
du petit Broken, nous l’atteignîmes aifément.
Mais il nous falloit un peu redefcendre pour
trouver le Blocksberg ; & peu à peu nous descendîmes
ta n t, que notre homme d’Oder-bru-
cke & unForeilier j qui nous fervoient de gui-
des, commencèrent à branler la tête en fe regardant
l’un l’autre. Mr. de Reden qui le remarqua
, foupçonna la vérité : nos gu ides
avoient perdu leur route; mais ilsespéroient,
dirent-ils, de la retrouver bientôt. Cependant
ils nous promenèrent encore une demi
heure, fans que nous viffions plus de certitude
dans leur contenance.
Heureufement Mr. d e R e d e n avoitune
bouifole & la carte du Pays , & il imagina
un moyen d’en faire ufage. Nous étions fûrs en
remontant au hazard, de trouver l’un ou l’autre
des Brockens ; & fûrs auffi, que il c ’ étoit
le p etit, la bouifole & la carte nous condui-
roient au grand. Ce fut le fommet du pe tit
que nous retrouvâmes ; & nous dirigeant de
là au Nord-Oueil pour redefcendre, nous arrivâmes
enfin au grand Brocken.
Cette fommité eil très remarquable. Elle
domine tout le Hartz, & cependant elle eil:
couverte d’une croûte de tourbe, qui a quelquefois
plus de 12 pieds de profondeur. La
végétation y eil d’une vigueur fingulière; on
e il
| eft étonné des jets annuels de la bruyère, du
mirtille, de toutes les herbes & des mouifes.
Nous ne le fentions que trop à nos jambes,
| qui le plus fouvent y étoient enfevelies; nous
lavions auifi beaucoup à faire pour ne pas-en-
■■foncer dans la tourbe , qui en quelques en-
■droits étoit fort molle; & fans de groifes
■touffes de joncs ou de gramen dont elle eil
Iparfemée , il feroit impoifible d’y marcher.
I II eil probable que cette tourbière fi élevée,
I&que rien ne domine, provient de la matiè-
Ir e fur laquelle ellerepoie, & de la forme de
|h Montagne. C’eit une fommité fort éten-
Idiie, & à pentes douces, ce qui ralentit le
■cours de l’eau. Elle eil de granit, matière
Ifolid e, fans feuillets & très fouvent fans cre-
Ivaffes, qui n’admet point l’humidité. Ainfî
■dès que ce fommet a été expofé à l’air & cou-
Iv ert de mouffe, l’humidité y a féjourné, &
■ adonné lieu à l’accroiifement rapide de tou-
Ites les plantes marécageufes. La tourbe qui
■ en eil r é fu lté e , j e ne faurois dire comment,.
I eft une matière qui retient l’eau comme une
I éponge. Ainfi les plantes qui ont continue
I d’y c r o îtr e , pompant l’eau des nues par leurs
[ feu illes, & celles de la tourbe par leurs raci-
[ nés, ont entaifé vingt fois plus de débris an-
I auels, que les gazons ordinaires. Voilà donc
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