34 V O Y A G E S
1702. dois. On s’y divertit fi bien, que
19, Avril ce Prince y reftajiifques à onze heures
du foir, 8c le^ autres jufqu,es ;à
deux heures après minuit.
Le dix-neuvième je reçus ordre de
'faire porter au Palais de l’Impera-
trice les portraits des Princefl'cs,
qui étoient achevez:, afin qu’elle,les
Vjt, Je m’y rendis ayeq Je beaù-fre.-
re du Prince Alexandre. Cette Prin-
çeffe étant indifpofée & même couchée
3 je, fis mettre les portraits devant
,fpn lit.- Elle, en parut fatisfai-
te, .me remercia, & me fit préfent
d’une bourfc d’cr , de fa propre.
main, quelle me fit l’honneur de
me doimer à, baifer. Kniuitc, elle
me demanda,, fi je refterpis encore
affez de rems pour pehrdre une fécondé,
fois le,s,.Princeffes à quoi
aiant répondu, une des Prinçeffesi
nous donna de l’eau de vie dans une.
petite.taffe de vermeil,puis unyer-
re de vin, aprèslequejnpus nous retirâmes.
Je fis porter de là, les portraits
au palais du Prince Alexandre,
ourjerles-mis en rouleau, pour
les, faire jiranfporter ailleurs. c Le:
Czar partit la même nuit pour fe
rendre à Archangel, accompagné, du
Prince Alexandre ; du Patriarche
MeHteMoyfewitz Sotof, Garde du.
grand ¡Seau ; .du premier, Miniflre
d’Etat le Gomte Fedder Alex^witz
Gollowiny du fieur Gabriel Gollof-
kiem-, du Iinees, Grégoire Gregoie-
v/itz-Rofiodariofskie,Bojar -, du Knees,
frùerje Juerjewitz Froetbetskoy , 8c
du Stolnick, qui fert- faMajefté à
table.
O n net- - Cependant,, on préparoit toutes
SemSs S c^°^es ncceffaires pour netroier
- les chemins' de la Slabode, à quoi on
commença à travailler le vingt-fixiè,
me. On fit premièrement ranger la
boue le long des maifons, pour la
faire emporter, après avoir choifi
deux Allemands , pour en être les
directeurs. Ils s’en acquiterent fi
bien, qu’à la fin de la femaine, les
rues furent en fi bon état,qu’on commença
d’y marcher..
Débordé- Le trmfrtiyejtdd., on apprit $-Atment
charnel que le degel y avoitfaitdéd
’ e a u . 1 j 1 • • 1 ~ - WBMM border la ri^iere ¿d une manière tou-
te. extraordinaire, & que cela avoit.
.|;çaufé beaucoup de mal: Que la plû-
part des maifons, fituées. près du
.Fort du Nouveau Fwmko avoient
: été fubmergées : Que la charpente
des chantiers de fa Majeiïé en avoit
J eté emportée;: Qu’un vajffeau, qui
iétqit;fur un chantier , ent avoit été ,
tournéfans deffus deffous: Que quel-
ques bâtimehs, qui mouilloient de-,
vant la .ville-, avoient, été: poitffés:
contre le pont du Palais , des marchands
: Enfin , que l ’eau étoit mon-
téejufques,d.ans quelques-uns des
jardins de. la', ville,
: Le lendemainOncommença à ern-
porter, la boiuëdeJa Slabode , chacun
aiant Ja ¡liberté, de le faire àfes
dépens, & d’ela. tranfporter dans fon
jardin pour le rehauifer, ou par tout
ailleurs, ojfon le jugeroit, à propos.
Et pour avancer d’autant plus cet
¡ouvrage, les marchands .Allemands
¡slaffemblérent à,l’hôtel des feigneurs,
belle maifon , . bien fi tuée avec, un-
beau jardin,. IJé.yrchoifirenç deux
autres, Infpeéteuts , qu’ils i. joignirent
aux premiers , pour travailler
de concert ¿aye'c eux à le per-
feêtionner.. C e choix fe.fitàla pluralité
des voix , chacun .écrivant le
¡nom de celui auquel, ildonnoit fon.
fuffrage. fur un petit billet. On
joignit à ceux-ci, huit autres per-
fonnes, .pour leur férvir d’affiftans,
8c on leur donna une autorité fuffi-
fante,
Le neuvième j jour 'de la St. . AS- '
colas , nous reçûmes des lettres, de :
Hollande du 28 du mois paiFé,ayec
la trifte.nouvelle.de la mort de fa
Majefté Britannique, Guillaume III.
de glorieufe mémoire s-qui n’avoit :
été malade que quatre jours. Cette
nouvelle caufa une grande conf-
ternation, parmi les étrangers ,. Se -
particulièrement i parmi nos. compatriotes
, qui connoifioient mieux
que perfonne le mérité de ce Prin-..
ce , & qui en prirent lé deuil pour -
6 fémaines.
Le dix-neuvième.- nous en reçûmes
d’autres , qui nous, apprirent ■
qu’il y avo.it eu une.grande inonda-
tion en Hollande , qui- avoit fubmer- .
gé plufieurs villages , &, fait périr.
beaucoup, de monde. - Elles, ajoû-
toient,
1702.
3. Mai..
DE C O R N E I L L E LE BRUN.
,1702. toient, que les Alliez avoient emw.
Mai.. porté Keyferswaert.,
Fête en , Le vinet-untème , on célébra la
mémoire féte de IVolla-diemerskai la Boearodief- p. -n . ■ a i , MÊSmm l
•Vierge Ja j ville ou I on pretend qu aparut
Marie, antrefois la Vierge Marie , chofe
dont on célèbre la mémoire’dans tine
des églifes de cette ville. Cela fe
fait toujours le jeudi avant la Pente- '
côte, qu’on nomme Seemick. Quelques
ecclefiaftiques fe rendent ce
jour-là,dèsle matin, àunefoffeou
puits, où l’on jette ceux, que l’on
trouvé affalïïnez dans les grànds chemins
ou ailleurs ; Sc ceux qui font
executed par ordre de lajufticé. Ces
puits dont 11 y en a 3 ou 4 aûx environs
de Mofcou, fe reihpliffént de ter-1
SÎ
re tous les ans, & on en creufe d’au- 1702.
très. C ’eft ce qui s’étoit fait la ai. Mai,
veille. On enterra ce jour-là, laniere
de l’Imperatrice , mòrte le jour
précèdent, parce qu’on ne laiflb guère
ici les morts hors.'dé tèrre/; choü
fe dont on parlera plus à^mjilemeh't
611 o?? Citìt enterrèùiént fe fif
fanshùèuhé cérémonie. Lièféùjprit
lemêhiejdfir ,aü'matin, à Mófcòu,&:
ne flit éteint que fur lesdixhèùi-ès1.’
Il prit'le 3 . de Juin , à un village'
qui-n’en eli pas "éloigné , &
pour la troifième fois à Mofcolii 'l i
partit quelques marchands, cù c‘è,
tems-là, pour fe rendre à Àrc'hanA
C II A P I T R E VIII.
Defcription des productions de la terre ; des fruits-, des maifons
de campagne, des viviers & autres chofes , auxquelles les
Ruflîensprennent plaifrr. Hermites Ruffiens prifonniers.
fes que les premières, &,dont cha-'
que gram a une queue particulière,
comme lesgrofeilles én notre pais,
qui croiffent ¿0 ou 30 à unegrape.
Celles-ci ne s’élèvent pas plus d’un
empan au-defius de la terre , & les
autres la moitié plus haut. On en
apporte tous les ans une. grande
quantité a Mofcou, où les étrangers
& les Rufïens en font bonne provi-
fion. Ces derniers en mettent dans
des tonneaux, qu’ils remplifient
d’eau froide, & l ’ylailfent tout l ’é-
te ; enfuite , ils la tirent & elle leur
fert de boilfon : Elle elt fort rafrai-
chiflante& allez agréable, fur tout
quand on y met du fucre ou du
miel. On en mange les grofeilles
de même pour fe rafraichir. Les
Allemands les prelfent 8c en tirent
le fuc qu ils font bouillir avec du
miel 8c du fucre à une certaine épaif-
feur, 8c en mangent avecleur rôti,
auquel cela donne un goût admirable.
Us en conferventauiïïdansde
petits tonneaux, 8c y mêlent du jus
d’autres grofeilles prefiées, liqueur
E 2 dont
T ’Allais cependant me divertir
J quelquefois à la campagne,
avec mes amis. Me promenant un
jour dans les bois, au mois de Juillet,
j ’y trouvai de certaines grofeil-
Bonnes les, qu’on nomme CofterAtfa , lef-
810 c es‘ quelles ont une petite aigreur affez
agréable. Les perfonnes de confi-
deration les mangent avec du miel
ou du fucre, comme nous mangeons
les fraifes. Ils en font auflï une forte
de limonade, 8c une liqueur ra-
fraichiffante qu’on preferit aux malades.
Les bpis des environs de Mofcou
font remplis de ce fru it, qui
croît à l’ombre fous les arbres par
toute la Rajfie. Ce mot de Cojle-
nitfa, lignifie une grofeillepierreu-
fe , 8c elle en a effeftivement une.
Chaque queue en produit 3 ou 4
autres plus petites, où pendent ces
grofeilles par vingtaines , comme
on le voit à la lettre A. Les feuilles
en font vertes hyver 8c été 8c elles
meuriffent au mois de Juillet
I l s’en trouve aufli d’une autre forte,
nommées Brufnitfa, plus grof