Mesüres de p a c ific a tio n . — Dès le lendemain, trois compagnies d'infanterie
appuyées p a r les troupes de débarquement des navires en rade e t par une
section d’artillerie, sous les ordres du commandant Marquer, occupent
Whydah sans résistance et, par la suite, Abomey-Calavi, Godomé et Savi,
sur la route d’Allada.
Le 14, les chefs de celte dernière ville se soumettent et elle est occupée,
le 2 janvier 1893, p a r deux compagnies sous les ordres du lieutenant-colonel
Lambinet. Dès lors, le poste de Goho peut se ravitailler à Whydah par
Allada.
Les communications sont améliorées. Depuis le début de la campagne, le
télégraphe reliait Porto-Novo à Dogba. Une nouvelle ligne est créée entre
Kotonou et Whydah.
Le calme renaît partout. Grâce aux paroles de paix qui ont été transmises
p ar les chefs, les indigènes reprennent confiance, et ils rentrent dans les
villes. La population mâle de Whydah redevient presque aussi considérable
qu’avant l’ouverture des hostilités.
Pendant que des missions topographiques lancées dans toutes les directions
vont lever la carte du pays, des détachements fouillent le Décamé
dont le chef vient faire sa soumission au poste de Dogba ; d’autres détruisent
des bandes de pillards. Des postes sont créés à Tori, Ekpé, Ouagbo.
Seule, la région d’Agony reste encore insoumise. Son chef demeure fidèle
à Behanzin, dont il est le beau-frère.
Quant à celui-ci, il s’est retiré à Atchéribé, à 80 kilomètres au nord
d’Abomey. La famine, la désertion, ainsi que la variole qui a sévi dans son
entourage, ont réduit à environ 400 le nombre de ses fidèles, dont beaucoup
ne sont retenus, d’ailleurs, que p ar la crainte.
Aussi le souverain, dont la déchéance a été prononcée p ar le gouvernement
français, n ’a-t-il plus aucun espoir de ren tre r les armes à la main dans
son pays ; il ne peut plus se faire longtemps illusion sur les ressources qui
lui re sten t. La misère et la faim vont achever l’oeuvre commencée p ar la
force. La guerre proprement dite est finie ; la poursuite de Behanzin et la
destruction de quelques bandes isolées constituent des descentes de police
faitès à main armée plutôt que des expéditions militaires. Disons le mot : ce
n ’est plus qu’une chasse à l’homme.
L’ex-roi, renonçant à la lutte, ne comptant plus sur la force, recourt
encore à la diplomatie et à la ruse. Abusant de l’ignorance et de la crédulité
de son peuple, il fait courir le bruit que la France va lui restituer son
royaume. Peut-être, d’ailleurs, l’espérait-il. Il faisait appel, p a r un manifeste,
aux puissances européennes, et il envoyait à Paris une ambassade
chargée de demander au Président de la République l’annulation de la déchéance
prononcée par le général Dodds.
Celui-ci, de son côté, était venu en France s’entendre avec le gouvernement,
prendre un repos mérité et recevoir l’accueil chaleureux que ses compatriotes
lui réservaient à bon droit. Mais, en remettant le commandement
2088 hommes (dont 930 indigènes), elle a perdu par le feu : 11 officiers et 70 hommes
tués (dont 33 indigènes), 25 officiers et 411 hommes blessés (dont 216 indigènes).
p a r intérim au colonel Lambinet, il lui avait laissé des instructions pour le
cas où il faudrait reprendre les opérations contre Behanzin, si les moyens
pacifiques n ’aboutissaient pas.
Rentré le 3 août 1893, il prépara la nouvelle expédition qui avait pour
objet la capture de Behanzin, dont les émissaires agitaient le pays.
Reprise des o p é ra tio n s . — Avant de marcher sur;,lui, il y avait des mesures
de prudence à prendre. Si la région de Porto-Novo était parfaitement
tranquille, p a r contre les pays du Décamé et des Ouatchis (entre Mono et
Couffo) ne paraissaient pas suffisamment sûrs. Il fallait donc les forcer à rester
tranquilles, afin qu’aucun accident ne vînt à se produire sur les derrières du
corps expéditionnaire, pendant que celui-ci serait occupé sur le th éâtre des
opérations principales.
Ce résultat obtenu, le général Dodds se dirigea vers le nord 1.
11 avait divisé ses troupes en quatre groupes, placés respectivement sous
les ordres des commandants Drude, Boutin, de Cauvigny et Chmitelin.
Concentration des troupes. — Le 16 septembre 1893, le commandant Drude
était à Dogba, avec son infanterie. Il fouilla le pays jusqu’à Sakété et trouva
partout une tranquillité complète; mais, n ’ayant pu franchir le Whémé, qui
était débordé sur plusieurs kilomètres, il doit renoncer à poursuivre sa route
par voie de terre jusqu’à hauteur d’Agombo. Il est obligé de recourir à la
flottille. Celle-ci cesse donc le transport des vivres e t elle conduit le groupe
Drude vers le nord, pour qu’il opère sa jonction avec les groupes Boutin et
de Cauvigny, lesquels se sont concentrés à Cotopa et débouchent p ar Allahé.
Le groupe Chmitelin, constitué par les troupes de Goho, va, le 7 octobre,
s’établir à Oumbégamé, sur la route d’Atchéribé. Il reste isolé.
Quant à la flottille, qui avait été renforcée p ar l'Olinda, le Marmet e t la
Mosca (de la mission Mizon), elle amène à Dogba les réserves de vivres e t de
munitions.
Ces dispositions é tan t prises, le général quitte Porto-Novo le 13 octobre
pour se mettre à la tête de l’expédition. Il s’agit d’en finir avec Behanzin,
qui ne répond qu’évasivement aux sommations qui lui sont faites.
Le groupe Drude, avec le quartier général, débarque à Ouéméton, à hau teu
r d’Agony; il est destiné à former la droite de notre ligne, dont le centre
sera occupé p ar le groupe Boutin. Celui-ci a quitté Allahé le 9. Il a passé le
Zou à Abodougnanli le 13 et il s’établit à Zagnanado, où un magasin central
est immédiatement commencé dans le p a la is!. Le 23, la concentration des
trois premiers groupes à Zagnanado était terminée. Ce même jour, le commandant
Chmitelin s’était avancé jusqu’à Yégo, sur la route d’Atchéribé.
Behanzin a préparé sa fuite vers le nord-est sur Lagos. 11 est donc décidé
qu’on lui coupera cette route de retraite. A cet effet, le colonel Dumas,
avec le groupe Boutin, p a rtira le 28, se portant vers le nord, en suivant le
Whémé, et c’est seulement quand son mouvement sera prononcé que la
marche directe commencera.
1 . Bien que cette marche n’ait pas donné lieu à dë brillantes actions de guerre,
nous croyons devoir la raconter en détail, parce qu’elle n’est peut-être pas suffisamment
connue, et elle mérite de l’être, ne fût-ce que comme exemple d’organisation
prévoyante et méthodique.
2. Un deuxième magasin avait été créé à Abodougnanli.