
nous ont représentés comme des gens doux, sobres
et paisibles, mais semblables aux bêtes sauvages ,
par le soin qu’ils avoient d’éviter la compagnie des
autres hommes.
Les Chinois sont intéressés et enclins h tromper
; j’ai vu des paysans faire avaler du sable à des
poules, pour qu’elles pesassent davantage. Pendant
notre voyage, les Chinois garnissaient de papier
l’intérieur des pièces de soie qu’on nous donnoit,
pour les faire paroître plus épaisses ; et k Peking,
les mandarins donnèrent k M. Vanbraam , du faux
Gin-seng pour du vrai. Les Chinois se font une
telle habitude de la fraude , qu’ils ne croient pas
faire mal; c’est adresse suivant èux. Ils aiment le
jeu et la débauche ; et sous un extérieur grave et
décent, ils savent mieux que personne cacher leurs
vices et leurs penchans déréglés : la preuve est
qu’on trouve chez eux des gens qui composent des
pièces dont le sens, k la simple lecture , n’exprime
que de la morale, tandis que le son des mêmes
mots signifie des choses obscènes. Humbles dans
leurs discours, minutieux dans leurs écrits, polis
sans sincérité , ils masquent sous un dehors froid
un caractère vindicatif; ils ne s’aiment pas même
entre eux, et cherchent k se nuire. Cruels lorsqu’ils
sont les plus forts, et lâches dans le danger, ils sont
attachés k la vie : il en est cependant quelquefois
qui se donnent la mort ; mais le suicide est plus
SUR LES CHINOIS.
commun parmi les femmes que parmi les hommes s
chez« elles , c’est l'effet de la jalousie et de la ço-
lere, ou Ienvie de susciter k leurs maris quelques
mauvaises affaires.
Ce n’est pas que, dans un aussi vaste empire,
il ne se trouve des gens doux , honnêtes et désintéressés
, mais il y en a moins qu’ailleurs. La
forme du gouvernement s’y oppose : obligés de
vivre dans une crainte continuelle, sans cesse
occupés k cacher leur bien , toujours forcés de
tromper, comment une pareille contrainte n’é-
touffèroit-elle pas chez eux les germes d’un heureux
caractère ! Je rendrai cependant justice aux
Chinois , sur leur respect pour leurs parens et les
vieillards ; ce respect est même si grand , qu’il se
transmet du père qui vient de mourir, au fils aîné,
que les frères regardent alors comme le père et
le chef de la maison.
Ifs sont aussi très-respectueux pour les morts ;
mais il seroit k desirer qu’ils eussent en même temps
plus d’humanité pour les vivans. Lorsque des soldats
poursuivent une personne mandée par un
magistrat, ils emploient toutes sortes de moyens
pour s’en saisir, et la maltraitent quelquefois très-
rudement, sans s’inquiéter si elle est innocente ou
coupable. Un jour qu’ils avoient arrêté des voleurs
, se trouvant dépourvus de cordes pour les attacher,
ils leur percèrent les main,s avec un bambou,
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