
H I S T O I R E V i n . P à R T ï ï : ( L e t t r e L X X X I . d e u T E R R E . & 7
les hommes avoient encore leurs principales
demeures ; & nous retracent ainfi lés pre-
xniers âges de nos Contrées. Ils peignoient
donc ces Châteaux , appliqués contre les
Montagnes, avec de petites maifons entre
les rochers j& les fentiers tournoyans par lesquels
on y arrivoit. Ainfi ce fut pour moi
un fingulier plaifir, que de trouver là un bel
original de ces peintures intéreflantes dans la
g é n é a l o g i e de l'Homme.»
Avant que le Soleil fe fût affez avancé pour
faire couler la lumière fur toute la pente de la
Montagne, la route de fes rayons dans l’air
étoit rendue vifible par unevgpeur, qui ne
paroifloit que de ce côté là; car partout ailleurs
l’air étoit très ferein. Mais quand la
lumière fut plus répandue, nous vîmes les
caufes de ces vapeurs,, dans des maifonnettes,
appliquées en apparence contre la Montagne
, & toutes environnées d’arbres. La fumée
qui fortoit de leurs petites cheminées,
flottoit dans l’air & s’élevoit doucement ; ce
qui contribuoit beaucoup à rendre le coup
d’oeil pittoresque ; mais de ce pittoresque
ancien, qui renvoyoit l’imagination trois ou
quatre fiècles en arrière.
Quand tout fut éclairé dans la Vallée ,
nous montâmes au Château. C’efl le plus
beau
"beau de ce genre que j’aie vu ; il a même ¿es
relies qui me femblent magnifiques ; & pour
ceux qui aiment les Ruines, il y a des group-
Ipes qu’on ne fàuroit imaginer. C’étoit un
ouvrage étonnant pour la bonté de la maçonnerie
, il fubfifteroit encore en entier, fi les
François ne l’avoient abîmé dans le fiècle
|pafle. Ses murs étoient fi folides, qu’ils ont
fauté.comme des rocliers, par l'effort de la
[poudre, qui n’a pu défunir leurs matériaux ;
¡le mortier qui les réuniffoit, étant une vraie
étrification. On voit furtout une groflè
our, rompue par le fondement, & couchée
«dans le foffé comme une colonne abattue.
Elle fubfiilera fans doute bien des fiècles, fi
l’on n’employe pour la br ife r, le même
Imoyen qu’on a employé pour l’abattre. C’efl:
?à une preuve de ce que j ’ai dit ci-devant à
I V . M. au fujet de la pétrification ; que l’an-
rienneté des murs fort épais, fuffit pour leur
uvoir donné de la dureté, fans qu’il foit be-
■bin de fuppofer toujours qu’ils ayent été
faits de mortier meilleur que le nôtre : celui - là
eu moins n’eft pas des Romains. L ’humidité
fcui traverfe ces murs épais, remplit les premiers
intervalles des grains de fable de petites
particules, qui multiplient les points de
p n t a à , & pétrifient réellement le mortier.
En