Règne d ’Aho, de 1655 à 1679.
Nous avons vu finir le règne de Dan et commencer celui d’Aho.
Nous retrouvons ce prince au moment où il emploie la ruse pour
pouvoir s’emparer d’abord des petits États voisins, puis, plus tard,
des grands royaumes. 11 commença par organiser avec régularité
son armée ou plutôt ses bandes. Des exercices continuels donnèrent
bientôt à cette petite nation des soldats aguerris et disciplinés,
manoeuvrant avec un ordre vraiment admirable, quand on
songe au manque de civilisation de l’époque. Aho comprenait
que, pour mener à bien ses entreprises, lui seul devait commander;
le désordre dans les rangs eût pu le perdre, la discipline
l’aida à triompher.
Le jour où il fut prêt, Aho fondit sur ses voisins les plus proches
comme l’aigle sur sa proie ; en peu de temps, plusieurs petits
États indépendants ou tributaires des royaumes d’Ardres et de
Cana, qui bordaient le pays des Fons, furent annexés à son territoire.
En 1661, il fit la conquête du royaume de Cana ou Calmina avec
une facilité d’autant plus grande qu’on ne s’y attendait pas à une
attaque de sa part. Avant que l’ordre fût rétabli, que les habitants
eussent organisé la défense, les Fons étaient maîtres du pays.
Quant aux prisonniers, ceux qui optaient pour le Dahomey
venaient grossir son armée ; les rebelles étaient mis à mort et
leurs biens donnés aux autres.
A la mort d’Aho (1679), le Dahomey avait triplé son territoire;
il était limitrophe du royaume d’Ardres. Comme on le voit, l’ambitieux
roi des Fons ne put terminer la tâche qu’il s’était imposée;
mais il espéra que son successeur, Akaba, suivrait ses traces et
exécuterait son grand projet de conquête.
Règne d’Akaba, de 1679 à 1708.
Akaba ne répondit pas à l’attente des Fons ; autant Aho était
résolu et énergique, autant son successeur était apathique et indolent.
Tout ce qu’il put faire fut de conserver intact le royaume que
lui avait laissé le fondateur de la dynastie. Son règne fut donc
complètement nul en ce qui concerne les progrès du Dahomey.
Le seul événement marquant à signaler pendant ce règne fut
une tentative que fit le royaume de Juda contre les Popos. Les
Français, en petit nombre, qui occupaient le fort de Juda, aidèrent
le roi dans son expédition ; mais le résultat en fut malheureux. Les
Popos battirent le roi de Juda et nos compatriotes, qui furent obligés
de se retirer (1695),
Akaba mourut, empoisonné par un de ses serviteurs, et fut
remplacé par Agadja, neveu d’Aho (1708).
Règne d’Agadja, de 1708 à 1729.
Agadja était le portrait vivant de son oncle. Le jour de son avènement,
les Fons se 'sentirent soulevés par un souffle belliqueux ;
sa venue réveilla dans leurs coeurs des fibres endormies, car ils
étaient, d’instinct, un peuple guerrier, et l’inaction était contre
leur nature. Les vingt-neuf ans du règne d’Akaba furent oubliés,
et la nation se retrouva comme autrefois, lorsque la voix puissante
d’Aho l’appelait au combat.
Agadja voulait accomplir les desseins de son oncle ; jeune encore
au moment de sa mort, il avait grandi dans l’espoir de voir Akaba
suivre ses volontés et n’avait jamais espéré que ce serait lui qui
entreprendrait l’agrandissement du royaume.
Quelques années se passèrent en préparatifs, et les Fons furent
encore une fois en état d’entrer en campagne.
Le royaume d’Ardres était riche et puissant; tout y florissait.
Ses rois (princes d’Allada) se succédaient en paix, ne soupçonnant
pas les intentions de leur voisin. Ils avaient bien été prévenus
autrefois des projets d’Aho, mais le règne d’Akaba avait tout fait
oublier, et personne ne songeait au jeune et nouveau souverain
que les Fons avaient récemment mis sur le trône.
Un jour, le Dahomey envoya un ambassadeur au roi d’Ardres,
demandant, à dessein, une concession de territoire, qui devait
être sûrement refusée. Le roi n’ayant pas fait droit à la réclamation
du Dahomey, la guerre fut déclarée (1723).
Elle dura longtemps. Les gens d’Ardres avaient la supériorité
écrasante du nombre; les Fons, celle du courage allié à la ruse et
à une savante tactique guerrière; toutes les batailles, toutes les
surprises, étaient au désavantage des premiers, et les Dahomiens
avançaient toujours, faisant d’énormes ravages et augmentant à
chaque instant leur butin et leurs prisonniers. Près d’un an après
le début de la campagne, le royaume d’Ardres était anéanti ; ses
princes captifs et à la merci des conquérants ; ses villes, parmi les