
maîtres, puffent leur rendre ce fervice. Un
peu d argent, dot de la jeune femme, un peu
que tenoit le jeune homme de fon père vivant,
ou de ia fucceilion, avoit fourni la maifon-
nette de meubles limpies qui lui fuffifent, &
la métairie d’une vache & de quelques brebis,
Ce germe de troupeau paiffoit auffi non loin
de là fous la garde dôme petite Servante, qui,
partageant avec fes maîtres leur pain noir <St
les légumes de leur jardin, paroiffoit fort poniente
de fon fort.
Voilà bien peu , & cependant c ’en eit
aiTez. Bientôt iàns doute la jeune femme
donnera naiifance au premier foutien de la
famille. Sa mere ou fes voiiines, viendront
pendant quelques jours prendre foin d’elle &
de fa maifon. Rien n’eit il doux que de voir
combien ces bonnes gens s’entr’aident. Un
peu d’amour propre de matrone , qui aime
quelquefois à fe faire valoir dans ces occa?
fions, e ftle feu l motif d’intérêt qui s’ajoute
chez elles au plaiiirs naturel d’aider. La tâche
de la petite fervante fera augmentée; il faudra
quelle porte le nourriffon aux champs,
Mais elle le pofera fouvent fur la bruyère, &
i l s’y fortifiera en la i foulageant. En quatre
ans notre premier né, une verge à la main,
conduira déjà la genilFe fa contemporaine ; ou
bien
bien affis auptès berceau d’un troifième
enfant, il permettra à la fervante, devenue
plus grande, de vaquer aux foins, que la métairie
plus peuplée exigera d’elle. Les chevaux
devenus forts, laboureront les champs,
charieront le gazon : les arbres élevés feront
appercevoir déjà la nouvelle plantation à une
grande diilance: voilà un Colon en pied; une
famille nouvelle exiftante dansleMonde: voilà
le but de la Providence rempli, à l’aide
d’un bon Gouvernement, qui eil auffi un in-
ilrument en fes mains.
Mon imagination me peignit tout cela
à la vue de ce jeune couple perfeèlionnant
fon enclos ; comme le microscope montre à
nos yeux l’état futur de la femence qui fe développe.
L ’un & l’autre de ces fecours pour
notre entendement, ajoute aux premiers germes
de différentes espèces ce que l’obferva-
tion nous a déjà appris des fuites de leurs
développemens. J’avois vu de. nouveaux Colons
dans tous ces degrés de leurs progrès;
toujours contens de leur for t; toujours animés
par le concours de la Nature, & même
par les obilaçles. Leur jouiffance s’étoit arrangée
fuivant leur état ; leur corps s’étoit
ployé auXidivers travaux que le fol avoit exigés
pour produite ? ils s’étoient faits à leur
habitation
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