dans le dessein de ieur procurer une sépulture et
d’en éviter les frais : c’est aussi pour cela que des
charrettes parcourent tous les matins les rues de
Peking, et ramassent tous les enfkns exposés.
Ceux qui sont vivans sont placés dans une maison
ou ils sont eleves, et ceux qui ont été trouvés
morts sont portes hors de la capitale , dans un.
endroit où ils sont enterrés.
J ai traverse la Chine dans toute sa longueur ,
en voyageant par eau, je n’ai jamais vu un enfant
noyé : dans ma route par terre, j’ai passé de grand
matin dans les villes et dans les villages, j’ai été à
des heures différentes sur les chemins, et je n’ai
jamais aperçu un enfant exposé ou mort.
Dans notre dernière journée , avant d’arriver au
fleuve jaune [Hoang-ho], un des cochers conduisant
les effets d’un de nos mandarins , écrasa
un enfant; il fut arrêté sur le champ : ce n etoitpas
cependant sa faute , car fui et ses camarades, en
entrant dans les villages , crioient aux habitans de
faire place; mais leur curiosité étoit si grande,
qu’ils se portoient jusque sur les roues des voitures
pour nous regarder.
Si les Chinois étoient si indifférens sur le sort
de leurs enfans ; si la police ne veiiloit pas k leuf
conservation, pourquoi auroit-on arrêté ce cocher 5
XL ne fkut donc pas croire à ces expositions , à ces
infanticides qu’on représente si nombreux : il en
existe
SUR LES C H IN O IS ; 2 $ ^ '
existe certainement, mais les crimes existent par-
tout.
Je dois attester que les Chinois vaiment tendre-
ment leurs enfans ; les femmes qui vivent à Quan-*
ton sur la rivière , dans la crainte qu’il ne leur
arrive quelque accident, leur passent autour du
corps une corde quf leur permet de jouer dans le
bateau, mais non d’en sortir. Quant à ce que l’on
dit qu’elles attachent une calebasse sur le dos des
enfans pour les faire flotter plus long-temps, afin
de donner le temps à quelque personne charitable
de leur sauver la vie, elles ne le font que pour avoir
elles-mêmes le moyen de les secourir dans le cas où
ils tomberoient k la rivière. J’ai été témoin d’un
pareil accident ; la mère , loin d’abandonner son
fils k son malheureux sort, ne fut tranquille que
lorsqu’elle le revit dans ses bras.
D’ailleurs, les femmes des bateaux ont en général
l’attention de porter leurs enfkns sur leur
dos : tous ces soins prouvent que le cri de la nature
se fait entendre p^r-tout ; et, je le répète, si l’exposition
des enfans a quelquefois lieu k la Chine,
on ne doit l’attribuer qu’k des circonstances impérieuses
dont on a des exemples dans tous les pays.
Ajoutons une dernière réflexion. On a supposé
que la pluralité des femmes produisoit une surcharge
dans les familles, dont les Chinois se déli-
vroient par l’exposition ; c’est une erreur : tous
TOME II. T