Une autre apparition nocturne, très commune au Dahomey et
à Porto-Novo, est le Zangbeto (zan, la nuit; gbeto, gens, en fon).
Le Zangbeto n ’est pas une divinité ; c’est un revenant, c’est un
homme mort il y a bien longtemps, qui revient sur la terre, la nuit.
Il erre dans les rues les soirs de clair de lune. Telle est la croyance
du peuple. En réalité, c’est une façon qu’a le gouvernement indigène
de faire faire sa police de nuit et d’empêcher les gens de
sortir de chez eux, soit qu’il y ait des processions nocturnes de
fétiches, ou, secrètement, des sacrifices humains.
Le Zangbeto sème la terreur dans la ville ; son apparence n’est
pas faite pour inspirer la confiance.
Qu’on se figure une grande femme en paille, de 3 mètres de
haut, ayant une robe à traîne et des repentirs, qui semble glisser
sur le sol avec la rapidité d’un homme à la course.
L individu qui est dessous porte le tout sur ses épaules et regarde
par une petite ouverture carrée située devant, au-dessous de
la taille ; il parle dans une corne de boeuf et rend sa voix formidable
à l’aide de cet instrument. Il est accompagné d’un orchestre
composé de gens au service des féticheurs, et qui font un vacarme
à 1 aide de gongons, de tambours et de calebasses garnies de
cauris.
D habitude, dès qu’il entend le Zangbeto, l’habitant rentre chez
lui, ferme soigneusement sa porte, éteint toute lumière et se tient
coi. Quand il se laisse surprendre dehors, l’orchestre du Zangbeto,
cachant sa figure, sauf les yeux, au moyen d’un morceau d’étoffe,
se précipite sur lui et le roue de coups. Les Européens mêmes
n ’étaient pas à l’abri, autrefois, des persécutions des Zangbetos
lorsqu’ils s’attardaient dans les rues.
Aujourd’hui, le Zangbeto rend visite aux Européens ; il rôde aux
alentours des factoreries et attend qu’on le fasse appeler pour le
faire danser. Il entre dans la cour, et, accompagné par son orchestre
qui reste soigneusement caché à l’extérieur, il exécute,
pour un peu de tafia, des danses fort comiques.
Pendant la journée, les Zangbetos repartent pour l’autre monde ;
leur enveloppe reste sur cette terre, et l’on en voit une dans chaque
quartier de la ville, sous un petit hangar qui lui est affecté sous la
protection de la paille fétiche.
Dans la catégorie des sortilèges, nous citerons le Chodgoudou à
Porto-Novo, et Y arcade de bambou au Dahomey.
Le Chougoudou est le lieu où est enterrée très sommairement la
victime d’un sacrifice, quelle qu’elle soit; elle est placée à fleur de
terre, et l’éminence que forme son corps est surmontée d’un pot
contenant un peu d’huile de palme, des plumes de poule, du sang
et des poils. On passe généralement très loin de ces sortes de monuments
, d’abord parce qu’ils sont loin de répandre une odeur
agréable, et ensuite parce que les mauvais esprits sont réunis
autour. Celui qui passerait dessus serait tué ou tout au moins persécuté
pendant toute sa vie.
On rencontre des Chougoudous partout ; ils sont le plus généralement
sur les places publiques, au détour des routes ou dans
des bosquets.
L'arcade de bambou est, comme le dit son nom, un bambou
tordu ou attaché à deux autres plantés en terre; on y pend la paille
fétiche. On la voit à l’entrée de presque toutes les villes du Dahomey
; un paquet de plumes, des pattes de poule, des os, etc., y
sont pendus. Celui qui passe dessous ayant des intentions hostiles
contre le gouvernement est terrassé.
Quant à ce qui concerne les enchantements et la magie, tout est
subordonné aux caprices des féticheurs.
Ces derniers forment une secte puissante dans le pays par la
crainte qu’elle inspire, son habileté à tromper, son adresse à
abuser des croyants par l’erreur des sens, les simagrées de toutes
sortes et les airs mystérieux dont se compose, en réalité, le culte
qu’ils professent.
Le roi est le chef suprême du fétichisme; il ne permettrait pas,
autrement, que les féticheurs prennent de l’influence; dès son
avènement, il est initié à tous les secrets du culte, et, comme
chef, il préside de droit à toutes les réunions religieuses extraordinaires.
Immédiatement après lui vient le mingan, grand premier ministre
du fétichisme et en même temps exécuteur des hautes
oeuvres.
Sous la direction de ces deux chefs se distinguent toutes les
sectes de la religion ayant chacune à leur tête un grand féticheur.
Le blanc est la couleur uniforme de leur costume ; ils portent
également la calotte blanche du cabéçaire.
Les ordres du fétichisme sont : l’ordre des Babalaouo, comprenant
les prêtres d’Ifa, d’Ogoun, d’Orné et d’Odoudoua. Le signe
distinctif de cet ordre est la tête rasée; féticheurs et féticheuses
ne portent que des verroteries et des vêtements blancs.