
d’espérer qu’on pourra éflimer un jour combien
il y a de tems qu’elle fe forme ?
Je ne diffimule point les difficultés de cette
recherche ; j ’aurai même foin d’expofer à
V . M . toutes celles que j ’ai déjà apperçues.
Mais ce ne font que des difficultés. La première
e it , celle-ci. Etes vous fu r ,” me dira
t-on, (tque cette couche de terre végétable
,, que vous croyez v ie rg e , n’a point été ja-
„ dis altérée? Que ce pays, inculte aujour»
„ d’hui, n’a point été cultivé autrefois, &
,, enfuite abandonné? ”
J’ai deux réponfes à cette objeêtion , qui
me paroiifent également folides. Je tire la
première de ce que nous montrent les ter-
reins incultes des fommités des Montagnes:
ces plaines de roc v if , fur lesquelles tout ce
qui e il végétable , a été formé par la marche
feule de la Nature & n’a jamais été altéré.
Or l’épaiiTeur de la couche de terre
*■végétable fur les Montagnes , correspond
avec celle de la couche des Bruyères. Quand
le concours des eaux ne fait pas exception,
cette couche ne'paife pas un pied; & fou-
vent elle eil moindre'. Ces deux phénomènes
s’éclairent donc l’un l’autre; & l’épais-
feur de la couche de terre végétable des Montagnes,
nous conduit à croire que celle de*
Bru-
B r u y è r e s n’a pas été plus altérée.' Mais il y
a une réponfe plus direéte.
Cultiver, c’eil remuer la terre à une certaine
p ro fon d eu rp ou r la rendre plus péné-
trable aux racines des plantes , & y renfer-
jmer les dépôts dé l’air & l’engrais qui les
mourriffent. Ainii dans tous les terreins cultivés,
les particules végétable s fe mêlent à la
matière propre du fo l, & en font ce que
j’ai appeîlé le terreau; qui Occupe alors une
plus grande profondeur que la couehe dè
terre végétable naturelle, foit à caufe du labour
, foit par une plus profonde admilîion
des eaux des pluies, foit par. les racines des
plantes, des arbres furtout, qui s’enfoncent
fort avant. Partout donc où le terrein e f l,
ou a été cu ltiv é , le terreau forme une couche
allez épailTe , où l’on trouve la matière du
fol inférieur, plus menuifée feulement, &
teinte par la terre végétable , qui lui donne
toujours un air plus brun ; car elle eil noirâtre.
Voilà donc une manière infaillible dè
connoître il un terrein a été autrefois cul-
tivé.
Or rien de pareil ne fe découvre dans les
grandes Bruyères dont je parle. Au - deifous
de la couche produite par la végétation, qui
eif trè§ brune, fe trouve immédiatement un
fable