1692.- d’arbres, 8c les côtes, ou la charpen-
24. Août; te ¿edans d’un bois fort mince.
Elles ont deux à trois bralîès de
long, Sc qu’une aune de large; Sc
-cependant elles ne laiflent pas de re-
lifter à de grades tempêtes. Ces
Leurs dt-OJUaques- habitent fous terre en hy-
enhyver.;ver 5 & font un trou au-deffùs de
leurs cavernes, par où la fumée fort.
Lors qu’il neige & qu’ils dorment
nuds autour du feu, félon leur coutume
, il arrive fouvent qu’ils ont
la moitié- du corps couvert de neige
, & quand ils fe réveillent ils fe
tournent de l’autre côté vers le feu ,
fans que cela les incommode.
Leurja- ■ Lors qu’un OJiiaque conçoit de
la jaloufie de fa femme , il coupe
du poil du ventre d’un ours, & le
porte à celui qu’il foupçonne être
d’intelligence avec elle. Quand celui
ci eft innocent, il l’accepte, Sc
lors qu’il eft coupable, il avoue le
fa i t , Sc convient à l’amiable avec
le mari du prix de fa femme. Ils 1692,
n’oferoient faire autrement, étant m.Aoûïi
perfiuadez, qu’au cas qu’il s’en trouvât
un affez hardi pour accepter ce
poil, étant coupable, l’ours., de la
peau duquel lé poil a été coupé, ne
manquerait pas de le dévorer au
bout de trois johrs. Ils prefentent
aufli en pareils cas des arcs 8c des
fléchés, des haches Sc des couteaux,
Sc ne doutent nullement que ceux
qui les acceptent injuftement, ne
periffent en peu de jours. C ’eft une
chofe qu’ils affirment unanimement,
Sc que confirment les Rujfiens, qui
demeurent en ces quartiers-là. Mais
c’eft affez parler des Ojliaques. Les L e s t o r i s
rivages de VOby , fur lefquels ils nonculti
habitent, ne font pas cultivés, de-vés.
puis la mer jufques à la riviere de
Tan, à caufe de la violencedu froid,
de forte qu’ils ne produifent ni bled
ni miel, 8c qu’on n’y trouve que
des noix de cedres.
C h a p i t r e XXII,
I l quite
l ’Oby .
Arrivée a Makofskoi fu r la Keta. Difette de vivres. Départ
de Makofskoi. Defcription de la Keta. Continuation du voyage
par terre. Arrivée d Jenizeskoi. Defcription de cette
ville• '
M ort .
d'un de
fes dora
effi- .
qüës.
A r r iv ée
à Ma-
k o fsk o i,
fur la /
Keta;
A Près avoir navigé quelques fé-
Jp\_ maines fur l ’Oby, 8c paffé
quelque tems parmi les Ojliaques,
Mr. Isbrants arriva le p rentier Septembre
à la ville de Keetskoy fur la
Keta , qui tombe au nord-ouëft
dans VOby-, levingt-huitieme au mo-
naftere de St. Serge, & le troifieme
Oïlobre au village de Worozeikin,
où mourut le même jour d’une fie-
vre chaude , jean George Weltfel,
de Slefwick, Peintre, qui étoitàla
fuite de ce Miniftre.
JLefeptiemeOBobre, il arriva heu-
reufement à Makofskoi, où il fit enterrer
ledit Weltfel au bord de la ri- !
viere fur une petite éminence. Il
s’ennuïa plüs, 8c eut plus de peine
fur cette riviere , que dans tout le]
refte du voyage, âïant em ployé cinq
fémai'nes à la monter fans rencontrer
perfonne, à la referve de quelques
Ojliaques, qui s’enfon çoient d’abord
dans les bois. Ces Ojliaques-là différent
de ceux qui habitent le long
de VOby, 8c ont une autre langue;
mais ils font Idolâtres comme eux.
Il fouffrit beaucoup dans ce tra-incoitf
jet, faute deprovifions, 8cfurtout
de farine, n’en aiant fait aucune, de- Keta.
puis fon départ de Tobol, à la referve
de quelque poiflon frais. Il n’en
auroit cependant pas manqué s’il
en eût été moins libéral envers les
pauvres Ojliaques, qui étoient fur
fon vaifleau , dont ils tiroient de
tems en tems la ligne, 8c qui n’au-
roient pourtant pas manqué de prendre
169,2. dre là fuite, .fi l’on.n’eût eu conti-
7. ©¿ïobi nuellement .les yeux fur. eux , tant
Depart
de Makofskoi.
Dents
o s de
Mam-
muts.
ils étoient fatigués ; aufli: sien, dé-
bandoit-il toùs les jours quelques-
uns. Ils furent même tellement af-
foiblis à la fin, par la longueur, du
travail, qu’ils auraient fuccombé, fi
l ’on n’eûtfait demander du fecours
au Gouverneur de Jenizeskoi , qui
ne manqua pas d’en envoyer immédiatement
à ce Miniftre, fans quoi
il aurait été obligé de refter trente
lieues en deçà de Makofskoi, expo-
fé à périr dans les glaces 8c dans les
neiges ;. lès bords de la Keta n’étant
pas habitez jufques-là.
. Il n.e fut même pas plutôt parti
de ce village, que cette riviere, qui
n’eft pas praticable en hy ver, fe gela.
Elle coule dans un pais rempli
de, bois 8c de brouffailles 8c ferpen-
te tellement, qu’on eft fouvent étonné
de. fe trouver le foir, à peu près
au même-endroit dont on eft parti'
à midi. Ce païs abonde en coqs de
bruiere , en faifans 8c en perdrix ;
Sc c’.eft un plaifir de les voir boire
en troupes, foir 8c matin , fur le rivage
, où Ton en tire autant qu’on
veut en paffant , chofe qui lui fut
d’un grand fecours .fur le "déclin de’
fes provifions. Le terrain y produit
aufli des grofeilles rouges 8c noires,
des fraifes Sc des framboifes|| mais
la riviere n’abonde pas en poiflon.
On.trouve proche delà au nord-
eft, dans les montagnes, des dents 8c
des. qs d’un animal, qu’ils nomment
Mammut -, 8c fur to u t, fur le rivage
des rivières de Jenifia , de Tru-
gan, de Mongamfea , 8c du Lena,
proche de Jakutskoi, 8c jufqu’à la
mer glaciale. Cela arrive principalement,’
lors qu’un grand degelfait
déborder cette derniere riviere, 8c
qué les glaces emportent une partie
de la terre des montagnes. Alors
on trouve dans cette terre gelée
prefque jufqùes au fond, des carcaf-
fes de ces animaux-là, 8c fur tout
lors que ce degel n’eft pas violent.
Une perfonne de la fuite dé Mr.,
l’Envoyé , qui avoit été employée
plufieurs années à cette recherche,
l ’affura qu’ii avoit trouvé la tête
d’un de ces Mammuts, dans ces terres
dégelées; que l’aiant fendue,¿1.1692.
en avoit trouvé la.chaftprefqugtou-^.oaobi
te pourrie, les dents en fortant comme
celles d’un Eléphant, Sc y tenant
fi ferme qu’il avoit eu bien de
la peine àftes.en arracher. Qtt’aianü
trouvé enfuiteiî'jan. quartier de devant
du même animal,; il en avoit
porté un os à la ville de Trugan,
aufli gros que le milieu du corps
d’un homme ordinaire, 8c enfin
qu’il avoit obfervé quelque chofe,
qui reffembloit à du fang , autour
du col de cette bête. ..
. Qn parle diverfement de cet Ani- Senti- .
m al:;,! Les Jakutes , Tungufes , 8c
Ojliaques, prétendent qu’ils ne for- i’ég»rd
tent jamais du foin de la terre, fous
laquelle ils vont de côté 8c d’au- mats,
tre. Ils difent même qu’on voit
fouvent la terre s’élever 8c s’affaifler
lors qu’ils font en mouvement, dé
forte qu’il s’y fait des foffes affez,
profondes. Ils aflùrent , qu’ils,
meurent aufli tôt qu’ils découvrent
la lumiere, 8c qu’ils ne fortent de
terre que par accident, ce qui fait
qu’on en trouve de morts fur les ri?
vages élevez , 8c qu’on n’en voit jamais
en vie.i
Mais les Rujfiens, qui habitent; opiniôn
j depuis long-tems en Syberie, croyent j ! 'snsR,ut'
que. ces Mammuts,font des animaux^tégard.'
femblables aux élephans, à larefer-
vé qu’ils ont les dents plus crochues -
8c plus ferrées. Ils difént qu’il y
(en avoit en ce païs-là j avant le
déluge, le climat y étant plus
chaud qu’il n’eft aujourd’hui ;
8c que leurs corps entraînez parles
-eaux du déluge y furent enîevelis
dans les entrailles de la terre; qu’ils
y font toujours reftés depuis , 8é
que la gelée, à laquëlle ils ont été
conftamment expofés, les a empêchés'
de pourrir, 8c enfin, que le dégel
les expofe de tems en tems à la lumiere,
chofe affez vrai-femblable. IÌ
n’eft pas même neceflaire pour ce- :
la , que le climat ait changé de
temperature ‘ depuis le déluge,
puis que ces corps pourraient y a-
voir été pouffez par les eaùx, qui
couvrirent toute la furfàce de la terre
eh ce tems-là. Lors que les dents
de cès animaux ont été expofées
Uni a n - tout'