pour la même cause allèrent porter les armes les uns contre
les autres.
Aho, dès qu’il eut quitté le roi Dan, lui déclara la guerre ; il
s’était retiré sur le territoire qui lui avait été concédé et, ses dispositions
prises, il joua la partie qu’il avait préparée depuis si
longtemps : la conquête du pays des Fons et de son trône.
Dan rassembla ceux qui lui étaient restés fidèles et marcha
contre son ennemi. Malgré des prodiges de valeur, la victoire lui
fut contraire ; favorisé par le nombre, Aho lui infligea sa première
défaite.
Aho poursuivit sa campagne, lui toujours vainqueur, Dan toujours
vaincu ; de désastre en désastre, Dan se retira dans sa capitale1
où il perdit le peu qui lui restait de ses troupes et fut fait
prisonnier par son ennemi.
Aho devint roi des Fons. Alors commencèrent les conquêtes qu’il
avait rêvées et que lui et ses successeurs devaient réaliser.
En peu de temps il annexa plusieurs petits territoires au sien et
songea à choisir l’emplacement de sa capitale.
L’ayant trouvé, il commença à bâtir les murailles d’enceinte.
Le moment où il voulait se venger des Fons était venu. Un jour,
devant le peuple entier qui travaillait aux fondations, il fit amener
Dan et lui dit :
« Vous m’avez donné un territoire, j’en ferai un immense
royaume; vous m’avez refusé votre cloche en fer, je l’ai prise et
elle m’appartient de droit: je règne à votre place. Aujourd’hui,
comme vous le prévoyiez, je vous demande votre ventre, pour y
bâtir, non ma maison, mais les murs de ma capitale. Nous l’appellerons
Danhomê*.'•»
Et, sur un signe du roi, le prisonnier fut décapité et son corps
jeté dans les fondations. La capitale, seule, d’abord s’appela Danhomê,
mais plus tard tout le royaume prit ce nom, et la ville, ayant
été construite sur l’emplacement d’un village appelé Agbomé, fut
le plus souvent désignée par cette dernière appellation.
Plus tard, également, l’usage modifia la prononciation ; des
noms primitifs, on fit Dahomey et Abomey3.
1. Tout fait supposer que c’était Dahé, ville disparue aujourd’hui.
2. La traduction littérale est Dan (le roi des Fons), et homé, ventre :
ventre de Dan.
3. Dans le cours de cet ouvrage, nous écrirons Dahomey et Dahomien. Des
hésitations ont eu lieu sur l’orthographe de ces mots. Larousse, dans son
. -Telle est, d’après la tradition, l’origine du nom du Dahomey.
Quant au berceau de la nation, petit territoire où se déroulèrent
les premiers événements dont nous venons de parler, il est situé
à 40 kilomètres environ au sud-ouest de l’emplacement actuel
d’Abomey et il s’est fondu dans le royaume.
Djegis e t autres peuples.
Plus tard, les Djegis sont venus se mêler aux Fons et se sont
,confondus avec eux en un seul et même peuple.
Il est certain qu’en principe toutes ou presque toutes les races
qui habitent aujourd’hui la côte de Guinée sont venues du nord. Il
y a, dans les idiomes parlés sur les diverses parties du littoral, de
nombreux termes qui dérivent de l’arabe, et l’on serait tenté d’attribuer
les origines des peuples actuels à des émigrations d’Égyp-
tiens, d’Abyssins, de Somalis, de Soudanais et autres peuples de
la même région : les Fans ou Fellatahs, les Pouls, les Djallons,
ne sont pas étrangers à la formation des races qui existent actuellement
sur le littoral.
On ne peut guère faire que des hypothèses sur l’origine de
races aussi peu civilisées que celles qui nous occupent. Les Daho-
miens doivent à un usage que nous décrirons plus loin de savoir
à peu près la tradition de leur pays depuis deux cent cinquante ans
environ. Les autres peuples voisins en sont absolument ignorants;
leur savoir, en pareille matière, remonte à peine à trois ou quatre
générations, et encore sont-ils si peu d’accord sur ce qu’ils racontent
que l’on ne peut s’y fier.
Les Djegis sont, d’après toute apparence, les habitants des
royaumes voisins que le Dahomey a conquis e,t annexés à son territoire
par ses guerres continuelles ; ils se sont fondus ensuite
avec les Fons en une seule et même race, et leurs deux noms sont,
aujourd’hui, synonymes de Dahomien.
Actuellement, ce peuple se distingue essentiellement de tous
dictionnaire, les écrit de celte façon, tandis que M. Vivien de Saint-Martin
les écrit autrement. Les premières cartes modernes ayant été des cartes
anglaises, nous nous sommes habitués à voir écrire Dahomey, Whydah,
Godomé, Whémé, etc. Nous pensonsque c’est partout le droit du plus ancien
de’baptiser le pays qu’il est le premier à porter sur une carte, e t c’e st vouloir
aller contre cet usage que de changer aujourd'hui cette orthographe. D’ailleurs,
personne n ’est d’accord là-dessus, pas même les anciens auteurs.
Nous garderons donc l’orthographe anglaise. ,