
gnée de toute culture, nous montre encore
les élémens de notre Chronologie terrertre.
C’eil au-travers de ces Bruyères que l’on arrive
à Deventer ; & là l’aspeéj: de pleine çul-
ture recommence, à la faveur des canaux de
YlJJel l’un des bras du Rhin. Mais bientôt
après on s’enfonce dans de nouvelles Bruyères,
dont on ne fort qu’à Arnheim. Et ici
j ’ai été frappé plus que je ne l’avois été encore.
Ces immenfes Bruyères de la Gueldre,
auiîi défertes que celles du Pays de Luns-
bourg & de la Wejlphalie, quoique environ-
' nées de toute part des Pays les plus peuplés
& les plus riches, ont été pour moi un phénomène
frappant. Je les ai presque entièrement
traverfées à pied ; examinant partout le
fable, la terre végétable, les, plantes ; & je
me fuis confirmé de plus en plus, que quoique
ces terreins foient déjà fi près de la Mer,
ils font de même date que ceux que j ’avois
obfervés à une grande diftance: mais comme
eux auffi, d’une antiquité peu reculée.
Je m’avançois vers de hautes & vaftes Collines
; & ayant appris de mon portillon, qui
alloit faire rafraîchir fes chevaux, que notre
route traverfoit leur chaîne; je pris le devant
pour fes obferver. J’avois aflez de tems
pour le faire à pion ajfe dans çe$ chemins kblonblonneux
& rapides, où les chevaux marchent
fort lentement*
Le filence de ces vartes folitudes ramena
toutes les idées qu’avoit produit chez moi le
premier aspeét des Bruyères de IVejlphalie ,* je
me fentis de nouveau transporté à l’origine
du Monde a&uel, à celui de la race humaine
qui l’habite, à fes progrès, à mes espérances
pour l’avenir. Je réfléchilïois fur ces objets
, en forçant un taillis au, travers duquel,
faute de connoître les routes, j ’étois obligé
de paffer pour atteindre une hauteur d’où je
pouvois découvrir la chaîne entière des Collines.
J’y arriv a i, & en effet je dominai
tout. Mais que découvris - je ! Le Pays le
plus défert qu’il foit poffible de fe figurer,
Bruyères après Bruyères, dans une étendue
dont l’oeil perdoit les confins.
„ A h ! m’é c r ia i- je , peuplez, humains;
,, peuplez ! N e croyez plus être réduits à
„ vous entr’égorger manque de fubfiftance !
„ fâchez feulement vous répandre dans les
„ lieux où la bonne Nature vous a frayé le
„ chemin ! Quand arrivera le tems , où les
„ Etats, las de fe croire plus heureux, en
„ acquérant plus d’étendue, & les Peuples
„ de s’armer les uns contre les autres pour
„ de fimples disputes de Noms ; au lieu d’em^
„ plo