supplices atroces, à titre d’exemple, une centaine de têtes coupées,
auraient bientôt remis les choses dans l’ordre.
11 lui fallait, pour le défendre dans son palais, une garde puissante
et aguerrie, capable de résister à sa propre armée et de lui
inspirer, malgré son nombre inférieur, une crainte .salutaire. 11
ne pouvait songer à recruter, dans le pays, les gens nécessaires à
la formation de ce corps ; c’était se mettre entre les mains de ses
sujets. D’un autre côté, parmi les prisonniers qu’il ramenait
chaque année, les hommes étaient en petit nombre et leur prix
était très élevé sur le marché de Whydah ; il lui fallait, en outre,
quelques-uns d’entre eux pour les sacrifices humains. Restaient
les femmes, toujours nombreuses et vendues au rabais, parmi
lesquelles il pensa à choisir des gardes du corps. Il prit des jeunes
filles, destinées désormais à être esclaves, les proclama femmes
libres avec le titre d’agolédjié (femme de guerre), qui leur donnait,
à l’avenir, le pas sur tous les sujets du roi, hormis les chefs.
C est au palais et dans ses murs qu’il faisait leur éducation, et,
du matin au soir, elles étaient occupées au maniement des armes
et aux plus fatigants exercices. Il les tint à l’écart de son peuple,
les habituant à se considérer comme supérieures à ce dernier.
Lorsqu’elles eurent à sortir du palais, il les fit précéder d’une
petite fille agitant une clochette, ce qui signifiait, pour les passants,
d’avoir à se ranger le long des murs afin de ne pas frôler
seulement l’agolédjié. Enfin, il forma, de ces jeunes filles, un
corps d élite, dévoué à lui corps et âme, fier et orgueilleux de la
faveur dont il jouissait et qui promettait d’être féroce avec ses
ennemis , il avait, en plus, une valeur guerrière, une discipline
merveilleuse, qui étonnent chez des peuples aussi barbares.
Les amazones étaient créées.
Sept ou huit ans après, le corps des amazones se montait à plus
de dix mille femmes, bien armées et vraiment remarquables par
leur agilité et la façon dont elles promettaient de se battre à l’occasion.
En leur qualité de gardes du palais, elles furent chargées
du service intérieur, pendant les courts loisirs que leur laissaient
leurs exercices, et distribuées entre les diverses résidences du
roi. Il prit parmi elles un grand nombre de ses femmes.
Ce ne fut qu’en 1851 que Guêzou changea ses gardes du corps
en véritables guerrières. On a vu comment elles se comportèrent
sous les murs d Abéokouta. Depuis, elles formèrent toujours la
meilleure partie, l’élite de l’armée dahomienne.
Plus tard, Glèlè prit grand soin des amazones. Peu à peu,
elles furent recrutées parmi les femmes dahomiennes, contrairement
à l’usage établi par Guêzou. La crainte d’une révolte était,
d’ailleurs, passée ; le peuple était courbé sous le joug comme
autrefois, et la génération qui avait détrôné Adonozan était éteinte.
Le peuple avait été relativement mieux traité par Guêzou, et il était
moins que jamais disposé à la révolte ; c’est de cette façon que,
d’étrangères, les amazones devinrent dahomiennes.
Glèlè, contrairement à son père, autorisa leur mariage avec des
chefs du pays ; mais'toute infraction à la règle, tout mariage clandestin
entraînait la mort des deux coupables.
Leur organisation comme armée est la même que celle des
hommes ; le roi est généralissime ; leurs chefs sont des femmes
comme elles, choisies parmi les plus âgées ou celles qui se sont
distinguées par des actions d’éclat. Elles portent les mêmes noms
que les chefs du sexe masculin, qui sont : gâou, général en chef;
kpossou, général ; ahouaingan, chef de guerre.
Ces noms indiquent le grade. Il y a plusieurs généraux et un
grand nombre de chefs de guerre.
La plus grande récompense des amazones est de recevoir de la
main du roi des amulettes et des gris-gris destinés à les rendre
invulnérables ; ces objets enchantés consistent en anneaux, sachets
en peau de chacal, cordelettes ou autres menus ornements
trempés dans le sang humain.
Aujourd hui, les amazones sont au nombre de deux mille cinq
cents à trois mille environ. Depuis la disparition presque totale
de la traite, le gouvernement dahomien ne peut probablement
plus supporter un aussi grand nombre de bouches inutiles, en
temps de paix.
Le costume de guerre des amazones se compose d’un tchokoto
ou pantalon court arrivant aux genoux et d’une petite jupe qui le
couvre en grande partie ; le tout bleu ou blanc sale.
Elles ont un morceau d’étoffe qui leur couvre les épaules et la
poitrine, maintenu à la taille par la cartouchière, qui tient lieu de
ceinture. Cette cartouchière est de deux catégories : celle de danse
et de parade, contenant six à huit boîtes rondes en bois tourné,
destinées à la poudre et recouvertes par un cuir ornementé, et la
cartouchière de guerre, qui en contient de seize à vingt.
Elles ont sur lâ tête (rasée) un bonnet, blanc à l’origine, mais
généralement gris foncé, sur lequel se détache une tortue dé-
B I B L , D E l 'E X P L O K . I t t . 1 7