
ce caraêlère. J’ai vu là , ce que je n’avois vu
fi bien nulle p a r t , & que je voudrois voir
partout; l’empreinte des plaiiirs innocens
bien partagés. Nous fumes enchantés des
avenues de cette Ville. Nous nous étions
arrangés pour y arriver de plein jour, .afin
de pouvoir bien obferver. Lorsque nous en
fûmes à peu près à demi-lieu e , le chemin
s’applanit, devint régulier & bordé de haies
extrêmement bien entretenues. A tout moment
nous voyions de petites allées s’ouvrir
de part & d’autre & s’étendre au loin , bordées
auflî de belles haies ; & comme en quelques
endroits nous les dominions , nous pûmes
appercevoir que ce terrein étoit partout
divifé par d’autres haies.
Cette régularité ayant fixé notre attention,
nous remarquâmes que tout le terrein qui en-
vironnoit la Ville étoit divifé en petit jardins
, employés aux légumes & aux fleurs :
que chacun avoit fa petite maifonnette, allez
elevée pour dominer fur le tout : que la
plupart des portes donnoient entrée dans des
pavillons de verdure, & que des arbres fruitiers
, rangés en compartimens, augmen-
toient avec utilité l’agrément du coup d’oeil.
Quoiqu’il fût encore grand jour, la fraîcheur
des foirées d’Oétobre ramcnoit alors
vers
«ve rs la Ville ceux qui l’avoient quittée pouf
fe promener. Nous voyions les portes de
<±s petits jardins s’ouvrir, & des couples de
tlut âg e , quelquefois feuls, d’autres fois en-
fburés deieurs rejettons, montrer par la fé-
• ë n i t é de leur maintien , qu’ils venoient de
B b u ïr là de ces amufemens tranquilles, aux-
R u e ls on revient toujours avec le même
Bplaifir.
Un bel-esprit de nos jours appelle le plaifir
f t u ’on éprouve à la campagne, le premier des
mplaijirs infipides. C’effc qu’il ignore ce qui en
■fait le prix: la douceur d’y jouïr d’une com-
pagne qu’on ëiiime & qu’on aime , avec qui
v tout eil commun ; d’y jouïr de foi-même,
de la contemplation de la Nature, qui nous
Jibonduit à fon Auteur, à fes bontés, à nos
■espérances. Bien loin donc d’appeller la
■ouïfTance de la campagne un plaifir infipide,
n e l’appellerois l’aiTaifonnement des vrais plai-
■fits} & fi j ’avois befoin d’autorités , les hon-
■nêtes habitans à'Osnabruck me la fourniroient
■par leur exemple.
Mais ce qui ajoutoit beaucoup au plaifir que
■j’éprouvois moi -même en les contemplant,
ï c ’eft la grande divifion de ces agréables pro-
| priétés. Il femble qu’une fois tous les habitons
de la Ville s’en foient partagés la ban-
B 3 lieue}