s obtient en pinçant la peau avec les doigts à l’endroit désigné
par un dessin à l’ocre ou à la chaux et en y opérant avec une
petite lame en forme de lancette des incisions assez profondes
suivant les contours du dessin. On laisse saigner un instant et
Ion frictionne fortement les plaies avec de la poudre à canon
pulvérisée, du salpêtre, de la potasse, du jus d’herbes ayant les
mêmes propriétés ou enfin n’importe quelle substance caustique
dont on dispose, afin d’y déterminer une inflammation. Celle-ci
se déclare généralement et détermine une enflure qui subsistera
désormais.
' Le tatouage en couleur se fait par des piqûres, faites au moyen
d une aignille, d’une épine, dans lesquelles on introduit du noir
de fumée, des teintures noires végétales, de la poudre délayée ou
plusieurs autres substances de façon à cè qu’elles restent sous
l’épiderme.
On remarque le tatouage en relief chez les gens à peau noire,,
parce que l’autre ne se distinguerait pas. Ceux dont la teinte est
plus claire préfèrent celui en couleur ; d’autres mélangent les deux
d’une façon fantaisiste.
En plus de ces distinctions, on peut remarquer \& tatouage
d origine et le tatouage de fantaisie : le premier est la marque
distinctive, uniforme et obligatoire des gens d’une même race ou
d une même tribu, dont les traditions sont respectées. Il se porte
généralement à la figure.
Le Minah a trois petites barres horizontales sur la pommette de
la joue; c est le.tatouage de la Côte d’Or, qui comprend une foule
de subdivisions comme tribus. L’Accraën a la même marque, plus
deux points entre les sourcils ; l’Aquamabon,. trois ; le Fanti,
quatre superposées par deux; le Cape-Coast, quatre et une horizontale,
etc.
Le Dahomien a, selon les tribus, d’autres signes : à Whydah et
sur la côte (les anciens Ajudas), deux grosses barres verticales sur
la pommette de la joue ; dans le nord du Dahomey, une marque
verticale au bout du nez ou quatre et jusqu’àsix sur la joue, aux
tempes, au front., au menton, etc. Les Mahis ont les tempes zébrées
; les Nagos ont des marques rondes, en forme de demi-pois
entremêlés avec les traits verticaux ou horizontaux ; les Jebous
également.
Il serait long et difficile d’énumérer par tribu, par race, par village
ou ville, les innombrables distinctions connues des indigènes
seuls et qui nous paraissent se ressembler toutes, au premier
abord. D’ailleurs, ces marques distinctives seraient vagues même
aux yeux des indigènes, si elles n’étaient accompagnées d’autres
indices qui ajoutent leur caractère spécial à la signification du tatouage,
tels que l’accent auquel on reconnaît le lieu où est né
l’individu, la coiffure, les dents, les petits gris-gris ou amu--,
lettes, etc.
Le tatouage d’origine est toujours en relief1 et à la figure.
Le tatouage de fantaisie se fait sur le corps : il est en relief ou
en couleur selon les goûts ; il n’existe pas à la Côte d’Or, où on
l’a en horreur, et où l’on prétend qu’il n ’y a que les esclaves qui se
marquent ainsi. Mais, dans les autres endroits, il est subordonné
au goût de chacun : les hommes se dessinent, sur la poitrine, des
pointillés, dés barres, des croix, des cercles, des étoiles, des tortues,
des fleurs. Ces derniers dessins exigent quelquefois beaucoup
de bonne volonté pour être reconnus ou compris à première
vue : la tortue ressemble à un carré dont les côtés seraient prolongés
pour figurer les pattes, et une barre transversale forme la
tête et la queue ; la fleur est tout aussi fantaisiste.
Chez lés femmes, le comble de l’élégance consiste en un gros
pointillé en relief au creux de l'estomac et limité sur un espace
parfaitement rectangulaire, carré ou losange. Elles n’ont pas de
tatouages sur la poitrine, sauf quelquefois deux ou trois fleurs à
la hauteur des clavicules.
Les tatouages en couleur permettent plus de finesse dans l’exécution
et de plus petits détails. C’est ainsi qu’on voit de petits
cercles coupés par deux diamètres en croix ou par un plus grand
nombre d’entre eux, ressemblant à peu près à des roues, de petites
branches palmées, de fines raies comme des hachures, etc.
Si l’on se faisait tatouer à l’âge adulte et par sa propre impulsion,
il est certain que beaucoup de noirs reculeraient devant
la douleur physique qui accompagne cette opération ; mais elle est
imposée aux enfants par les parents qui, sans se soucier de leurs
cris, les ornent, dès leur jeune âge, des marques dont ils seront
fiers plus tard. Bon gré, mal gré, il faut donc passer par là et chacun
tatoué ses enfants comme il l’a été lui-même quand il était
jeune.
Les gens les plus tatoués sont les féticheurs et les féticheuses,
1. Les Kroomen sont peut-être le seul peuple de la côte qui ait ce tatouage
en couleur.