commerce français en particulier ; il est à espérer qu’on s’apercevra
à temps de la chose et qu’on ÿ apportera des modifications.
Voici d’abord le tarif et le règlement du 1er avril 1890 :
A rticle premier. Les marchandises de toutes proyenances importées
dans les territoires de Porto-Novo et de Kotonou et dans
les territoires placés sous le protectorat de la France à l’est de
Grand-Popo seront soumis aux droits suivants :
Genièvre, par caisse de 8 litres, au-dessous de 40 degrés.. . . . . 0f,80
— — de 40 à 60 degrés. 1 20
— — au-dessus de 60 degrés 2 00
Rhum par litre, au-dessous de 40 degrés....................................... 0 04
— " de 40 à 60 degrés .............................. 0 06
— de 60 degrés et au-dessus. ............................ 0 10
Tabac, par kilogramme.............................................. 0 25
Poudre, par 100 livres anglaises........................................................ 6 25
Fusil, par pièce..................................................................................• 1 25
Sel, par tonne de 1000 kilogrammes ........................................ 10 00
A r t . 2 . Tous les articles autrès que ceux mentionnés ci-dessus
seront admis en franchise.
Or, au dire des négociants français, ce régime douanier ne
protège nullement le commerce de notre pays ; au contraire, il le
grève au profit des Allemands.
Pour en faire comprendre la raison, quelques mots d’explication
sont indispensables.
Qui est-ce qui reçoit des alcools, du tabac, de la poudre en
quantités énormes à Porto-Novo? Ce sont les maisons françaises.
Elles ne font que très peu le commerce des tissus.
De leur côté, que reçoivent les Allemands? Des quantités de
tissus qui entrent en franchise et des groups d’espèces qui leur
servent à acheter des produits. Voilà la base de leurs transactions.
Ils n'ont à payer les droits que sur un peu d’alcool, qui les aide à
écouler leurs espèces.
Ce seront donc les maisons françaises qui entretiendront la
colonie, car elles ne reçoivent que des marchandises qui payent
des droits, et les Allemands auront sur elles un avàntage considérable.
Si c’est la question de protection de nos industries qu’on .a
visée, il est très compréhensible qu’on grève les alcools, le tabac,
les fusils ; mais, alors, pourquoi a-t-on exclu les tissus qui viennent,
en grande partie, d’Angleterre, le reste d’Allemagne ? Et
pourquoi impose-t-on la poudre, les vins et liqueurs, qui sont nos
seuls produits français, ainsi que le sel ?
Nous n’avons que ces articles ; le commerce de la région roule
sur l’industrie étrangère ; le régime protecteur ne serait pas possible,
même s’il était bien appliqué.
Pour éviter qu’une seule classe de commerçants ait à supporter
les droits, tandis que l’autre travaille en franchise, il faut chèrcher
à faire payer des droits d’un autre genre.
Le seul moyen de tout arranger eût été certainement de faire
payer tant pour 100 à l’exportation, sur les huiles de palme, les
amandes de palme et tous les produits de la colonie. C’est le
commerce de tout le monde, et chacun participait ainsi aux impôts
établis en proportion directe et exacte de l’importance de ses
transactions.
Toutes les marchandises entrant librement et leur produit
payant à la sortie, elles se transforment toutes inévitablement en
produits et sont frappées de cette façon. Peu de vérification serait
nécessaire : à Kotonou, les connaissements suffiraient à l’expédition
de chaque navire ; à Porto-Novo, quelques douaniers à la
lagune.
N’était-ce pas plus simple ?
Le S pour 100, par exemple, à l’exportation sur la valeur moyenne
du marché, donnerait environ une somme de 3S0 000 francs au
minimum, qui rentrerait en argent comptant dans les caisses de
la colonie.
Les droits à l’importation, comme ils sont établis, donneront
évidemment davantage, parce qu’ils sont élevés ; mais ce seront
deux maisons qui payeront sur six ou sept qui trafiquent.
Il faut bien Se souvenir que le commerce des Allemands est basé
sur des achats contre argent ; l’argent ne payant pas de droits
d’entrée, le seul moyen de l’atteindre est de grever ce qu’il produit,
et les droits à l’exportation atteindraient ce but. En admettant
que les maisons françaises, pour faire cesser ce régime injuste,
se mettent à faire du commerce contre espèces, les droits de
douane seront réduits à fort peu de chose pour l’administration
coloniale.
Si le S pour 100 n’est pas suffisant, qu’on mette le 10 ; mais le
commerce français demande à ce que tout le monde paye ; autrement,
les armes ne sont plus égales et la concurrence sera toute
à l’avantage de ceux qui ont le moins de frais.