
tiaux. Mais dans les Villes mêmes i ils fe
font procuré de l’ombre. Je voyois <je loin
l e s principales rues, bordées de tilleuls &
de maronniers encore verds ; ce qui donnait
au tout enfemble un coup d’oeil riant, que
n’ auroit peut-être pas eu un amas de maifons
placé fèchement fur des Collines toutes nues.
Mais des habitans gais , rendent le pays gai:
ils ont plus d’a&ivité, plus de vie; leur ima-
gination enfante les plaifirs innocens , & leur
corps dispos les fait naître;
Tandis que j ’étois encore fur la hauteur,
les cloches commencèrent à appeller le peu.
pie aux Eglifes. J’attendois ce moment pour
le voir raifemblé. Je m’acheminai donc vers
la principale Eglife de Clauftbal ; dont je
n’eus pas de peine à trouver le chemin, car
il fuffifoit de fuivre le concours. De toute
part on fort oit des maifons pour s’y rendre,
avec un air de férénité & de décence qui me
charma. Je me rappellai ce même jour, que
j ’ aiine tant à Londres , parce qu’il fe répand
dans les rues un peuple très diitinêl. C’efl:
le jo u r , où les honnêtes ouvriers & les bonnes
mères de famille, jouiflent vraiment du
repos, en fortant pour bénir Dieu du fuccès
de leur travail & pour prendre quelque relâche
; ou la parure eft honnête chez les femmes
mes ; où les jeunes hommes les abordenB
avec respeêl ; où l’on fent que le defir de
plaire n’efl point banal, maïs qu’il tend à
faire le bonheur de la vie privée, à y alléger
le poids des peines, & en animer les plaifirs.
Voilà ce que je remarquois auflï dans le
peuple de Clauftbal ; chacun fe comportoit
comme allant avec plaifir au fervice Divin.
Un livre de prières en leurs mains, faïfoic
une partie de leur parure. L ’habillement
étoit décent & propre : un peu de luxe ; mais
je le pardonnois, parce que mon pajjementier
en v it; c’étoit de la dorure fur le bonnet des
femmes. Cette dorure étoit brillante ; elle
n’avoit point un air de friperie, & c’efi: par
là qu’elle me plaifoit; elle ne fentoit point
la pompeufe mifère ; on la renouvelle quand
.elleeft ternie, &mon pajjementier ne mourra
pas de faim.
Je n’entrai dans l’Eglife qu’après que le
inonde y fut raifemblé , afin de jouir du
coup d’oeil de l’enfeiqble. Ce que je fentis
alors ne fauroit. s’exprimer. J’ avois pris de
l’intérêt à ce Peuple, par la crainte que j ’avois
eu en m’approchant de lui, de ne le pas
trouver heureux. Toutes mes craintes alors
fe diffipèrent, & je l’aimai comme digne de
fon bonheur. Mais il me refte trop à dire