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un présent de quinze à vingt mille piastres ; et un
particulier ne put obtenir de le voir, parce que la
somme qu’il pouvoit offrir , ne s’élevoit qu’à dix
mille piastres [ 54*000 liv. ] ; mais les secrétaires
en firent leur profit et lui promirent de parler en
sa faveur à leur maître. Ce mandarin, dont la conduite
étoit connue des Anglois, dut nécessairement
les voir de mauvais oeil, aussi fit-il tous ses
efforts pour les éconduire.
Certains auteurs ont regardé le gouvernement
Chinois comme parfait. Chez ce peuple de sages >
» disent - ils, tout ce qui lie les hommes est reli-
:» gion ; et la religion elle-même n’est que la pra-
:» tique des vertus sociales. C ’est un peuple mûr
et raisonnable, qui n’a besoin que du frein des
33 lois civiles pour être juste (a).y>
J’ai vécu long-temps à la Chine; j’ai traversé
ce vaste empire dans toute sa longueur ; j’ai vu
par tout le fort opprimer le foible , et tout homme
ayant en partage une portion d’autorité, s’en servir
pour vexer , molester et écraser le peuple.
Les mandarins des villes cherchoient à s’emparer
d’une partie du salaire dû à nos coulis et à nos porteurs
; ils les frappoient même lorsqu’ils vouloient
se plaindre.
Un de nos petits mandarins ne rougit pas de
(a) Raynah.
prendre une somme de vingt mille francs qui de-
voit être distribuée à nos domestiques Chinois.
Les Mandarins de Peking chargés de nous
fournir des vivres, en vendoient la moitié. Le Ho-
tchong-tang (a ) lui -même se réserva les deux
belles pendules apportées par les Hollandois, alléguant
pour prétexte qu’il ne vouloit pas compromettre
le mandarin qui avoit été chargé du soin de
les escorter ; comme si cet homme pouvoit être
responsable de ce que les porte-faix avoient fr-a
cassé ces machines en tombant dans les mauvais
chemins.
Mais ne nous arrêtons pas à des faits d’une
aussi foible importance ; examinons le gouvernement
lui-même, et jugeons-le par ses résultats.
Le Tsong-tou de Quanton fît faire , en 1794 >
des galères , pour poursuivre les pirates qui iq-
festoient les côtes ; il écrivit à Peking que tout étoit
prêt. L’empereur répondit : Votre prédécesseur
33 m’a dit qu’il n’y avoit plus de pirates , les frais
o, de l’armement seront pour votre compte. 33
Qu’arriva-t-il ! les galères restèrent là ; le Tsong-
tou paya ce qu’il voulut, et les pirates existent
encore. Le fait est que le Vice- roi précédent
avoit fait réellement armer des galères ; mais les
mandarins , au lieu d’aller attaquer les voleurs *
(a). Premier ministre de Kien-Iong.
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