LES VILLES ANCIENNES ET MODERNES.
Les -villes anciennes, leur importance passée, leur situation actuelle. — Les
-villes modernes, leur description succincte. — Aspect des rues. — Population
et sa densité. — Importance commerciale.
L’histoire des villes, dans la région qui nous occupe, est aussi difficile à
reconstituer que celle des peuples ; les indigènes sont aussi peu au courant
de ce qu’ont été leurs cités, que de l’origine de leurs pères. De plus, la
grande diversité des langues donne aux villes plusieurs noms indigènes, si
leur population comprend des gens de pays différents. On connaît ainsi
trois ou quatre noms de ville qui n ’en font en réalité qu’un seul.
La plupart des grandes cités modernes ont suivi dans leur prospérité une
marche inverse des nôtres ; riches et florissantes autrefois, alors que la
traite semait l’or dans toutes les bourses, elles sont tristes et mornes
aujourd’hui que leur population active a disparu. Certaines d ’entre elles se
relèvent sous les bienfaits de l’influence européenne, comme Porto-Novo ;
d’autres restent ruinées et redeviennent des villages à moitié déserts en
comparaison de ce qu’elles étaient autrefois, comme Abomey, 'Whvdah,
Godomé.
Les villes principales du Dahomey et de Porto-Novo peuvent se diviser
aujourd’hui en deux catégories : les villes anciennes disparues et les villes
modernes provenant de vieilles cités qui ont changé de nom. 11 n’en existe
pas qui soient réellement nouvelles.
Villes anciennes disparues.
Cana ou Calmina était la capitale du royaume de ce nom; c’était autrefois
une ville prospère et florissante. Les Fons la convoitaient depuis longtemps.
Aho, après plusieurs tentatives, parvint à s’emparer de la ville et la
ru in a pour toujours. Son royaume fut jo in t à celui des Fons, qui augmentè
ren t ainsi leur territoire d’une dizaine de lieues carrées (1661).
Les rois de Dahomey en tirent autrefois une de leurs résidences et relevèrent
ses murs en ruines. Aujourd’hui, les murailles sont tombées et la
maison royale subsiste encore au milieu d’un village de peu d’importance.
A lla d a , la première ville du royaume d’Ardres, était la résidence favorite
des rois, de préférence à la capitale. Les anciens voyageurs la dépeignent
comme une ville immense et peuplée, entourée d’un territoire fertile et cultivé,
et fortifiée d’une façon redoutable avec trente-deux pièces de canon
appartenant au roi ou aux compagnies de traite.
Après la conquête du royaume par les Fons, en 1724, elle commença à
perdre de son importance. Comme Cana, elle disparut peu à peu. Ce n est
plus, aujourd’hui, qu’un village auprès duquel on voit encore les traces de
l’ancienne cité ; le roi de Dahomey y possédait un pied-à-terre. Allada est
aujourd’hui, dans la nouvelle organisation administrative du Dahomey, la
capitale du royaume ou district du même nom. Elle est située p a r 0°9 30 de
longitude ouest de Paris, et 6°41' de latitude nord.
Savi ou Xavi, Xavier, Xabier, Sabée, Sablé *, située à quatre heures de
Whydah, fut la capitale du royaume de Juda. Son histoire est à peu près
la même que celle des villes précédentes. Conquise avec le royaume, en 1727,
elle devint la propriété des Fons. Grand centre du commerce e t de la traite,
Savi était, malgré son éloignement de la mer, aussi important que Whydah.
Parmi ses principaux établissements européens, on cite deux compagnies
françaises, y compris celle des Indes, une anglaise, une portugaise, une hollandaise
; de nombreux traitants arabes ou malais y étaient continuellement
de passage. Ces comptoirs dirigeaient ceux de Whydah, leurs chefs ré sid an t
à Allada. Ils furent tous brûlés, à la suite d’une tentative de révolte du
royaume de Juda contre le Dahomey, avec la id e des Popos. La ville fut
saccagée, tout y fut mis en cendres, et elle ne se releva jamais de ce désastre.
Savi avait été, avant cette époque, fortifiée p a r le roi de Dahomey,
qui ajouta den o u v e lle sm u ra illlsau x an c ien n e s.il y possédait une vingtaine
de pièces de canon.
Aujourd’hui, on voit quelques cases indigènes dans une plaine verdoyante
qui était autrefois l’emplacement de la ville. Le roi y possédait une propriété
close de murs, où ses hôtes se reposaient dans le cours de leurs voyages à
Abomey ou à Whydah.
Daho ou Dqhé, Dahouy, Dahoué, à une heure d ’Abomey, fut la résidence
de Dan, roi des Fons, avant qu’Aho ne l’eût détrôné; c’était le principal village
d’un petit État mal défini aujourd’hui, qui fut le berceau de la nation
dahomienne. Un hameau du même nom existe actuellement à peu près
au même endroit. Le roi de Dahomey n ’oubliait pas que c’est de là qu’est
sortie sa nation ; il y possédait une résidènce et allait souvent y passer
quelques jours.
Z a ffa , Gounégy, Appot, Agrimé, T o ré e , Àssem2, décrites autrefois comme
des villes importantes, furent détruites ou abandonnées, sauf Torée qui
existe encore, réduite à l’état de tout petit village, et il n ’en reste même
pas le souvenir dans l’esprit des indigènes.
1. Nous donnons, à titre de renseignement, tous les noms sous lesquels les
anciens voyageurs désignent les villes en en corrompant la prononciation.
2 . Assem qui occupait l’emplacement où fut plus tard Ardres ou Porto-Novo.