
les de ce lieu favorifé ,& d’examiner comment
elles agiiTent.
Les chofes ne pouvoient s’arranger plus
heureufement pour moi à Claujlhal dans le
defir que j ’avois de juger de la contenance
générale de fes habitans. Ce Dimanche d’abord
fut un jour bien favorable; javois vû le
Peuple fie rendrë à l ’Eglife, je l’y vis raiTem*
b lé , & je l’en vis fortir. J’eus donc le tems
de l’étudier à mon aife fous les divers points
de vue que j ’ai eu l’honneur de décrire à V.M.
E i le jeudi fuivant j ’eus un nouveau fpec*
tacle, qu’on ne peut trouver que fur ces montagnes.
Ce fut le jour de mon départ, &
j ’y pafle tout de fuite ; parce qu’il faudra également
que je revienne en arrière pour les objets
qui tiennent purement à l’Hiftoire naturelle
& au travail des Mines, dont je n’ai point
parlé jusqu’ici.
Ce jour là donc je partis deClaujlhal a neuf
heures du matin , reprenant la même routé
que javois tenue pour y arriver^ J1 faifoit
beau, mais froid ; & je me fentois déjà fort
engourdi fur mon cheval, lorsqu’en commençant
à defcendre vers OJlerode, je rencontrai
plufieurs femmes qui venoient de ce côté là;
chargées de choux dans des hottes. Leur air
dispos & leurs belles couleurs, firent chez
isoi
un grand contrafte avec ce que je fentois; &
ne voyant entre leur fituation & la mienne
d’autre différence, qu’en ce qu’elles e*ef*
çoient leurs membres, & que je les avois immobiles
; je defcendis auflitôc de Cheval poui
jouir du même bien.
Il m’en coûta d’abord de marcher ; les pierres
me bleffoient, le moindre mauvais pas me
menaçoic de chûte ; mais loin d’être dégoûté
par ces inconvéniens ; ils me foutinrent en
me peignant vivement, combien ce que l’on
nomme les commodités de la. v ie , font incommodes:
& le contrafte fut complet dans un
moment. Bientôt une douce chaleur fe répandit
dans mes membres; ils devinrent fouples
comme auparavant ; & j ’evitai peut être
ainfi quelque rhumatisme, prêt à me failli
pendant ce tems défagréable où l’engourdiffe-
ment que m’avoit occafionne le froid ajoutoit
la pareffe de la volonté à celle des membres.
fift.il donc fi néceffaire d’avoir un cheval
pour fe transporter? me d ifo is -je en moi-
même fort gaiement, en Tentant mon agréable
indépendance. Eft-il befoin d’avoir ceci ;
ou cela? . . . . Medifois-je de plus en plus en
rencontrant fucceflivement fur mon chemin *
de nouveaux exemples d’une indépendance bien
fupérieure à celle dont je me faifois complément.