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Il fallait en finir. Le gouvernement français déclara, à la date du 15 juin,
le blocus de la côte du Dahomey. Behanzin riposta en ouvrant les hostilités
le 26. Notre flottille, de son côté, bombarda, le 4 juillet, quelques villages
du Décamé situés sur le Whémé. Mais il était nécessaire d’infliger un échec
sérieux au roi, et le colonel Dodds estimait que le seul moyen qu’on eût d’y
arriver était de marcher sur Abomey.
Après quelques tergiversations, le gouvernement accepta cette proposition
; il accorda toute liberté au commandant supérieur pour la conduite
des opérations, et il lui annonça l’envoi prochain de nouveaux re n fo rts1.
Behanzin fut alors mis en demeure de rendre les prisonniers porto-no-
viens faits par le roi du Décamé, et de nous livrer ce dernier. Sur son refus,
accentué p a r un mouvement important de troupes dahomiennes, le colonel
Dodds décida de commencer l’exécution de son plan p a r des opérations
secondaires, destinées à préparer et à faciliter l’opération décisive, celle-ci
ne pouvant être tentée qu’après l’arrivée des renforts.
En les attendant, il s’agissait de refouler l’ennemi établi devant Kotonou
et de l’expulser du territoire de Porto-Novo, tandis que, d’autre p art, on
marcherait sur le Décamé et on le soumettrait, tout en accréditant, p a r tous
les moyens possibles, le bruit que notre objectif était Whydah, de manière
à y attirer le plus possible de forces dahomiennes.
O p é r a t i o n s s e c o n d a i r e s s u r l e D é c a m é . — Le 9 août, les bâtiments de
mer bombardent Whydah et toutes les positions ennemies du littoral. La
flottille canonne les villages du lac Nokoué (Zobbo, Abomey-Calavi). Notre
artillerie de Kotonou tire sur le camp dahomien établi devant nos lignes.
Aussitôt après, un détachement, sous les ordres du commandant Stéfani,
p art de Kotonou, brûle Zobbo et le camp, refoule plusieurs embuscades et
ren tre le 10, ayant fait subir de grosses pertes à l’ennemi et n’en ayant
éprouvé que d’insignifiantes.
Ayant ainsi déblayé le terrain, toutes les troupes disponibles de Kotonou
se dirigent sur Porto-Novo afin de constituer la colonne destinée à agir
dans le Décamé. Elles sont formées en trois groupes, dont chacun comprend
un état-major, deux compagnies indigènes soutenues par une section d’Européens
et deux pièces d’artillerie, avec une ambulance e t une réserve
d’outils. Le convoi porte cinq jours de vivres.
Le colonel Dodds ne se faisait aucune illusion sur le caractère de son
entreprise. « Les plus grosses difficultés qu’on aura à vaincre, écrivait-il,
proviendront, on le sait d’avance, non pas du nombre ou de la valeur de
l’ennemi, mais de l’insalubrité du pays, du manque d éro u te s et de moyens
de transport, enfin de la nature même de la région, qui ne constitue dans
son ensemble qu’une immense forêt, dont les dessous, garnis d’arbustes
et d’une herbe géante (plus de 2 mètres de hauteur) e t épaisse, forment une
brousse impénétrable.
« Il faudra, en marche ou en station, débroussailler constamment, soit
1. Ces renforts se composaient d’un bataillon de légion étrangère, de deux
escadrons de spahis sénégalais, d'un détachement du génie. En outre, une troisième
compagnie de tirailleurs aoussas devait être créée à l’aide des ressources
locales, et la flottille s’augmentait de deux canonnières qu’on venait d’acheter :
le Corail et l’Opale.