
En entrant dans le Château, je me fentis
frappé d’une forte de respeél, à la vue d’une
vafte Cour entourée encore de belles façades
d’un goût fort noble, & q u i, du haut en
bas, portent dans des niches les ilatues des
hommes illuflres de la Maifon Palatine. Ce
coup d’oeil, & le filence qui règne dans cette
enceinte, qui n’eil plus habitée que par un
Concierge, (gardien de la fameüfe Cave ) ont
quelque c h o f e de très impofant. Mais rien
ne furpaffe l’agréable furprife qu’on éprouve,
lorsqu’après avoir traverfé cette folitude, on
arrive fur la terraife des murs extérieurs. El-
le pouvoit autrefois paffer elle - même poui
très belle, & elle eil encore aflez bien con-
fervée. Mais quel délicieux aspeét ! Quel
bon air ! On y commande la Ville j la Riviè-
l é , & toute la Vallée y par le débouché delà
quelle on découvre «la Plaine jusqu?au delà de
Manheim.
Je me repréfentois fur cette terraife, un
Prince ami de fon Peuple, examinant de cet
qbfervatoire comment s’exécutent fes Loix;
pénétrant pour ainfi dire au fein de chaque
famille dès que les fenêtres s’ouvrent; décou-
vrant ainfi mille détails, qu’il a feul un véritable
intérêt de connoître quand il eil le Père
de fes fujets, «Si qui fi fouvent font intercep-
I tés par les canaux intermédiaires. Quel réveil
plus doux, que celui qui chaque matin
lui offriroit, «Se le bon air à respirer autour
de fa demeure, «Se l’aspeét très discernable
des mouvemens d’un Peuple heureux !
La variété des coups d’oeils tout aii four
de ce Château eil vraiment enchantée. On
peut y trouver, depuis lâ plus profonde fo-
I litude dans les enfoncemens ombragés de la
Colline , jusqu’aux fcènes les plus animées
I du côté ou coule la R iv iè re , <5c où la Ville
H s’élève par diverfes branches jusqu’au pied du
f Château.
L ’air étoit à là fois fi câlme & fi ferein,
qri’il produifoit fur nous une grande partie de
[ l’effet calmant des Montagnes : & il falloit
I des efforts d’imagination pour concevoir, que
I dette douce demeure éprouve par fois des
■ orages, qui obligent fes habitans àfe tenir clos
I chez eux. C’eil là l’image de Pairie qui habite
un corps; & cette image n’e il point oifeu-
I fe. L ’habitant d’un tel Château , au mo-
! ment où les nuages l’enveloppèn t , lemena-
! cen t, verfent enfin la pluie <& la grêlé autour
I de lu i, fe retire dans fes murs ; en fe difant à
j lui ■ même ; cet orage eji pajfager & la fêrènitè
j reviendra. Heureux L’homme qui fait fe retirer
ainfi au dedans de lu i, pendant ce trouble
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