B B de la faire fans la permiflion du
1«. janv. R o i, que le Kalantaer, ou Bour-
guemaître des Arméniens , ne manque
pas de lui aller demander quelques
jours auparavant. Enfuite, ce
Prince leur envoyé demander le tribut
de 200. ducats, qu’.onlui paye
annuellement pour cela , 8c il leur
envoyé des gardes pour empêcher
le defordre -, chofe abfolument ne-
ceffaire à caufe du grand nombre
des Perfes Sc des. Turcs que la cu-
riofité attire en cet endroit. La foule
y fut fi grande ce jour-là, que
l ’Evêque n’auroit pû en approcher fx
ces gardes n’euffent écarté la foule à
grands coups de bâton. Les fept Evê-
ques, qui fe trouvent ic i, demeurent
dansleMonaftere Epifcopal de l’é-
glife d’ Annabaet, avec quelques prêtres.
Çemonaftere, qui entoure l’é-
glife, eft compofé de petites cellules
, où l’on ne voit rien que deux ou
trois petites niches propres à contenir
des livres , Se un pupitre élev
é , devant lequel ils s’affeyent à
terre! Les murailles en font blanches
& bien entretenues , & la lumière
y entre d’un côté'par deux ou
trois petites fenêtres vitrées. Le réfectoire
y eft allez long, & pourvu
d’une chaire, dans laquelle on lit
quelques chapitres pendant le dîner.
La chapelle eft peinte du haut
en bas , 8c reprefente des hiftoires
facrées, fans aucun art. Iln’eftpas
permis à leurs Evêques de fe marier
, mais il n’eft pas défendu aux
prêtres de le faire. Ils ont deux
Patriarches, dont l’un demeure,ici
8c l’autre à Eetfm-afin, ou aux trois
Eglifes , proche de la montagne
d'Ararat, à trois lieues d’Erivan.
Antipa- Nous vîmes en ce tems-là un é-
trcies11" trànge combat, entre deux mulets
mulets & & Un cochon noir, que ceux-là'au-
°“rs- roient déchiré , fi l’on ne fût venu
à fon fecours. Monfieur Kafielein
nous apprit la raifon de l’antipathie
de ces animaux-là contre les cochons
noirs , laquelle procédé de
celle qu’ils ont naturellement pour
les ours , auxquels ceux-ci reflem-
blent. I l nous raconta qu’aiant lâché
un jour un dé fesmuiets contre
un gros ours, le premier le déchira
6c le mit en pièces. Anfli, lorsque j
les condufteurs des caravanes ap- aj. janv.
prennent qu’il y a des ours en campagne,
lelquels déchirent fouvent
les chevaux, ils ne manquent pas
de mettre à leurs trouffes les mulets
qui ne leur font aucun quartier. Il
arriva même en ce tems-là , qu’un
certain meneur d’ours faifant faire
quelqu’exercice. à un de ces animaux
là , proche du Chiaer-baeg,
il paffa un Perfan monté fur un mulet
, lequel n’eut pas plûtôt fenti
l’ours qu’il fe jetta deilus avec une
furie, qui obligea lecavalieràcrier
au fecours, fans que perfonne ofât
approcher de lui. Le mulet fuivoit
cependant l’ours, ; & jetta fon cavalier
par terre , lequel en fut long-
tems malade , mais l’ours fe fauva
par un trou, oùlemuletneputpaf-
fer. Cela nous parut d’autant plus
furprenant, que nous n’avions jamais
ouï parler de cette antipathie ,
& il ne me fouvient pas non plus
d’avoir jamais lû, que les Romains
fe foient fervis de ces animaux-là,
pour cet effet, dans leurs fpeéta-
çles, d’où je conclus qu’il faut que
les mulets de ce pais-là différent en
cela de tous les autres.
Pc vingt-neuvième, on tint’ tou- Annivep
tes les boutiques Ülfpahan fermées,mortdu*
pour folemnifer l’anniverfaire de la Prophète
mort de leur grand Prophète Ali. ^
La chaleur augmenta de telle maniéré
au mois de Février, queplu-
fieurs plantes commencèrent àpouf-
fer hors de terre.
En ce tems-là, l’Agent à’Angleterre
, accompagné du Pere Antonio
Deftiro, Sc de plulïeurs autres,
vint rendre vifite à notre Directeur,
I qui les traita fplendidement à deux
1 reprifes, de forte que la nuit étoit
fort avancée lors qu’on fe retira.
Cela arrivoit affez fouvent, cet A-
gent & Mr. Kaftelein étant très intimes
amis , , 8c comme ils ..étoient
toujours bien accompagnez, celane
fe faifôit jamais fans éclat.
L e fixième Février , les Perfes fia du
aiant apperçu la nouvelle L u n e ,^ '^ «
conclurent immédiatement leur jeûne,
& fe réjouirent toute, la nuit en
faifant un grand bruit de tous leurs
ïnftru-
DEV« R N E t BlLIE; LE|B rI S n .
dura jùfques 1704,. inftrumens. Le feptième ils en ce- à la fin da mois,
7. F ev. lebrérent la fête lèlon la coutume,
avec un femblable carillon, & le
Ro i traita toute la Cour, & les Mi-
niftres étrangers. Lé lendemain,
Fête de fête de Gaddernabie, qu’il n’y a que
Gadder- „ . . 1 s K i ■ « , J ,A
nabie. ce Prince qui célébré, i l donna audience,
félon facoütume à tous les
Ils célé-b rère. nt le vendredi, viWngM- vo. I I Mars *
tième de ce mois, qui eft leur di- jÎ^ édec
manche, la fcte(dc l’année folaire.fo)aire.
Les Bazars font charmaùS à la chandelle
Confeillers d’Etat. Leurs femmes
& leurs filles fe rendirent auffi au
Palais , où lé Roi retint quelques
jours celles qui lui plurent le mieux,
honneur auquel elles font fort fen-
. finies. Il y eut de grandes rejouïf-
fauces & des, feux d’artifice au Pa-
Prefens . Le dixième de ce mois eft umjour
qui fe font aUqUel on fait conftamment des préau
Roi. fens au p_0|_ i[s con’fiftent en de
certains ouvrages de cire , qui re-
prefentent des maifons, des jardins.
Vent vio- & chofes pareilles. Il furvint une
ient. groffé'tempête ce jour-là , lèvent
étant au nord-oueft, comme il l ’eft
tous les ans, en ce tems-là, pendant
l’efpaee de plufieurS jours. On le
nomme Baad-Btedmusk ou Bed-muf-
•W in tdiaprés une fleur, qui éclôt
r.eur fir.-én cette fiiifon. Cette fleur croît
guüere. fur une efpece de faulc, & fort d’un
bouton de la groffeur d’une noifet-
te. Elle ne laiffe pas d’être affez petite,
fort deliée, & fort odoriférante.
On la diftille Sc on en tire une
liqueur très-agréable, qui reffemble
affez au forbet, & à la limonade,
lors qu’on y met du fucre, mais el-
Liqucur le eft plus'faine & plus forte. On
agréable. ja COnferve toute l’année en bouteille,
&• on en fait ausfi Fecher la
fleur, qu’on met parmi le linge pour
lui donner une odeur agréable. Les,
païfans l’apportent en abondance au
marché, Comme je n’en ai jamais
vû de femblable aux faules de notre
païs , j ’en ai fait le deffein qu’on
trouvera au num. 72. avec celui des
feuilles, qui ne pouffent qu’au mois
d’Avril. Le vent qui fait éclore
ces fleurs-là dure ordinairement juf-
ques à la fin de ce mois , pendant
lequel on a de beaux jours Sc d’afiiez
grandes chaleurs. Le premier
jour de Mars il tomba de la pluie,
qui fut fuivie d’un grand vent, de
froid, 8c d’un tems variable, qui
en ce tems-là, toutes'ÎèSbbù-
tiques en étant fort ornées, Sc fur
tout celles des confituriers, Sc des
fruitières , qui font un fpeétaclé
très-agreable à lac. vue. Celles des
cuifiniers font remplies de toutes
fortes de mets, qu’ils font porter
par toute la ville, ce qui né fe pratique
pas en d’autres païs. Au refte
elles font bien tôt dégarnies par lé
grand concours d’étrangers que la
fête attire à Ispahan.
Je me rendis debohrnàtinâuPa-FeftîH
lais ,, accompagné de notré écuÿer,Royil;
qui étoit' Perfan Sc fort connu, où
le Roi devoit regaler les principaux
Seigneurs de là Cour. Oh fë mit à
table fur les dix heures' , Sc le repas ;■
ne dura qu’une demi heure. LeS
viandes y furent fervies dans des
plats d'or & d’argent,en quoicon-
fifte la plus grande magnificence des
Rois de Perfe. Ils étoient tous couverts
au nombre- de 20Û, & on eri
fert une fois autant lors qu’il y a
plus de compagnie. La plupart dès
Seigneurs, qui font invitez à cette
fête, font couverts d’un turban garni
de perles & de pierres precieufes.
Ce bonnet fe nomme Tha-eits-ti-
maer, Sc il y en a qui font ornés dé
plumes de héron d’une grande beau!
té. Ils les ôtent aufli-tôt qu’ils font
hors de la falle du feftin, & reprennent
ceux qu’ils portent ordinairement.
Un domeftique les porte devant
eux. Ces Seigneurs font d’une
magnificence extraordinaire pen-^gnig.
dant le cours de cette'fête, Sc furrenqe d»s
1 -'P e r fe s. tout ce jour-là, auquel on ne voit
perfonne qui ne foit habillé de neuf.
11 y avoit proche de l’endroit où lé
Roi donna ce feftin, 12. chevaux
de main de 'dé Prince, richement
caparaçonnez, dont les houffes Sc
les .felles étoient garnies de perles
Sc de pierres precieufes, Sc les brides
d’or mafiîf. Ils étoient attachez'
avec dès cordons de foyè, qui trai-
noient jufquès à terre, mais il falloir
bien fe donner de garde de mar-
«tçhe'r ' g