rien à noter d’important jusqu’en 1737, c’est-à-dire après la mort
de Tégbouessou et de Mpengla.
L’histoire à partir de cette époque devient plus explicite et nous
commençons à pouvoir suivre un peu la politique et les intrigues
du pays.
Agonglou1, petit-fils d’Agadja, succéda à Mpengla en 1737. C’est
sous son règne que le Dahomey devait se voir infliger sa première
défaite. Toujours en guerre avec ses voisins, ayant à maintenir
des révoltes sur son propre territoire, Agonglou pourrait passer
aux yeux de la postérité pour un guerrier, s’il n’avait pas eu en
même temps la réputation de paresse et de nonchalance qui lui
valut le surnom de Fatigué.
Toutes ses guerres furent soutenues et menées par ses ministres ;
ce fut son gaou (général en chef) qui eut ainsi la responsabilité
des défaites et l’honneur des victoires. En 1738, les Ayos ou Eyos
envahirent le territoire avec une armée si nombreuse que rien ne
put lui résister. Le Dahomey fit une résistance désespérée; les
chefs firent appel à tous ceux qui, jeunes ou vieux, pouvaient
tenir une arme, et le peuple entier lutta contre l’envahisseur. Les
Eyos furent repoussés deux fois avec des pertes considérables,
mais ils remplaçaient sans peine ceux qui étaient tombés, tandis
que les Fons voyaient diminuer leur nombre sans pouvoir y
apporter remède.
Lorsque les Dahomiens virent qu’ils étaient impuissants à arrêter
la marche de l’ennemi, ils voulurent au moins éviter de laisser
des prisonniers entre ses mains ; l’armée dahomienne s’esquiva
à la faveur des ténèbres et se réfugia dans des retraites inconnues
des Eyos. Ceux-ci brûlèrent les villes d’Abomey, de Calmina, de
Zaffa, qu’ils avaient trouvées désertes et se retirèrent. L’année
suivante, ils revinrent et recommencèrent leurs déprédations.
Agonglou, las de soutenir la lutte, demanda à entrer en arrangement
et les hostilités cessèrent moyennant un tribut considérable
que le Dahomey s’engagea à payer chaque année. Cette
défaite et ce résultat peuvent être attribués à la mollesse d’Agon-
glou. Agadja ne se fût pas laissé battre de la sorte, lui qui combattit
toujours de plus forts que lui.
A peine débarrassé des Eyos, le roi de Dahomey se tourna vers
1. Il y a des. auteurs qui l’appellent Bossa-Ahadée, d’autres Boffadée ou
Hadée-Gangto.
les Mahis. Ces derniers étaient gouvernés par des chefs séparés
ayant chacun de petits districts distincts et indépendants les uns
des autres.
Agonglou voulut leur donner un roi, en leur exposant tous les
avantages que ce changement aurait pour eux ; en réalité, il voulait
mettre leur pays sous son influence en le faisant gouverner par
un de ses favoris. Les Mahis refusèrent, disant qu’ils voulaient
rester indépendants et décider eux-mêmes de la forme de leur
gouvernement, ajoutant que le roi de Dahomey n’avait aucun
droit de les influencer à cet égard. Ce dernier, vexé, déclara qu’il
leur imposerait de force ce qu’ils ne voulaient accepter de bonne
grâce, et la guerre éclata.
Elle fut sanglante et longue ; elle dura vingt ans. Nous ne nous
étendrons pas sur les détails des hostilités. La victoire fut tantôt
d’un côté, tantôt de l’autre. Le Dahomey pourtant eut le dessus,
car les Mahis ne se relevèrent jamais ; néanmoins, il ne put annexer
leur territoire au sien, sa victoire n ’ayant pas été assez complète.
En 1772, les deux ennemis conclurent un traité de paix qui fut
observé de part et d’autre pendant de longues années.
Tout en soutenant cette campagne, Agonglou eut à lutter continuellement
d’un autre côté contre les révoltes continuelles des
gens de Juda. Un fort parti de rebelles s’était formé dans ce dernier
pays qui, depuis la conquête, avait toujours été très soumis.
A la tête de ce parti étaient les nombreux ennemis que le roi du
Dahomey s’étaient faits par sa cruauté et son injustice. Les Popos
étaient venus grossir l’armée des rebelles, et; à chaque instant, le
roi, tout en luttant contre les Mahis, était obligé de détacher des
troupes pour punir les révoltés. Ceux-ci firent peu de mal, en
résumé, et, eu 1743, tout germe de désordre avait disparu.
Les rebelles qui étaient tombés au pouvoir du roi de Dahomey
avaient été punis d’une façon qui dut à jamais ôter l’envie aux
autres de renouveler leurs tentatives. Ceux qui avaient échappé à
ses représailles disparurent et la tranquillité de ce côté fut pour
toujours assurée. Les Popos, battus également, voyant qu’il n’y
avait plus rien à espérer, signèrent avec le Dahomey, en 1772, un
traité de paix qui ne fut jamais rompu.
Agonglou mourut peu après (17 mai 1774) et eut comme successeur
Adonozan.