
R iv iè r e , les Halles de quelques Mines; &
les Portillons nous apprirent que; e’étoit des
Filons de fer qu’on y exploitoit. Auffi ces
Montagnes - là font - elles de fchijle.
Ouoiqu’arrivés aux plus baffes Vallées,
puisque la Labn entre dans le Rhin àp eu de
dirtanee f nous avions encore une grands
Montagne à traverfer avant de regagner ¡ les
bords du Fleuve. En la montant à pied j ’atteignis
nombre de femmes qui faifoient enfem-
ble le même Chemin, portant chacune un panier
à leur bras ou fur leur tête. J’appris d’elles
qu’elles alloient porter à déjeuner à leurs maris|
qui labouroient dans les champs fur toutes les
croupes qui nous environnoient ; & en effet
elles fe réparèrent dès quelles arrivèrent fur
la première croupe, & chacune alla chercher
fon homme. (C’eft ainfl qu’en patois de nos
Montagnes, comme en Allemand , la plupart
des payfannes appellent leur mari.) La
connoiffance du but de cèlles-Iàme procura
beaucoup de plaiiir , l'orsqu’en continuant à
monter je me trouvai au * dèffus de ces croupes
cultivées où leurs maris labouroient. Je les
découvris tous, & je les vis aborder par leurs
femmes. Ce moment étoit attendu ; la charue
s’arrêtoit ; on s’afféioit auprès du panier ; &
du foin, dirtribué auxboeu%les faifoit partici-
- - ; • ' per
dér à ce moment de jouiflànce de leurs maîtres.
j ’avois affez d’avance fur nos chevaux
pour pouvoir contempler à mon aife ces douceurs
de la vie ruftique. Je voyois alors de-
I vant moi la Montagne oppôfée à celle fur la
I . quelle nous montions; toute fa croupe avoit
I [ été labourée une première fo is , & elle étoit
I I ünie comme un beau drap gris. Sa dirtanee
I ne me faifoit appercevoir que comme un
¡ point brun, le Montagnard qui la labouroic
I pour la fécondé fois ; & la trace de fon travail
■ du jour étoit diftinguée par une bande plus
foncée; Tandis que je fuivois de l’oeil l’ élar-
: giffement que recevoit cette bande par la
I charue, j ’apperçus fur fon bord un autre
I point brun qui s’approchoit du premier. Il
I y arriva, & ils ne cheminèrent plus ni l’un
I ni l’autre. , , ‘Voilà donc encore ujti déjeû-
I n e t , ¿ me dis -je à moi-même : „ &
i, qu’elle magnifique falle à manger pour tous
| „ ces gens-là! La rofée avoit paffé un
vernis fur tous les tableàux, le Soleil en do- ii toit les cadres & il y régnoit la plus agréable
! variété. J’aurois Voulu avoir un déjeûner à
J fa ire moi-même, tant l’effet du lieu & l’idée
I de leur bon appétit m’en donna; & je l’euffe
fait volontiers.de ce que renfennoient les paniers
de ces femmes.
M m S Eant*