apophÿfes clinoïdes.
Cette foffe fus-crâniène dont il vient d erre
queftion eft remplie d’une fubftance graffe particulière
dont nous parlerons plus tard ( i ) , 8c à
(t) Hifioire naturelle des, Poijfo.is, clafTée par ordre, par
R. R. Cartel.
(2) Voye\ n*>. 1129.-
M m m 2