
Lorsqu’on approche de Majlricht, la campagne
eft entièrement cultivée. C’eft là fans
doute l'effet des Villes : il leur faut des ali-
mens; <& elles en font naître quand une po-
iition favorable pour les arts ou le commerce
, ou toute autre caufe , les agrandiffent.
Mais au lieu que ces caufes font accidentelles,
& ne dépendent pas toujours-du meilleur
des Gouvernemens ; au lieu que dans ces
amas d’hommes, les alimens viennent fe
mettre au pillage, à la grande fouffranee des
foibles, des maladroits, des malheureux ; il eft
toujours poflible, avec d e l’aflidUité & delà
patience, de profiter des terres incultes pour
multiplier les hommes qui fe nourriffent &
s’entretiennent eux-mêmes en cultivant la
terre, & pour qui tout eft trouvé, dès qu’ils
font nourris vêtus & logésr Quand un
'Etat aura beaucoup de ces hommes là , il ne
fera presque pas befoin qu’il fonge aux Arts
ni au Commerce; ils naîtrons d’eux- mêmes
& fe maintiendront, par les befoins des gens
de la Campagne, qui fondent le Commerce
le plus fûr.
On arrivé à Majlricht par une pente affez
longue, du haut de la quelle on découvre cette
V ille , fituée dans une magnifique Vallée
où coule la Meufe. Elle eft au pied du
Mont
Mont St. Pierre, Colline dans l’intérieur do
laquelle les hommes ont fait un travail qu’on
a peine à concevoir. Majlricht, quoique
très intéreffant, comme Ville gaie bien bâtie
extrêmement bien fortifiée , nous arrêta
peu ; nous aspirions à entrer dans ces cavernes
immenfes, dont l’origine fe perd dans le
vague du paffé. Ce que j ’avois vu dans le
Hartz étoit très intéreffant pour l’Hiftoire
naturelle & pour le fpe&acle de l’induftrie de
l’Homme ; mais ce n’étoit rien pour la quantité
de fon travail, encomparaifon des fou-
terreins du Mont St„ Pierre. Nous y entrâmes
à une petite diftance de la V ille ; & dès
que nos yeux furent accoumés à la lumière
d’un flambeau qu’on portoit devant nous ,
nous crûmes être dans les corridors de quelque
grand Cloître, tant ils étoient larges &
élevés. Au premier Corridor latéral que nous
rencontrâmes, nous arrêtâmes notre gu id e ,
& voulions y entrer. „ Où voulez - vous al-
„ 1er ’’ nous d it-il en ricanant. „ Vous au-
„ riez bien à faire, fi vous prétendiez vifiter
3, toutes ces routes! Vous en trouverez cent
„ autres” . Et il n’outroit pas. Pendant un tour
d’une heure, qui nous conduifit à une autre
ouverture de la Colline, nous rencontrâmes
à tout inftant de ces Corridors qui s’enfon-
ij joient