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ceux qui connoissent les moeurs des Asiatiques #
savent que la population , bien loin d’être chez
eux en raison du nombre de femmes' que chacun
peut avoir, est au contraire bien moindre relativement
, que chez les Européens : c’est ce que j’ai
moi-même observé à la Chine. Mais, quand il se-
roit vrai que la polygamie fût favorable k la population
, comme elle n’existe de fait que parmi les
grands, les mandarins et les riches, leur fortune
les met k l’abri de songer k se défaire de leurs
enfans : voilk donc une classe dans laquelle on
peut assurer que l’exposition n’a pas lieu.
Chez les habitans des campagnes, les enfans
sont utiles ; ils sont même une richesse y et les
maladies n’en enlèvent que trop : l’exposition seroit
donc contraire k leurs intérêts.
Dans les villes, l’industrie fournit plus de ressources
; il y a plus de gens k l’aise ; les pauvres
trouvent plus de secours : il n’y a donc qu’un petit
nombre de familles chez lesquelles l’exposition
pourroit être en usage.
D’après tout ce que je viens de dire , je ne nierai
pas absolument qu’elle ait lieu k la Chine ; mais je
conclurai qu’elle n’y est pas plus commune que
dans les autres parties du globe , où l’on n’en a
des exemples que dans des cas particuliers et heureusement
rares.
A D O P T I O N .
U ne des raisons qui empêchent encore, ou du
inoins qui diminuent l’exposition, c’est l’adoption ;
elle est fréquente chez les Chinois. Ilsdesirent aved
tant d’ardeur de laisser après eux des enfans pour
honorer leurs cendres, qu’k défaut d’ënfans naturels
ils en adoptent d’étrangers. II faut lès avoir étudiés
et connoître k fond leurs préjugés, pour comprendre
jusqu’k quel point ils se croient malheu-
reux si en mourant ils’ $ft la crainte d’être privés
de sépulture, et s’ils n’emportent l’espérance qu’une
personne k qui ils seront chers viendra tous les ans
réparer leur tombeau, et y faire dès prières ou des
offrandes. C ’est peut-être cette pensée et non un
sentiment de bienfaisance > qui est le principe de
l’adoption chez les Chinois ; mais ce préjugé est
heureusement établi, et il faut en bénir l’auteur *
puisqu’il a su le faire tourner au profit de l’humanité
, et intéresser, pour ainsi dire, la mort mêmé
k la conservation des vivans.
Les Chinois adoptent indifféremment le fils d’un
parent, d’un voisin , ou des enfans abandonnés
pris dans les hôpitaux ; mais les Tartares n’adoptent
point de Chinois ; ils ne peuvent adopter qu’un
de leurs parens, e t, k défaut de parens, un Tartare
quelconque. Du moment de l’adoption , un enfant
11 est plus rien pour la famille de son véritable
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