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froidement la nécessité de faire périr un grand
nombre d’individus pour faire renaître le calme :
en un mot, les Chinois sont conduits sévèrement,
et s’iis ne se plaignent pas toujours, c’est qu’ils
n’y gagneroient rien.
Les marchands sont méprisés ; les mandarins de
Quanton traitent avec dureté les hannistes (a) , et
ceux-ci paient pour ne pas être forcés de ramper.
Si des gens riches sont aussi mai regardés, il est
facile de conclure le traitement que peut attendre
un homme du peuple qui est pauvre et sans appui.
Les Tartares, en s’emparant de la Chine, n’ont
rien changé à la forme du gouvernement ; ils ont
seulement partagé l’autorité en doublant les places,
dont ils se sont réservé ia moitié : aussi remplissent
iis tous les grands emplois militaires et une
partie des offices civils. Ils sont généralement haïs
des anciens habitans , et les empereurs actuels,
quoique Tartares , déférant à ce sentiment national
, traitent les mandarins Chinois avec bien
plus de ménagement et d’indulgence que les mandarins
Tartares. Mais, si les princes qui occupent
présentement le trône , ont fait quelques innovations
dans la forme du gouvernement, ils ont, en
habiles politiques , maintenu ïes usages établis,
et continué sur - tout à surveiller les examens,
( a ) Marchands Chinois, qui traitent avec les Européens.
SUR LES CHINOIS. ' 44 5
persuadés que, par ce moyen, ils consolideroient
leur puissance. En effet, comme il faut généralement,
pour parvenir aux emplois, obtenir des
grades, l’espérance de devenir mandarin tient un
grand nombre de Chinois dans la soumission et ia
dépendance. De plus, le choix d’un sujet sortant
de la dernière classe , donne au peuple une haute
opinion de son gouvernement, et lui fait croire
qu’il sera plus ménagé par un tel magistrat que
par tout autre. II se trompe cependant : plus ia
condition d’un Chinois parvenu à ia dignité de
mandarin étoit obscure auparavant, et plus il croit
la faire oublier , en traitant avec mépris ceux qui
. étoient ses égaux. Iï s’imagine que la figure d’un
oiseau ou d’un tigre, brodée sur le devant ou sur
le dos de son habit, lui donne tous les genres de
mérite ; il sollicite des places, devient gouverneur
d’une ville , d’une province ; il parvient au poste
éminent de Tsong-tou : alors, abusant de l’autorité
que le prince lui a confiée, et s’abandonnant aux
sentimens peu délicats qu’il puisa dans .sa première
éducation presque toujours vicieuse, il pille, voie
et vexe les peuples , jusqu’à ce que l’empereur,
instruit de ses excès , le casse , l’exile, et le fasse
rentrer dans ia foule d’où ie hasard l’avoit fait sortir.
Le premier ordre des mandarins est celui des
Coiao , ou ministres cf’Etat, des premiers prési-
dens des cours et des principaux officiers militaires.