1701. des jeunes Princeffes , que j’avois I je pris la liberté d'offrir à fa Ma- 1702.
11.Mars peintes en grand, afin de les achever, jefté , au palais de Probrosensko, i^-Mars
le Czar m'aiant ordonné d’y mettre [un exemplaire de mes V oyages , fait lpree“r
que j’avois fait relier pour cela, fent ie
me flattant, comme il arriva', que g™^07*'
ce Prince le recevrait favorable- Car.
Portrait
^ d e r im -
peratrice.
la derniere main,parce,qu’ildevoit
lej envoyer quelquè part. Je le fis
avec toute la diligence pofflble, &
les habillai à. Y Allemande, comme
elles le font ordinairement lors qu’elles
paroiffent en public ; mais je leur
fis une coëfure à l’antique, cela é-
tant laiffé à mon choix.
Jepaffe préfentement au portrait
de l’Imperatrice, Paraskowya Feo-
'' dorofna. Cette Princeffe, qui n’a
pas plus de 30 ans, eft affez replet-
te, ce qui ne lui fiedpasmal, parce
qu’elle a la taille belle. On peut
même dire qu’elle a de la beauté,
beaucoup de douceur, 8c des manieres
fort engageantes. Auifi, eft-
elle très-bien dans l’efprit du Czar.
E t des
jeunes
Princeffes.
ment.
Le vingt-neuvième il s’alla diver- Diratif.
tir en chaloupe fur la riviere de Aiff"',..
Moska , qu’il defeendit contre la viere
marée , trois ou quatre werfles au-Moska' '
delà du pont, en paffant devant le
château. Il la remonta enfuite fa-
vorifé de la marée, avec beaucoup
de rapidité, trois ou quatre werfles
en deçà du même pont, où il revint
enfuite: le Prince Alexandre
l’y attendoit, accompagné de quelques
marchands Angjois & Hol-
landois, qu’il regala encore de chair
& de poiffon, non-obftant le carê-
Le jeune Prince Czarien Alexey 1 me & la fémaine fainte, laiffântun
Petrowitz lui rend fouvent vifi
te, 8c aüx jeunes Princeffes fes filles
-, dont l’aînée, Catherine Iwa-
noffna, n’a que douze ans; la
fécondé, Anne Iwanojfna, pas
plus de dix ; & la cadette , Paraskowya
Iwanojfna, que huit. Elles
font toutes trois très-bien faites.
La fécondé eft blonde & a le teint
parfaitement beau, & les deux autres
font d’agréables brunettes. La
cadette a beaucoup de vivacité; 8c
toutes trois une douceur & une affabilité
toute charmante. Il ferait
difficile d’exprimer toutes les hon-
nêtetez qu’on m’a faites en cette
Cour; pendant que je travaillois à
ces portraits. On ne manquoitpas
de me préfenter tous les matins des
liqueurs 8c d’autres rafraichiffe-
tnens : on m’y retenoit même fou-
vent à dîner, &onfervoittoûjours
autant de viandes que de poiffon,
bien que l’on fût dans le carême,
maniérés dont j’étois furpris. Pendant
la journée on avoit foin de me
donner du vin 8c de labiere. Auifi
ne croi-je pas qu’il y ait de Cour
au monde , & fur tout une Cour
comme celle-ci, où l’on ait jamais
traité un particulier avec plus de
bonté, dont je conferverai toute ma
vie une profonde reconnoiffance.
chacun en pleine liberté. Mais lui,
6c ceux de fa fuite , ne mangèrent
que de la viande.
Le mois d'Avril commença par Grande
un dégel fi violent, que la glace ¿™a“ ur
difparut en peu de tems. La riviere
s’enfla , par un changement
fi foudain, à un point, auquel on
ne l’avoit pas vue de mémoire
d’homme. Les moulins, qui font
fur la Toufe en furent fort endommagez
; & les viviers fe débordèrent
8c inondèrent le terrain bas qui eft
derrière les maifons. Les grands
chemins même n’en furent pas ex-
emts. Il eft vrai que cela arrive fou-
vent au printems, lors que les neiges
commencent à fondre. La Sla-
bode des Allemands en fut tellement
remplie, que les chevaux y avoïènt
de la boue jufques aux fangles. Le
Czar, en étant informé, la fit net-
toier, 8c détourner celle qui aurait
pû s’y rendre.
Le cinquième au matin, le feu prit Vigilance
fur les 6. heures, à la maifon d’uni111
, . , 1 m 1 lors que le de nos compatriotes dans la ôlabo- feu prend
de. Ce Prince s’y rendit immédia-cn,v êtement
8c donna les ordres néceffai- <jroir!
res pour le faire éteindre, comme
il fait toujours en de pareilles oeça-
fions. Il y a auifi des gardes à toutes
les heüres de la nuit, qui ne
Encouragé par tant d’honnêtetés, I manquent„pas de donner l’allarme,
I lors
.1702. qû’il arrive un accident de cet-’
s. A v r il te nature.
On folemnifa, cejour-là, la fê-
Fête de te de Pâque, à la grande fatisfàc7
1 aîue- tion des Rujfîens, tant à caufe du
tems fouhaité de la refurreûion de
Jefus-ChriJl., que pour la conclu-
fion du carême. Les cloches ne cef-
fent pas de fonner pendant toute la
nuit, qui précédé cette fête, le jour
même ,8c le lendemain. Ils commen-
Oeufs de cent alors-à fe donner des oeufs dé
Pâque. Pâque, 8c cela dure pendant 15.
jours. Cette coutume fe pratique1
également parmi les grands 8c les
petits, les vieux St.les jeunes, qui
s’en donnent mutuellement. Les
boutiques en font remplies de tous
côtés, qui font teints 8c bouillis.
La couleur la plus ordinaire de ces
oeufs, eft celle d’une prune bleue.
I l s’en trouve cependant, qui font
teints de vert 8c de blanc,d’une grande
propreté; d’autres, très-bien
peints , dont on donne jufques à
deux ou trois rifdales ; 8c enfin,
plufieurs fur lefquels on trouve ces
paroles : C h r ii s t o s ■ w o- s
C h r e s t ; c’eft-à-dire, Chrifi eji
rejfufcite'.. Les perfonnes de diftinc-
tion en ont chez eux, qu’ilsdiftri-
buent à ceux qui leur rendent vifi-
te, 8c les baifent à la bouche, en
leur difant, C h-r i s t o s v o s
C h r e s t , à quoi celui qui le reçoit
répond: W o i s t i n o wo-s
C h r e s . t , c’eft-à-dire, Il eft véritablement
rejfufcite'. Les gens d’un
rang médiocre fe les donnent dans
la rue, de la maniéré qu’on vient
de le dire, 8c perfonne ne les refu-
fe , de quelque condition ou fexe
qu’ils puiffent être. Les domefti-
ques ne manquent pas auifi d’en porter
dans la chambre de leurs maîtres,
dont ils reçoivent un préfent,-
qu’ils nomment Praesmk. On m’en
apporta 13.01114. très-proprement J
colorez par des femmes. Autrefois
on fe faifoit une affaire très-ferieu-
fe de ces préfens, mais cela eft bien
changé , depuis un certain tems,
comme tout lerefte. Les Rujftcns de
qualité 8c les marchands étrangers
ont pourtant encore fait de ces préfens
d’oeufs de félicitation au Czar,
qui regne aujourdhui, depuis qu’il 1702.’
eft fur le Trône, 8c en ont reçu de p. A v r il
femblables de fa main; mais cela
n’eft plus en ufage.
Le neuvième, le Czar alla enco- Divertif-
re fe divertir fur la riviere de Mos-
ka. Les rameurs de la chaloupe de viere de
fa Majefté, 8c de celle de la Prin- Moslta'
ceffe fa foeur, étoient en chèmifés
blanches, à la Hollandoijë, avec de
la dentelle par devint. 1 :Tous les'
marchands étrangers’ reçurent ordre,
la veille, d’en préparer chacun
une couple. Ces1 chaloupes a -1
voient deùx petits mâts, pour fe'
fervir de voiles lors que le vent ferait
favorable. On commença' à
defeendre la rivière, à la maifon de
plaifance du Général Velt-marechal
Bories Petrowitz, Czeremetof,ûtüêe'
fur cette riviere, à une petite dif-
tance de Mojcou, vis-à-vis de label?
le maifon de fa Majefté, nommée
W tróbjoweg oro. Ce Général y avoit
regalé ce Prince 8c toute fa fuite le
jour précédent. Elle étroit compo-
fée dti -Prince Czarien-; de laPrin-
1ceffe, foeur de fa Majefté1, accompagnée
de trois où quatre dames
Rujfíennes ¡ dé plufieurs grands fei-
gneurs, 8c-officiers de fa maifon-;
de notre Refident 8c de quelques
marchands' étrangers , avec 15. ou
16. dames Allemandesr Toutes les
chaloupes étoién't devant la maifon
de ce feigneur, à peu près au nombre
de 40. aiant châcùne io.ou 12.
rameurs. Le Czar s’y étant placé-,
avec toute la compagnie,- on commença
à defeendre la riviere avec
une rapidité extraordinaire, au delà
du pont, 8c on fe rendit à Ko-
lomnensko, maifon de plaifance de
fa Majefté, à vingt werjtes deMof-
cou par eau, quoi qu’il n’y en ait
que fept par terre. On y arriva à
fept heures du- foir, 8c on y trouva
un fouper roial. Le lendemain on
y fut traité de même, 8ç on éut la
mufique. Sur les trois heures après
midi on retourna à la ville,- les uns
en caroffe, les autres en calleche,
8c le refte à cheval. Le jourfuivant
Mr. Brants regala fa Majefté, accompagnée
du Refident de Hollande
8c de plufieutz Anglois Si Hollan-
E dois.