pose à terre et le petit bout qui se tient à la main. Pour éviter
l’usure du manche, on y plante généralement un clou qui l’empêche
d’arriver jusqu’au sol ; l’autre extrémité est quelquefois
garnie de cuivre.
11 y a d’autres cannes plus courtes, faites, comme celles du roi,
en ébène, en ivoire, en argent massif. La hache, insigne que nous
décrirons plus loin, tient également lieu de canne, selon le goût
du propriétaire.
Un cabeçaire bien disposé enverra, par exemple, son bâton à
un Européen malade pour faire demander de ses nouvelles; cette
démarche tient lieu de visite.
Le cérémonial pour l’usage du bâton est le suivant : celui qui
le porte (quand c est un envoyé) doit éviter de le poser à terre et
le tenir de préférence couché sur un de ses bras replié en travers
de sa poitrine, à peu près comme les nourrices portent leurs nourrissons.
Le porteur du bâton, s’il est l’ambassadeur d’un personnage
important, ne doit pas attendre ; on doit le recevoir avec déférence.
L émissaire, quand il est mis en votre présence, vous remet
le bâton, que vous êtes obligé de prendre et de garder à la main
tant que le recade * n est pas terminé et que vous avez à écouter
ce que le propriétaire du bâton vous envoie dire. Sitôt que vous
avez à parler, vous rendez la canne et, dès que l’envoyé la saisit,
vous donnez votre réponse; les Européens qu’on appelle à la gore
pour recevoir un recade du roi doivent se découvrir et tenir le
bâton couché sur les bras comme un enfant que l’on tient sur les
fonts baptismaux.
Si l’on envoie son bâton pour saluer quelqu’un, la personne doit
répondre immédiatement par l’envoi du sien.-
On envoie chercher le bâton du chef comme laisser-passer sur
un chemin interdit.
L’Européen ne peut aller à la capitale que si le roi lui envoie
sa canne.
Les blancs ont pris l’habitude du bâton entre eux ; c’est on ne
peut plus commode : on s’envoie le bonjour, on s’emprunte des
provisions ; dans ces climats brûlants, à midi, on aime beaucoup
mieux envoyer son bâton chez un ami que d’y aller soi-même. Cet
objet, supportant très bien les ardeurs du soleil et tenant lieu de
1. Recado, du portugais, message ; recadaire, messager.
visite, est d’un prix inestimable, et l’on remercie bien souvent le
Dahomien d’en avoir inventé l’usage.
La hache, insigne de dignité, arme de guerre ou ornement,
diffère de la hache du bûcheron par le tranchant de sa lame qui
est disposé perpendiculairement au manche et qui ne coupe pas.
Elle sert de casse-tête à la guerre. On la porte sur l’épaule, suspendue
naturellement par l’angle queforment la lame et le manche.
Sa taille et son ornementation sont excessivement variées, g y en
a qui ont une réelle valeur artistique : le manche est sculpté et la
lame toute ciselée.
Le porte-pipe est une sacoche en peau de chèvre, le pou en
dehors, dans laquelle on renferme tout ce qui est nécessaire à la
pipe du chef. Il est de forme rectangulaire, arrondi d’un côté et
muni d’une coulisse à la partie supérieure. Il renferme généralement
une ou deux pipes du pays, des tuyaux de rechange, une
paire de petites pincettes pour saisir les charbons ardents, un briquet,
deux ou trois silex, de l’amadou du pays1, un cure-pipe en
fer et, enfin, une poche roulée qui contient le tabac de Son Excellence.
.
Disons, en passant, que les allumettes sont aujourd hui répandues
depuis plusieurs années dans les régions les plus éloignées
du pays, et que le briquet sert fort peu. On le porte par
usage.
Le noir qui est chargé de garder le sac précieux porte aussi le
nom de porte-pipe.
Le parasol est d’origine européenne naturellement. Un blanc
en offrit un autrefois au roi, et cet objet devint indispensable en
même temps qu’il constitua le privilège des autorités. Les grands
chefs sortent rarement sans leur parasol, ayant peur, sans doute,
que les ardeurs du soleil ne leur brunissent le teint.
Plu§ tard, les indigènes sont arrivés à des imitations fort convenables
et très agrandies de nos parasols. Seulement ils ignorent
le moyen d’arrondir la partie supérieure ; ils les font plats, à angle
droit et bordés de franges d’étoffe. On ne trouve cette forme qu au
Dahomey.
Le tabouret dont est généralement chargé le porte-pipe est en
bois sculpté d’une seule pièce ; il comprend une plate-forme légè-
1. Écorce aéchée, battue, trempée dans une infusion de poudre e t exposée
au soleil.