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19. Juill.
Grand
oifeau.
Chemin
dangereux.
Riviere
d ’A tatfiaei.
150 . i l \j j i« a v
braffe de long les ailes étendues.
C ’étoit un oifeau de proye, qu’on
y nomme Tjallagan, Sc qui reffem-
ble affez à un faucon. Je tirai de
fes ailés dé bonnes plumes à écrite.
I
Le tems étant toujours beau, bien
que le vent fut affez violent, nous
pourfuivimes notre voyage au fud,
& paffâmes à côté de pluiieurs cabanes
habitées par des Arabes , au
pied , fur le penchant, &c fur le
haut des montagnes. On en rencontre
en grand nombre, avec leurs
femmes, leurs enfans & leur bétail.
Ce quartier-là eft rempli de voleurs,
& cela oblige les voyageurs à fe tenir
fur leurs gardes fans fis laiffer fur-
prendre au fommeil. Nous tirions
auffi de tems en tems quelques coups
de fulil pour faire connoître que
nous étions fur les nôtres. Un de
ces voleurs ne lailfa pas des’appro-
cher pour nous reçonnoitre , mais
fa témérité fut recojnpenfée d’une
volée de coups de bâton.
Nous nous remîmes en chemin à
minuit, & arrivâmes une heure a-
près dans des montagnes couvertes
d’arbres. A la pointe du jour nous
paifâmes un chemin étroit & efear-
pé, où nous fumes obligez de mettre
pied à terre Sc de mener nos chevaux
par la bride. Lors que nous
fûmes descendus dans la plaine,
nous traverfâmes deux fois la rivière
d’Atatfaei, c’eft-à-dire, riviere
paternelle , laquelle tombe dans la
mer Cafpienne. Nous trouvâmes,
fur le fommet d’une montagne, un
étang rempli d’eau , autour duquel
fe tenoient un grand nombre
d’oifeaux grands & petits y Sc en-
fuite une fouree d ’eau admirable,
qui fort d’une montagne, Sc forme
un petit canal. C ’eft une branche
de la rivierç que nous avions traver-
fée deux fpis le jour précèdent, laquelle
nous paifâmes pour la troi-
fxème à gué , la fecheyeife aiant
été grande depuis (leux ans. Sur
les huit heures nous trouvâmes à
gauche un grand Caravanferai de
pierre démoli, Sc un eknetiere à
côté,avec pluiieurs tombeaux A'Aun
peu au delà, dans une plaine, *703.
à côté d’un ruiffeau, à quatre lieues 19- Juill;
d’un petit lieu nommé Rafarat , où
quelques Arabes avoient dreffé des
tentes. Il fallut envoyer chercher
des rafraichiffemens à une lieue de
là: -N
ous nous remîmes en chemin à
deux heures après minuit, montant
Sc defeendant continuellement des
montagnes , & nous traverfames
une riviere, que les Turcs nomment
Oroetfa, c’eil-à-dire, la riviere fe- Riviere
che : elle l’étoit effectivement & feche'
remplie de cailloux, & l’eftenhy-
yer auffi bien qu’en été. ,1 Nous entendîmes
vers le matin, désfaifans
dans les montagnes,où l’on trouve
auifi des lievres & pluiieurs fources.
L e dernier jour du mois nous nous
arrêtâmes dans une grande plaine
pierreufè entourée de rochers, où
nous trouvâmes dix ten tes à!Arabes,
qui nous fournirent dulait, du beurre
frais, des oeufs, Sc d’affez bonne
eau. Nous y tuâmes un mouton,
que nous avions apporté d’Ajira-
can, Sc fîmes bonne chere.
A deux heures du matin , nous
pourfuivîmes notre voyage, par des
montagnes pierreufes, & nous trouvâmes
à la pointe du jour , proche
d’une fontaine nommée Borbeelagh
auprès de laquelle il y avoit pluiieurs
Arabes fous des tentes, dans
un,lieu où les herbes étoienttoutes
brûlées par l’ardeur du foleil Sc la
grande fechereife. G’étoit le premier
jour d’Août, Sc nous ne fîmes
ce jour-là que trois lieues, ne pouvant
avancer en été, avec les chameaux
plus de 5; à 6. liéuës en 14.
heures j outre qu’il faut que les caravanes
s’arrêtent dans les endroits
où il y a de l’eau.- Celui-ci ëtoit à
trois lleuës de Samachi, & .comme
ces montagnes ne produifent point
de bois, on eft obligé de s’y fervir
de fiente de chameau , . pour faire
du feu, comme en .Egypte.
Nous continuâmes motre route à Riviere
heures après minuit & traverfâ-|^£
mes la riviere de Sahansjtt, oimons
ne trouvâmes que des cailloux au
lieu d’eau. En approchant :derjSarabes
Sc i e Turcs. Nous fîmes alte jmachi nous paifâmes àcôtédeqüelques
D E C O R N E I L L E L E
ques jardins fruitiers. On nous fit
1 . A o i t .arrêter à la douane pour compter
nos chameaux, ce qui fut bien tôt
fait, Sc puis nous entrâmes dans la
ville : C ’étoit le deuxième jour du
mois, Sc nous allâmes loger au Ca- r
ravanferai des Armeniens , où un 1.
marchand de cette nation nous regala.
C h a p i t r e XXXII.
Rejouiffances au fujet iu n e Robe Royale. Defiription de Sa-
machi. Ruines d’une grande Fortereffe fur la montagne de Ka*
ta-kuluftahan.
Robe env
o yée au
Gouverneur
de
Samachi.
Cherté
de vivres.
Belle cavalcade
du Chan.
'Y Ous apprîmes à notre arrivée
à Samachi, que le Ch an ou
Gouverneur de cette ville venoit de
recevoir du Roi fon maître une Robe
Royale, fur quoi il fit faire des
rejouiffances publiques quatre jours
de fuite.
Il faifoit une chaleur exceffive
lors que nous y arrivâmes, & comme
il y avoit deux ou trois ans qu’il
n’y étoit tombé de pluie, tout y
étoit d’une bherté extraordinaire,
& on donnoit 10. fols d’un pain,
dont ôn n’avoit accoutumé d’en
donner que deux, depuis plus de
cent ans. Les autres provifions y
étoient à proportion,& l’onpayoit
5. à 6. fols d’une poularde, qui ne
coutoit que fix liards auparavant.
, On examine à la rigueur toutes
les marchandifes qui paifent en cette
ville. Les officiers de la douane
fe rendent pour cela au Caravanferai,
où ils ont un appartement. Ils
n’exigent rien de cette vifite, on
leur paye Amplement 50. fols pour
la charge -d’un chameau, dont on
ne donnoit autrefois qu’un florin :
Mais cela ne regarde que les mar-1
chandifes qu’on tranfporte en Per-
fe ; 8c comme ce tranfport fe fait
ordinairement fur dès chevaux, il
faut y diminuer les balots de la moitié
, la charge d’un cheval n’exce-
dant pas 400. livres, au lieu que
celle d’un chameau eft de 8. à 900.
Le cinquième de ce mois,leGW
fe rendit fur les 8. heures du matin
à tin jardin , à un quart de
lieuë de la. ville, pour s’y parer de
la Robe dont on vient de parler.
Comme on avoit fait de grands préparatifs
pour cette ceremonie, je l’al-
lai voir avec pluiieurs autres'. On
vit paroitre d’abord plufieurs per-
fonnes à cheval,fuivies de dix chameaux
, ornés de deux petits’ éten-
darts rouges, à droite & à gauche.
Six de ces animaux étoient chargés
de timbales , que les Perfes
nomment Tambalpaes, entrelefqüèl-
lês.il y en avoit quatre d’une grôf-
feur extraordinaire , pointues par
le bas, qu’un timbalier affis fur un
des chameaux touchoit de tems en
tems. Quatre trompettes s’arré-
toient par intervales à côté du grand
chemin pour fonner de leurs Ka-
ramas ou trompettes , qui font
fort longues, larges par en bas, Sc
font une mélodie fort defagréable
à mon gré. On voyoit après' eux à
quelque diftance, quatre haut-bois,
qu’ils nomment Karana nàfier. Les
chameaux étoient aùffi fuivis dé
20. moufquetaires différemment habillez,
les uns de vert, les autres
de violet où de gris; & ceux-ci de
fix domeftiques du Chan ou Gou- '
verneur, lequel parut après eux,
monté fur un beau chèvàl châtain
parfaitement bien enharnaché. Ce
Seigneur qui avoit une vefte affez
courte , & un grand turban à la-
Perfane, étoit ®iyi de quatre Eunuques
, les uns bafanez, les autres
noirs , richement habille:z & bien
montez. Enfuite. on vit paraître
lés plus grands Seigneurs dè la ville
, & un grand nombre d’autres perfon